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DROIT À L’ERREUR ET SOCIÉTÉ DE CONFIANCE : TOUT SAVOIR SUR LA LOI DU 10 AOÛT 2018

La loi n°2018-727 du 10 août 2018 relative à « un État au service d’une société de confiance » a été publiée au JORF du 11 août 2018, texte n°1. Texte « fourre-tout » sur l’amélioration des relations avec les usagers, il dépasse très largement le « droit à l’erreur », qui était son objet initial, puis qu’il comprend aussi de nombreuses mesures de simplification des formalités, d’allègement des normes et de dématérialisation des procédures.

Son article 1er approuve la  « stratégie nationale d’orientation de l’action publique »,document annexe au statut juridique incertain. Ce texte comporte deux chapitres : «

  1. Pour une administration de conseil et de service ;

2. Vers une action publique modernisée, simplifiée, décentralisée et plus efficace »

Il énumère quelques principes dont certains sont innovants tels que « les personnes intéressées sont associées aux politiques publiques dans des conditions adaptées à chaque domaine d’intervention…lorsqu’une personne est soumise par la loi ou le règlement à une obligation, elle est réputée s’y être conformée dans ses rapports avec l’administration…les rapports entre l’administration et le public sont fondés sur les principes de loyauté, de simplicité et d’adaptation… L’action publique fait l’objet d’ évaluations régulières, notamment quant à son efficacité, son mode d’organisation, sa capacité à satisfaire les usagers dans leurs demandes de conseils et de services… L’action publique n’entraîne l’édiction d’une norme que si celle-ci est absolument nécessaire à sa réalisation… La proximité territoriale doit permettre à l’administration d’assurer le service public sur tout le territoire de la République, notamment grâce à l’implantation de maisons de services au public… ». Elle fixe, pour les administrations de l’Etat, deux objectifs :la dématérialisation complète en 2022 de toutes les procédures sauf la première délivrance d’un document d’identité ; l’institution du droit pour toute personne à ne pas être tenu de produire à l’administration une information déjà détenue ou susceptible d’être obtenue auprès d’une autre administration. Il sera rendu compte de son application chaque année au Parlement.

La loi modifie sur des points essentiels le code des relations entre le public et l’administration et le complète. Le droit à rectification, en cas d’erreur commise pour la première fois ou sur demande de l’administration, est reconnu sauf mauvaise foi (définie comme une méconnaissance délibérée des règles applicables) ou fraude prouvées par l’administration et en dehors des questions de santé, de sécurité des personnes et des biens et d’environnement ou d’application du droit européen. Le droit au contrôle sur demande sur des points précis est ouvert et les conclusions expresses de ces contrôles sont opposables à l’administration sauf changement des circonstances ou nouveau contrôle conduisant à de nouvelles conclusions. Les délais d’instruction des demandes ne seront plus suspendus s’il manque une pièce non essentielle au dossier.

Les intérêts de retard en matière fiscale, sont réduits de 50% en cas de rectification spontanée d’une déclaration ou de 30% en cas de régularisation après demande de l’administration ou engagement d’un contrôle ; les prises de position, même tacites, prises par l’administration lors d’un contrôle sont opposables ; une ordonnance définira le régime d’examen à la demande de la conformité à la législation fiscale des opérations d’une entreprise. Les données foncières détenues par les administrations des finances et de l’urbanisme seront accessibles à tous.

Les circulaires de l’Etat non publiées sont abrogées  et les circulaires publiées seront opposables, même en cas d’erreur; les documents administratifs publiés sur internet sont opposables ;  les procédures de rescrit et d’opposabilité sont étendues à de nouveaux domaines (douanes, urbanisme, droit du travail…) ; l’approbation, expresse ou tacite, d’un projet de prise de position formulée par un administré sera expérimentée ; des certificats d’information décrivant ,pour une activité, l’ensemble des règles applicables sont opposables. Le tribunal administratif pourra être saisi par l’administration à titre préventif apprécier la légalité externe d’un décision non règlementaire . Le recours à la transaction est encouragé par une limitation de la responsabilité des fonctionnaires et la médiation devra être généralisée

Différentes expérimentations sont prévues : référents uniques ; guichet unique pour la politique de la ville ; limitation de la durée des contrôles administratifs des petites entreprises .Une procédure de rectification en matière de prestations sociales indues est organisée. La dématérialisation des procédures et l’échanges de données entre administrations seront généralisés. La procédure « dîtes-le nous en une seule fois », interdisant à l’administration de demander des renseignements qu’elle ou une autre administration détient dans un traitement automatisé, sera étendue à titre expérimental au bénéfice des entreprises.

Des simplification diverses et importantes sont envisagées dans les domaines de l’état-civil (dématérialisation des actes gérés par les Affaires étrangères et expérimentation de la suppression de justificatif de domicile pour l’obtention de passeport ,carte d’identité, permis de conduire et certificat d’immatriculation), des obligations des associations cultuelles, de la construction (création d’un « permis de faire » permettant de déroger à certaines normes s’il est prouvé que les résultats sont équivalents seront atteints), de l’accueil de la petite enfance, de la participation de proches aidant aux services à la personne, de la fusion et du rapprochement d’établissements d’enseignement supérieur, des enquêtes publiques (pouvant être remplacées par la consultation électronique si le projet a déjà fait l’objet d’une consultation antérieure sous l’égide d’un garant), d’enquêtes environnementales (possibilité de dispense en cas de modification ou d’extension d’ouvrages), d’ autorisations d’ouvrages de production d’énergie (éolien en mer, éolien terrestre, géothermie, réseaux), de spectacle vivant….

Les numéros surtaxés sont interdits pour les services publics.

La réorganisation des chambres d’agriculture sur une base régionale est engagée.

La responsabilité civile des fonctionnaires devant les juridictions judiciaires est limitée aux fautes détachables de l’exercice des fonctions.

De nombreuses mesures devront précisées par ordonnances et par décrets. De nombreux rapports d’évaluation devront être remis au Parlement, dont un sur l’application du principe « silence vaut acceptation ». La Cour des comptes est chargée spécifiquement d’une évaluation comptable et financière des dispositifs de réduction des amendes et pénalités en matière fiscale et douanière. Un conseil de la réforme et un comité de pilotage sur le droit à l’erreur ont été annoncés.…