Budget de l’État et des opérateurs
->De nouveaux moyens d’évaluation pour les députés
Selon un communiqué, le bureau de l’Assemblée Nationale a adopté le 6 mars 2019 de nouveaux dispositifs pour améliorer les outils d’évaluation des parlementaires. Dans le cadre de l’évaluation exante, un outil de simulation fiscale intitulé « Leximpact » a été proposé pour simuler l’impact socio-économiques des mesures fiscales ainsi que des amendements aux projets de loi de finances. L’objectif est de permettre un accès numérique accessible à tous qui serait opérationnel avant le budget 2020. En matière d’évaluation expost, un accès au logiciel « Chorus » est mis à la disposition des députés pour leur permettre d’accéder en temps réel à la comptabilité budgétaire, la comptabilité générale et la comptabilité d’analyse des coûts.
->Les bons résultats de la Banque de France
Selon son rapport annuel, le résultat de la Banque de France a atteint 7 Mds d’euros en 2018, soit une hausse de 16% par rapport à l’année précédente ou trois fois le bénéfice de la Bundesbank allemande. Ces bons résultats s’expliquent par le fait que la Banque a bénéficié des gains dégagés par la politique monétaire de la Banque centrale européenne. La Banque de France va reverser un montant record au budget de l’État de 5,6 Mds d’euros (3,22 Mds de dividendes et 2,4 Mds en impôts sur les sociétés). Le rapport fournit de nombreuses données sur les différentes activités de l’institution : stabilité monétaire (580 Md€ d’achats de titres dans le cadre des programmes de la BCE) ; stabilité financière (24 Md€ de flux quotidiens par le système de paiement de détail et 250 Md€ de flux quotidiens par Target 2 pour les gros montants) ; services à l’économie (55.979 droits au compte ; 177.591 dossiers de surendettement).
->Des progrès en matière de déficit public et une stabilisation de la dette
L’INSEE a indiqué, dans un communiqué du 26 mars 2019 sur les premiers résultats des comptes nationaux 2018, que le déficit public avait atteint 59,6 Md€ d’euros soit 2, 5% du PIB, niveau le plus bas depuis 2006. C’est la deuxième année consécutive que le seuil des 3 % est donc respecté (il était de 2,8 % en 2017). La dette publique s’est elle, stabilisée à 98,4 % du PIB (comme en 2017). Par ailleurs, les dépenses augmentent de 1,9% en euros courants (56 % du PIB) mais baissent de 0,2 % en volume et les recettes progressent de + 2,3 % (53,5 % du PIB) alors que le taux des prélèvements obligatoires est réduit de 0,2 % pts de PIB à 45 %. De plus, l’INSEE a revu légèrement à la hausse ses estimations en matière de croissance pour l’année 2018 à + 1,6 %.
->Les sociétés contrôlées par l’État
Selon une étude de l’INSEE publiée le 29 mars 2019, le nombre de sociétés contrôlé par l’État continue d’augmenter en 2017. L’État contrôle 1751 sociétés françaises dont 89 directement. Par rapport à 2016, l’État contrôle 43 sociétés de plus principalement en raison de la multiplication de filiales au niveau de la Poste (+ 36 sociétés) et EDF (+ 32 sociétés). Ce dernier groupe détient près de 628 sociétés et la Poste demeure le premier employeur avec 223 000 employés. Les effectifs des sociétés contrôlées par l’État connaissent cependant une diminution par rapport à 2016 avec 767 365 salariés. À noter enfin que l’année 2017 a été marquée par « une restructuration de la filière nucléaire française » et que « les investissements publics dans le secteur de la santé et le numérique se confirment ».
FINANCES LOCALES
->Les départements franciliens au capital d’ADP ?
L’annonce non prévue des Pays-Bas concernant leur potentielle entrée dans le capital d’Air France-KLM a déclenché un petit séisme à l’heure où les parlementaires débattent de la privatisation de cette entreprise. Devant cette situation, les sept départements franciliens ont émis une offre pour entrer au capital d’ADP, en lien selon certaines sources, avec Ardian et un fonds européen d’infrastructures. Les départements proposent de racheter 29,9 % du capital permettant ainsi d’éviter de déclencher une OPA permettant, avec les 5% de l’Etat, de conserver une minorité de blocage. Financièrement, cela représenterait une offre avoisinante les 3 milliards d’euros. Si en apparence, cette proposition semble alléchante, reste à voir l’attitude des banques vis-à-vis des collectivités en lien également avec la rentabilité d’une telle opération liée aux dividendes potentiels.
->Coût des mesures d’exonération et d’abattement d’impôts directs locaux
Ce rapport, désormais classique, a été rendu public en mars 2019 en application du point 11 de l’article 33 de la loi de finances initiale pour 2017. Ce document va au-delà car il s’efforce d’énoncer le coût net de chaque exonération supporté par les collectivités territoriales après versement des compensations de l’État. Il permet également de comprendre l’importance des pertes de ressources en raison de choix locaux. Il liste l’ensemble des exonérations avec les compensations et l’indication de l’année du taux de fiscalité pris en compte pour la compensation. A titre d’illustration concernant les communes, les allocations compensatrices se sont élevées en 2017 pour la taxe foncière des propriétés bâties à 98 M€, pour la TFPNB à 12 M€, la taxe d’habitation à 1,2 milliards d’euros et pour la contribution foncière des entreprises à 2,4 M€. Pour la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, les communes ont perçu 140 M€ dont 42 M€ de montants dégrevés au profit des entreprises mais répercutés par l’État aux communes.
->La contribution de Territoires Unis au grand débat national
Les trois grandes associations d’élus locaux (ADF, ARF et AMF) ont remis le 13 mars dernier une contribution au grand débat. De façon générale, ces associations proposent un acte III de la décentralisation avec, dans le domaine financier, la modification de la Constitution afin de consolider l’autonomie financière et fiscale des collectivités territoriales. Cette contribution souhaite ainsi une sanctuarisation du taux de TVA affecté aux régions et pour les départements la nécessité qu’ils retrouvent de l’autonomie fiscale. Pour le bloc local, là encore, la contribution plaide pour que leurs ressources en termes de dotations de fonctionnement soient garanties (impôts locaux, nationaux, dotations d’État ou de péréquation). La réalisation de tous ces objectifs passe par une nouvelle logique avec la mise en place d’une loi d’orientation pluriannuelle des finances locales, qui devra bien évidemment trouver un fondement constitutionnel.
->Le mode d’emploi des dotations et fonds de soutien à l’investissement
La circulaire du 11 mars 2019, en matière de dotations et fonds de soutien à l’investissement en faveur des territoires en 2019, détaille les règles applicables en 2019 relatives à un certain nombre de dotations regroupées, à savoir la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), la nouvelle dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID) et le fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT). Malgré cette circulaire commune, chaque dotation obéit à ses propres règles. Ainsi, la DSIL est répartie par le préfet de région, la DETR, particularité notoire est régie par une commission départementale composée d’élus locaux et de parlementaires. La DSID comporte une première part finançant des projets s’inscrivant dans une logique de cohésion et la seconde part concerne certains départements reposant sur une logique de péréquation.
->Les disparités en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties
L’analyse de la DGCL (bis n° 133 – mars 2019) intitulée Taxe sur le foncier bâti : quelles disparités entre collectivités ? n’est pas anodine, tant cet impôt, en l’état ou remanié, constitue l’une des clefs d’entrée de la réforme de la fiscalité locale. Cet impôt, s’élevant à 33,6 milliards d’euros, constitue plus du 1/3 des recettes directes des collectivités locales. Il s’agit donc du premier impôt devant la taxe d’habitation (un quart des recettes) et la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) (un cinquième) perçu par les communes et les départements. En outre, elle constitue les trois quarts des ressources fiscales directes des départements et la moitié de celles des communes ; en revanche, les groupements s’appuient très peu sur cette taxe (5 %).Le fait que les départements s’appuient principalement sur cet impôt explique que son taux augmente beaucoup plus vite que ceux du secteur communal. La répartition demeure parfois difficilement compréhensible au niveau communal, en revanche, pour les départements la géographie reste assez cohérente : taxes foncières par habitant élevées en Île-de-France et dans les départements touristiques du Sud, faibles dans les anciens départements industriels de l’Est et du Nord (cartes).
->Comment relancer l’investissement ?
Une communication de la mission flash de l’Assemblée nationale sur l’investissement des collectivités territoriales animée par M. Rémy Rebeyrotte et Mme Christine Pires Beaune estime qu’il convient de relancer l’investissement. Si celui-ci est reparti à la hausse, il n’atteint pas le niveau de la précédente période. De nombreuses propositions ont été émises dont certaines relèvent des relations Etat-collectivités comme le retour du pouvoir de taux ou l’assouplissement du critère de l’endettement dans la contractualisation alors que d’autres s’avèrent plus techniques et dont un certain nombre sont sans incidence financière pour l’tat. A cet égard, la mission préconise de modifier le plan comptable ou le calendrier de la DSIL pour permettre la prise en compte dans le budget primitif. On peut également noter la proposition de modifier les critères d’éligibilité et de répartition de la DETR afin de renforcer la part des départements ruraux et les dotations aux petites communes ou encore d’intégrer la rénovation et la restructuration des réseaux d’eau et d’assainissement parmi les grandes priorités d’investissement de la DSIL. La mission propose de revenir dans des réformes passées comme abaisser à 20 % la participation minimale des communes de moins de 5 000 habitants pour leurs investissements qui interviennent dans un domaine de compétence à chef de file prévues à l’article L. 1111-9 du CGCT.
FINANCES SOCIALES
->L’âge moyen du départ effectif en retraite continue de progresser
Les statistiques de la CNAV pour 2018 font apparaître une progression de l’âge moyen de départ effectif en retraite qui s’est élevé à 62,7 ans (62,4 ans pour les hommes et 63,0 ans pour les femmes ), contre 62,4 ans en 2017 et 62 ans en 2011. Cette évolution est pour une bonne part due au comportement des femmes, qui prolongent leur activité pour compenser les pertes dues à des carrières plus heurtées et au fait que les départs anticipés pour carrières longues ou handicap se font aussi plus tardivement. De quoi nourrir les débats sur l’opportunité d’un report au-delà de 62 ans de l’âge légal de départ en retraite qui se sont rallumés avec vigueur depuis la mi-mars (cf. infra).
->La Cour des comptes propose de mettre les CHU en réseau
Le référé de la Cour des Comptes adressé au Premier Ministre le 7 décembre 2018 et mis en ligne le 5 mars pointe les limites auxquelles est parvenu le système institué par l’ « ordonnance Debré » en décembre 1958 qui a confié aux CHU une triple mission en matière de soins, de formation et de recherche. Le référé fait valoir que la spécificité des CHU pour les soins est peu marquée par rapport aux hôpitaux, alors qu’ils devraient se centrer sur les « activités de recours » nécessitant les moyens les plus complexes ; l’activité de recherche est concentrée dans une dizaine d’établissements (l’AP-HP représentant 31% du total), alors même que la position internationale de la France recule. Le résultat financier des CHU s’est fortement dégradé au cours de ces dernières années, avec un déficit consolidé de 405M€ en 2017, dont l’AP-HP représente environ la moitié, sans que cela soit à mettre au débit de la tarification à l’activité du fait des financements spécifiques dont bénéficient ces établissements, mais plutôt à des charges insuffisamment maîtrisées, notamment du fait du coût des nouveaux traitements. La Cour formule plusieurs recommandations, dont la principale consisterait à mettre les 30 CHU existant en réseau, en concentrant les moyens techniques et l’offre de soins la plus lourde (par ex les transplantations) sur une dizaine d’établissements.
->La Cour des Comptes se penche sur plusieurs dispositifs de l’Assurance chômage
Le référé de la Cour des Comptes du 13 mars 2019 sur les « droits rechargeables et l’activité réduite » met l’accent sur deux dispositifs qui, dans le cadre de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, ont été institués pour assouplir les conditions d’indemnisation des travailleurs précaires ou en activité réduite, et qui, à l’usage, ont donné lieu à des comportements d’optimisation coûteux pour l’Assurance chômage. Le régime de l’ « activité réduite » permet, sous certaines conditions, à un travailleur qui dispose de plusieurs emplois partiels et qui perd l’un d’entre eux de cumuler une allocation chômage avec le revenu des emplois conservés, et d’aboutir ainsi, assez fréquemment, à un revenu total plus important que dans la situation antérieure. Par ailleurs, le dispositif des « droits rechargeables » permet à un certain nombre de salariés de cumuler une allocation et d’un salaire, sans limitation de durée, et d’optimiser leurs revenus en fractionnant leur activité et en multipliant les contrats de moins d’un mois. Ces dysfonctionnements sont pour une bonne part imputables au mode de calcul de l’indemnisation, historiquement fondé sur une base journalière et non mensuelle. En même temps qu’elle recommande un meilleur accompagnement des publics en activité réduite par Pôle Emploi, la Cour préconise que ces sujets-qui avaient d’ailleurs été débattus en vain dans la négociation des mois passés- soient traités dans le nouveau régime d’assurance chômage.
->Le gouvernement accorde une rallonge budgétaire aux hôpitaux
La Ministre des Solidarités et de la Santé aannoncé le 13 mars le versement de 300 M€ aux établissements publics et privés de santé pris sur l’enveloppe 2018 , ce qui a été rendu possible par une progression des dépenses hospitalières moindre que ce qui était prévu par l’ONDAM en raison d’un ralentissement de l’activité. Cette dotation s’ajoute aux 415 M€ qui ont été débloqués en décembre 2018. Cette mesure devrait répondre-au moins partiellement-aux inquiétudes exprimés par la Fédération des hôpitaux de France sur la crise budgétaire des établissements (cf. Repères de janvier).
->Lancement des travaux techniques sur le revenu universel d’activité
La Secrétaire d’Etat auprès de la Ministre des Solidarités et de la santé a lancé le 14 mars les travaux du comité d’orientation sur le revenu universel d’activité, dont le principe avait été annoncé par le Président de la République en septembre 2018 et qui sera animé par Fabrice Langlart, nommé rapporteur général de la réforme en janvier dernier. Ces travaux donneront lieu à une concertation institutionnelle avec les collectivités locales, les associations et les partenaires sociaux et à une concertation citoyenne faisant participer notamment les bénéficiaires des minima sociaux.
->La Sécurité sociale manque de peu son retour à l’équilibre en 2018
Les résultats des comptes 2018 de la Sécurité Sociale ont été présentés le 15 mars par la Ministre des Solidarités et de la Santé et le Ministre des Comptes publics. Le solde du Régime général s’établit à + 0,5 Md€, l’ensemble RG+FSV accusant un déficit global de – 1,2 Md€, contre – 5,1 Md€ en 2017. C’est donc le retour à un quasi équilibre pour la Sécurité sociale, même si les résultats sont un peu moins bons que les prévisions de la Commission des comptes de la SS de septembre 2018, qui tablait sur un déficit global de – 0,4 Md€ (cf Repères de septembre). Cette évolution est due à un excédent plus faible que prévu de la branche vieillesse, et, d’une manière générale, à un tassement des recettes de cotisations liés au ralentissement de la croissance en 2018 par rapport au bon résultat de 2017. Mais, selon les résultats provisoires de l’INSEE sur les comptes publics de 2018, les Administrations de Sécurité sociale (dont le périmètre est plus large que celui des organismes relevant des lois de financement de la Sécurité sociale visés ci-dessus) dégagent un solde positif de l’ordre de10 Md€, qui permettra de ramener le déficit global des comptes publics à 2,5 %.
->Plus d’un milliard d’Euros versés au titre de la prime exceptionnelle
La prime exceptionnelle pour les salariés prévue par la loi sur les mesures d’urgence économique et sociale de décembre 2018 aura bénéficié à plus de 2 millions de salariés pour un montant total dépassant le milliard d’Euros.Le montant moyen de cette prime-qui est totalement défiscalisée et désocialisée jusqu’à 1000€ pour les salariés gagnant jusqu’à 3 fois le SMIC s’est élevée à 450 €. Elle a été versée par des entreprises de toute taille, et la totalité des entreprises du CAC 40, certaines l’ayant attribuée bien au-delà des conditions prévues.
->La mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté
Au conseil des ministres du 20 mars, la Ministre des Solidarités et de la Santé a présenté une communication sur la mise en œuvre du Plan pauvreté, annoncé par le Président de la République le 13 septembre dernier (cf. Repères de septembre). Les mesures portent en premier lieu sur la prévention auprès des enfants : création de 30 000 places de crèche supplémentaires, réforme de la tarification dans les crèches avec la mise en place d’un fonds de soutien à 3400 communes pour permettre le service de repas à des enfants de famille pauvres dès le 1er avril 2019, refonte de la formation des professionnels de la petite enfance… En second lieu, l’accent est mis sur l’insertion par le travail : entrée en vigueur, à partir de septembre 2020, de l’obligation de formation jusqu’à 18 ans, élargissement de l’accès à la « garantie jeunes », renouvellement automatique de la CMU-C pour les bénéficiaires du RSA, création de la « garantie d’activité » qui pourra couvrir jusqu’à 300 000 personnes, mise en œuvre d’une démarche de contractualisation financière avec les départements pour accompagner l’insertion, avec un fonds dédié de 210 M€ en 2022. Deux autres réformes viendront compléter ce dispositif en 2020 : la création d’un « revenu universel d’activité » fusionnant un grand nombre de prestations sociales existantes et la mise en place d’un « service public de l’insertion » pour un accompagnement personnalisé du retour à l’emploi.
->Retour du débat sur le report de l’âge légal de départ en retraite
La dernière quinzaine de mars 2019 a été marquée par une certaine confusion dans le discours gouvernemental sur l’avenir du système des retraites. Le 17 mars, la Ministre des Solidarités et de la Santé s’était déclarée ouverte « à titre personnel » à un report de l’âge légal de départ en retraite au-delà de 62 ans, approuvée en cela par d’autres membres du gouvernement… avant de se rétracter le mercredi suivant à l’Assemblée Nationale. Le mardi 19 mars, le Premier Ministre estime qu’il ne faut pas « s’interdire de réfléchir (…) à travailler plus longtemps pour revaloriser les petites retraites et prendre soin des plus âgés » (c’est-à- dire financer les besoins du Plan dépendance à venir), et la polémique est attisée par l’opposition qui reparle ouvertement d’un report de l’âge légal à 64 ou 65 ans. Dans un entretien au JDD du 24 mars, le Haut -Commissaire à la réforme des retraites-Jean-Paul Delevoye- a confirmé pour sa part que l’engagement du Président de la République pendant sa campagne de ne pas revenir sur l’âge légal de 62 ans et qui avait été réaffirmé au départ de la concertation sur le futur régime universel était toujours d’actualité. Pour M. Delevoye, le débat sur les 62 ans est dépassé, car le fondement du nouveau régime par points sera le libre choix donné à chacun d’accumuler le plus de points possible pour améliorer sa pension. Il donne par ailleurs quelques indications sur certains des sujets les plus sensibles de la réforme : les régimes spéciaux( les dérogations pour des départs anticipés doivent être fondés sur des critères objectifs communs aux travailleurs du privé et du public) ; le cumul emploi-retraite (les règles doivent être assouplies) ; l’équilibre des droits par rapport aux carrières (le nouveau système par points devra mieux prendre en compte les carrières courtes et hachées) ; le mode de revalorisation des pensions ( le débat doit être tranché au niveau politique) ; le plafond pour le calcul de la pension (le plafond de revenus bruts pris en compte par le futur régime à points pourrait aller jusqu’à 120 000 € annuels-contre 320 000 € actuellement, la possibilité de se constituer une épargne retraite au-delà étant ouverte). Le Haut-commissaire a confirmé son intention de remettre ses propositions pour le début juin. Mais de nouvelles déclarations ministérielles sur le report de l’âge légal ont exacerbé le débat jusqu’ à la fin du mois, au point que M. Delevoye a envisagé de mettre sa démission en balance.
->L’UNEDIC va rester dans le rouge plus longtemps que prévu
Les dernières prévisions financières de l’UNEDIC publiées le 26 mars tablent sur un déficit de -1,9Md€ en 2019, de -0,4Md€ en 2020 et un excédent de 1,4Md€ en 2020. Ce résultat est moins bon que ce qui était anticipé en juin dernier (cf. Repères de juin 2018), où on escomptait un retour à un quasi équilibre dès 2019. Selon l’UNEDIC, cette évolution est imputable à une révision en baisse des perspectives de croissance pour 2019 et à un retard de la baisse du chômage indemnisé jusqu’à 2020. De sorte que l’endettement du régime ne devrait pas baisser en deçà de 37 Md€ d’ici 2021. Ces prévisions ne prennent, bien sûr, pas en compte les mesures d’économies qui pourraient résulter du décret que va prendre le gouvernement pour réformer le régime (cf. Repères de février)
->Remise dur apport Libault sur la dépendance
Dominique Libault a remis son rapport sur la dépendance à la Ministre des solidarités et de la santé le 28 mars. Il dresse d’abord les perspectives démographiques à l’horizon 2050, avec une prévision de 4,5 millions de personnes de plus de 85 ans, du fait de l’arrivée des baby- boomers dans cette tranche d’âge, dont 2,2 millions seraient en perte d’autonomie ; le coût financier de la dépendance est estimé à actuellement 30 Md€, dont 23,6 Md€ de financements public (Assurance maladie, CNSA, départements), ce qui représente 1,2 points de PIB. Cet effort, bien qu’important, reste inférieur à celui des pays d’Europe du Nord et n’apporte pas une réponse satisfaisante: on s’en remet trop au placement en institution des personnes au lieu de leur maintien à domicile ; il reste complexe et peu lisible ; il ne permet pas d’attirer un personnel qualifié suffisamment nombreux pour faire face aux besoins à venir. Le rapport propose 175 mesures, dont les plus commentées ont été la restructuration de la filière des EHPAD et une meilleure articulation de ceux-ci avec les services d’aide à domicile, une revalorisation des métiers du service à la personne âgée et une baisse du reste à charge de 300 € en EHPAD pour les revenus modestes. La charge supplémentaire de ces réformes pour les finances publiques serait de 6,2 Mds en 2024 et de 9,2 Md€ en 2030, ce qui porterait l’effort public à 1,6 points de PIB. Le financement se ferait sans nouveau prélèvement obligatoire-ce qu’a confirmé Mme Buzyn – mais par réaffectation de ressources existantes : à partir de 2024, après l’extinction de la dette sociale portée par la CADES, une partie du produit de la CRDS (dont le rendement annuel est de l’ordre de 7Md€ par an) serait affectée au financement de la perte d’autonomie ; d’ici 2024, il serait procédé au recyclage d’une partie des excédents du Régime général et à des ponction sur le Fond de réserve des retraites (qui dispose d’environ 36Md€). Le rapport ne propose pas d’assurance obligatoire pour la dépendance, mais une meilleure mobilisation de l’épargne volontaire à cette fin, ainsi qu’une réforme des dispositifs de viager. Il fait également des propositions en matière de gouvernance, avec au plan local un arbitrage pour le pilotage de l’offre médico-sociale entre les ARS ou les départements, et, au plan national, un renforcement des compétences de la CNSA. Toutefois, le débat sur le financement est loin d’être clos, puisque Mme Buzyn a déclaré, le jour même de la remise du rapport, qu’ « à terme nous n’avons pas d’autre choix que de travailler plus longtemps », sous entendant par là sans doute plutôt une augmentation de la durée de cotisation qu’un report de l’âge légal de départ. (cf. infra).
FISCALITÉ ET PROCÉDURE FISCALE
->La taxe « française »sur les services numériques
En conseil des ministres le 6 mars dernier, le ministre de l’économie et des finances a présenté un projet de loi portant notamment création d’une taxe « française » sur les services numériques. Son article 1er propose d’instaurer une taxe fiscale sur les recettes tirées de certains services fournis par les GAFA afin de les mettre à contribution lorsqu’une part significative de leur valeur est tirée de la participation d’internautes localisés sur le territoire français. Cette taxe fiscale s’inspire largement de la proposition de directive de la Commission européenne en cours de négociation. Seront ainsi taxées, à hauteur de 3 %, les recettes tirées des prestations de ciblage publicitaire. Ces prestations de service seront taxées à proportion de la part de l’activité des internautes qui est réalisée depuis la France. Le commerce en ligne et la fourniture de services numériques ne sont pas concernés. Sont en outre exemptés les services de communication, les services de paiement et les services financiers réglementés. Seuls les services disposant d’une large audience et générant des revenus importants seront concernés (750 M€ de services numériques taxables au niveau mondial et 25 M€ de services numériques taxables au niveau français). Son rendement budgétaire devrait atteindre environ 500 M€ par an.
->La nouvelle trajectoire de réduction de l’impôt sur les sociétés
L’article 2 du projet de loi relatif aux GAFA prévoit, pour les exercices ouverts du 1er janvier au 31 décembre 2019, que le taux normal de l’impôt sur les sociétés des entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 250 M€ sera de 33,33 %, pour la fraction de bénéfice imposable supérieure à 0,5M€. Le taux normal de 28 % s’appliquera pour la fraction de bénéfice imposable inférieure ou égale à 0,5 M€ comme ce sera le cas pour les autres redevables de l’impôt sur les sociétés. La mise en œuvre de cette mesure dérogatoire à la trajectoire de baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (art.84L.n°2017-1837 du 30 déc. 2017 de finances pour 2018) répond à un impératif de rendement budgétaire. Elle devrait rapporter environ 1,7 Mds€ en 2019.
->La dispersion des taux effectifs de l’impôt sur les sociétés
Une étude de l’Institut des politiques publiques précise que les grandes entreprises bénéficient de taux effectifs plus faibles que les autres entreprises. Ainsi, en 2015 le taux implicite moyen des grandes entreprises est de 17,8 % contre 23,7 % pour les PME. Cette étude constate néanmoins une certaine convergence du taux implicite de taxation des grandes entreprises par rapport aux autres. Ainsi, le taux implicite moyen des grandes entreprises a augmenté, passant de 10 % à 17,8 %, quand le taux implicite moyen des PME a légèrement baissé, passant de 27,7 % à 23,7 %. La baisse de la déductibilité des charges financières explique cette convergence.
->Changer les règles de territorialité de l’IS pour taxer les multinationales !
Olivier Faure et Pierre Laurent signent avec des chercheurs, dont l’économiste Thomas Piketty, une tribune publiée dans Le Monde, demandant que les multinationales comme Nike ou Total paient leur impôt sur les sociétés là où le chiffre d’affaires est réalisé. Pourquoi ne taxer que les GAFA ? McDonald’s, Nike, Fiat et Total n’utilisent-ils pas eux aussi les paradis fiscaux à grande échelle ? Telle est la question posée par les 24 signataires de la tribune qui interpellent le Gouvernement. « Nous proposons que chaque société domiciliée à l’étranger, vendant des biens ou des services en France pour un montant excédant 100 M€, paie l’impôt sur les sociétés en France, qu’elle possède un établissement stable en France ou non ». Ce principe simple, l’UE devrait l’adopter, en faire son combat acharné en instituant un impôt commun sur les sociétés….
->Une évaluation positive du crédit d’impôt recherche (CIR)
Plébiscité par les entreprises, ce système, qui coûte annuellement 6 Mds€, suscite de vives critiques, surtout depuis la réforme de 2008 qui a conduit à financer la totalité des dépenses de R&D, et non les seules dépenses additionnelles. Ce mode de financement, plus simple, conduit indiscutablement à ce que l’État subventionne automatiquement des dépenses de R&D qui auraient été faites sans CIR. Les gouvernements successifs ont maintenu le mécanisme. Un rapport de l’OFCE suivant le rapport Berger ont conclu à l’échec du CIR en France. France Stratégie, et notamment la Commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation (CNEPI), présidée par Gilles de Margerie, a achevé une première étape d’évaluation du dispositif modifié par la réforme de 2008 : cette étude conclut que les entreprises qui bénéficiaient déjà du CIR avant la réforme de 2008 ont augmenté leurs dépenses de recherche et développement d’un montant égal ou légèrement supérieur à celui de l’aide fiscale reçue. La réforme du CIR aurait donc atteint sa première cible : la croissance des dépenses de R&D de ses bénéficiaires, dans une période pourtant marquée par la crise économique et par la poursuite du mouvement de désindustrialisation de l’économie française.
->Les propositions du groupe UC du Sénat pour « rénover la fiscalité »!
Au Sénat, le 13 mars 2019, le groupe Union centriste a formulé des propositions pour simplifier la fiscalité française, améliorer son efficacité économique, tout en renforçant la justice sociale.
->Les propositions fiscales du président de la commission des finances de l’Assemblée Nationale
Le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale a dévoilé ses propositions dans le cadre du grand débat national. Il souhaite notamment réduire les impôts de production de 1 point de PIB en cinq ans et permettre aux contribuables de flécher 5 % de leur impôt sur le revenu vers la politique publique de leur choix. Sur ce dernier point, encore faudrait-il réussir à concilier démocratie participative et universalité budgétaire…
->Les propositions fiscales du « pacte socialetécologique »?
Le 5 mars dernier, 19 organisations associatives, syndicales et mutualistes ont travaillé ensemble pour formuler 66 propositions concrètes réunies dans un « Pacte du pouvoir de vivre », qui veut concilier la recherche d’une plus grande justice sociale et le respect des engagements nécessaires à la transition écologique. Ce pacte propose une réforme de la fiscalité pour plus de justice, avec plusieurs propositions clefs. Déjà évoquées depuis plusieurs années, ces propositions consistent à introduire une plus grande progressivité de l’impôt sur le revenu et de la fiscalité indirecte (prop. n° 37) ; à taxer les hauts patrimoines (prop. n° 38) ; à mettre fin aux dérogations bénéficiant aux revenus du capital (prop. n° 39) ; à évaluer, modifier et réorienter les dépenses fiscales (prop. n° 40) ; à augmenter les moyens pour lutter contre l’évasion et l’optimisation fiscales et promouvoir une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés au niveau européen (prop. n° 41). Sous l’influence de la Fondation Nicolas Hulot, ce « pacte » propose d’appliquer le principe de pollueur-payeur à tous en mettant fin aux exonérations de la taxe carbone française pour certains secteurs, en particulier le transport aérien et maritime, les entreprises du marché carbone européen et le transport routier de marchandises (prop. n°42) et d’instaurer une fiscalité écologique solidaire et sociale en adoptant une trajectoire de la taxe carbone compatible avec l’Accord de Paris. L’ensemble des recettes de la fiscalité écologique seraient reversées aux ménages et au financement de la transition (prop. n° 51) en supprimant les subventions et mesures fiscales dommageables à l’environnement et à la préservation du patrimoine naturel (prop. n° 52). Un « Big bang » fiscal ? Le ministre de la Transition écologique et solidaire, François de Rugy, a reçu les signataires des « 66 propositions pour un pacte social et écologique », et notamment Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, le 15 mars dernier. Affaire à suivre…
->Les études et propositions du CAE sur la taxe carbone
Une étude intitulée « Une taxe juste, pas juste une taxe » (note CAE, n° 50), rédigée notamment par Dominique Bureau, recommande de redistribuer intégralement les nouvelles recettes de la taxe supportée par les ménages, de mieux partager l’effort de décarbonation avec les entreprises et de mobiliser un mix d’instruments complémentaires afin de concilier efficacité et équité pour soutenir la transition énergétique. Cette note a été présentée aux cabinets du Président de la République, du Premier ministre et du Ministre de l’Économie et des finances le 19 mars 2019. Dans un focus (focus CAE, n°30), les effets de la fiscalité écologique sur le pouvoir d’achat des ménages sont analysés avec une simulation de plusieurs scénarios de redistribution.
->La Cour des comptes recommande de renforcer la lutte contre la délinquance économique et financière
Dans un référé du 12 décembre 2018, publié le 4 mars 2019, la Cour des comptes a examiné les moyens mis en œuvre pour faire face à l’évolution quantitative et qualitative des infractions relevant de la délinquance économique et financière. La Cour estime que l’organisation et les moyens consacrés par les ministères de l’Intérieur et de la Justice à cette politique publique font apparaître des faiblesses qui nuisent à l’efficacité des poursuites. La Cour des comptes formule cinq recommandations afin de mieux utiliser les moyens existants et d’adopter, dans le choix des affaires et leur traitement, une approche plus sélective et plus préoccupée de l’efficacité et du délai de la réponse pénale. Elle recommande de créer des filières de recrutement d’officiers et de commissaires adaptées aux missions d’investigation spécialisée, notamment en matière économique et financière (recommandation n° 1) ; de mettre en place un suivi régulier des effectifs des unités d’enquête économique et financière dans les services de sécurité publique et mettre au point des formations spécifiques à leur intention (recommandation n° 2) ; d’assurer un suivi des magistrats spécialisés en matière économique et financière, portant sur l’évolution de leurs effectifs, les processus d’affectation et de mobilité et l’offre de formation continue (recommandation n° 3) ; de poursuivre, dans les deux ministères, le développement du recours à des compétences externes en matière économique et financière, notamment en diversifiant les voies de recrutement (recommandation n° 3) ; de créer une instance régulière de concertation sur les moyens consacrés à la lutte contre la délinquance économique et financière en Ile-de-France (recommandation n° 5).
->Deux députés recommandent de renforcer la lutte contre la délinquance économique et financière
Dans un rapport parlementaire, enregistré le 28 mars 2019, dans le cadre des travaux du Comité d’évaluation et de contrôle (CEC) de l’Assemblée nationale, deux députés, Ugo Bernalicis (LFI) et Jacques Maire (LREM), appellent à renforcer les sanctions face à la délinquance économique et financière qui affecte profondément les ressources budgétaires de la France. Parmi les 25 solutions qu’ils proposent, figure la mise à l’étude du « paiement scindé » pour lutter contre la fraude à la TVA dans le commerce en ligne, qui permettrait de générer, selon eux, environ 20 Mds€ de recettes fiscales dans les caisses de l’État : le paiement de la TVA serait assuré par la banque du client, cette dernière étant utilisée par plus de 80 % des internautes procédant à des achats en ligne, 38 % déclarant utiliser un autre moyen sécurisé comme PayPal. La commission des finances du Sénat avait déjà publié, le 17 septembre 2015, un rapport parlementaire sur l’ e-commerce avec des « propositions pour une TVA payée à la source ».
->La nouvelle relation de confiance entre les entreprises et la DGFiP
L’administration fiscale a un rôle essentiel à jouer pour faciliter la vie économique et contribuer à la compétitivité de l’économie. Dans le prolongement de la loi ESSOC, le ministre de l’Action et des Comptes publics, a dévoilé, le 14 mars 2019, la nouvelle démarche de la direction générale des finances publiques (DGFiP) en matière de conformité coopérative et de sécurité juridique pour les entreprises : « Pour une nouvelle relation de confiance entre les entreprises et l’administration fiscale » (dossier de presse).
->Les modalités de détermination du plafonnement de l’ISF conformes à la Constitution
Le Conseil Constitutionnel vient par une décision n° 2019-769 QPC du 22 mars 2019 de considérer que l’article 885 V bis-II du CGI est conforme à la Constitution. Le plafonnement permet ainsi de limiter la somme de cet impôt et des impôts sur les revenus de l’année précédente à 75 % de ces revenus. Si ce pourcentage est dépassé, l’excédent constaté vient en diminution de l’ISF dû ; cet excédent n’est ni imputable sur d’autres impositions ni restituable.
->Vers une suppression de la déclaration annuelle obligatoire au titre de l’IR?
La réforme du PAS, entrée en vigueur le 1er janvier 2019, ne dispense pas de remplir chaque année une déclaration de revenus au titre de l’IR. « L’année prochaine, j’annoncerai sûrement qu’on mettra fin à la déclaration de l’impôt sur le revenu afin de simplifier la vie des citoyens et de faire des économies », a lancé Gérald Darmanin, le 19 mars 2019, devant des étudiants. Par ailleurs, au sujet du PAS, la DGFiP a apporté des précisions sur les conditions dans lesquelles sont susceptibles d’être régularisés par les collecteurs, d’une part, les erreurs commises dans l’assiette ou le taux de PAS ayant abouti à une insuffisance ou un excédent de retenue à la source et, d’autre part, les trop versés de revenus ayant une incidence sur le PAS.
->La Cour des comptes examine les dépenses fiscales en faveur du logement
Les 66 principales dépenses fiscales en faveur du logement (crédits et réductions d’impôts, exonérations et abattements, taux réduits, etc…) représentaient 18 Mds€ en 2018, soit près de 20 % de l’ensemble des dépenses fiscales. Le coût de cet abandon de recettes est sous- estimé dans les lois de finances. L’absence de pilotage de ces dépenses en cours d’exécution budgétaire ne permet pas d’en modifier les modalités de mise en œuvre, ces mesures s’apparentant pour l’essentiel à des dépenses de guichet. La mesure de leurs effets économiques et sociaux est par ailleurs insuffisante, bien qu’essentielle, tout comme le contrôle de leurs contreparties sociales (loyer modéré, etc.). Ces dépenses demeurent donc globalement encore trop peu maîtrisées pour être des instruments efficients de la politique du logement. En réponse à une demande d’enquête de la commission des finances de l’Assemblée nationale, la Cour des comptes recommande avec insistance, dans ce rapport, de limiter la durée d’existence de ces dispositifs et de ne conserver que les dépenses fiscales qui, après avoir été évaluées avec rigueur, ont fait la preuve de leur efficience.
->Référé de la Cour des comptes sur les taxes à faible rendement
Dans un référé publié le 27 février 2019, la Cour des comptes appelle le Gouvernement à prolonger et structurer sa démarche en faveur de la suppression et de la simplification de taxes à faible rendement. Adressée au Premier ministre le 3 décembre 2018 – soit avant l’adoption de la loi de finances pour 2019, cette enquête de la Cour ne porte que sur des impôts et taxes ayant un rendement annuel inférieur à 150 M€.
->Taxe trottinette ou redevance pour occupation du domaine public?
Le Conseil de Paris a adopté au mois de mars plusieurs mesures destinées à réguler les trottinettes électriques en libre-service. Cette décision concerne avant tout les opérateurs de trottinettes électriques (Lime, Bird, Voi, etc.). La redevance pour occupation de l’espace public est graduée suivant le nombre d’engins exploités. Les entreprises qui ont moins de 500 trottinettes versent une redevance forfaitaire de 50 € par engin chaque année. La redevance forfaitaire est plafonnée à 65 € annuels par trottinette pour les entreprises qui opèrent plus de trottinettes. Une redevance allant de 20 € à 26 € pour les vélos et de 60 € à 78 € pour les scooters est aussi prévue par la délibération parisienne. Une amende de 135 € a également été instaurée pour toute personne circulant en trottinette électrique sur les trottoirs. Le stationnement sauvage des trottinettes gênant la circulation des piétons sera donc verbalisé à hauteur de 35 €. Avec les fonds récoltés par ces mesures (quelques centaines de milliers d’€), la Mairie de Paris entend créer 2500 places de parking pour ces engins. Cette redevance devrait être exigible d’ici la fin du mois d’avril 2019. Bientôt une taxe trottinette ? Continuons à suivre l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités, adopté récemment au Sénat, et qui devrait définitivement être adopté en juillet prochain…
->La redevance de l’audiovisuel public à nouveau sur la sellette
Le 29 mars 2019, Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics a suggéré la suppression de la redevance de l’audiovisuel public. Cette taxe devrait rapporter 3,2Md€ net en 2019. Elle s’élève à 139 € pour un foyer détenteur d’un téléviseur. Elle est entièrement affectée au financement de l’audiovisuel public dont elle constitue la ressource principale ; ce qui explique les réactions négatives du ministre en charge de ce secteur. À l’appui de cette réforme ,régulièrement proposée et régulièrement repoussée, on invoque le fait que la taxe pèse proportionnellement plus sur les foyers à revenus moyens (seuls les revenus très modestes en sont exonérés),que d’autres modes de consommation de la télévision ne sont pas taxés et que le recouvrement est attaché à celui de la taxe d’habitation en voie de disparition. À l’inverse, on peut imaginer sa généralisation à tous les supports ou à tous les foyers. La suppression de la redevance et un financement budgétaire de l’audiovisuel public sous contrôle seraient la solution la plus simple.
MANAGEMENT PUBLIC
->Succès du grand débat national
Les français ont été nombreux à s’exprimer par les différentes voies ouvertes par le grand débat national (v. Repères de février 2019) :16.000 cahiers citoyens ouverts dans les mairies, 10.134 réunions d’initiative locale, 2 millions de contributions déposées sur la plateforme en ligne par 506.333 correspondants, quatre réunions thématiques avec les corps intermédiaires, 21 conférences citoyennes régionales réunissant 1424 participants tirés au sort. Le Conseil économique, social et environnemental a produit, avec le concours d’un groupe de 28 citoyens et d’une plateforme en ligne, un rapport intitulé « Fractures et transition : réconcilier la France ».
->Les associations d’élus pour un acte III de la décentralisation
L’association Territoires unis, constituée le 26 septembre 2018 à Marseille et qui regroupe les associations généralistes des élus des régions, des départements et des communes, a présenté le 13 mars 2019 une contribution au grand débat national. Elle appelle à un « acte III de la décentralisation » qui devrait se traduire par une clarification de compétences (recentrage de l’Etat sur ses missions régaliennes, élimination des doublons, « la décentralisation rend la déconcentration inutile »…). Elle soutient le principe de différenciation et demande un pouvoir règlementaire d’application de lois « se substituant à celui du Premier ministre ». Les élus manifestent leurs réserves à l’égard de l’intercommunalité « simple outil des communes » et souhaitent une révision de la loi Notre d’août 2015. La décentralisation devrait reposer essentiellement sur les régions, les départements et les communes, collectivités dotées d’une véritable autonomie financière et fiscale. Une conférence nationale des territoires serait le lieu de « co-construction des politiques publiques ». (voir aussi suprafinances locales)
->Ouverture versus commercialisation des données publiques
Dans un référé publié le 11 mars 2019, la Cour des comptes met en évidence l’injonction paradoxale relative à l’ouverture des données de trois opérateurs relevant du ministère de la transition écologique : l’IGN, Météo-France et le Cerema : Ces établissements sont incités à accroître leurs ressources propres en cédant leurs données mais celles-ci doivent être accessibles gratuitement en application de la loi n° 2016-1321 du 16 octobre 2016 pour une République numérique. La Cour recommande une clarification de la définition du modèle économique des opérateurs et de la doctrine d’ouverture des données et des codes sources des logiciels.
->Le rapport du Défenseur des droits
Dans la préface de son rapport, Jacques Toubon, le Défenseur des droits depuis cinq ans rappelle le double rôle de l’institution : L’alerte : « sismographe de la demande sociale, révélateur des craquements, des fractures d’un peuple écartelé entre la planète et le village » ; la protection : « alarme, porte-voix, témoin soucieux du déclin des droits fondamentaux et de leur inégale effectivité ».L’institution, qui compte 226 agents au siège et 501 délégués, a traité 91.316 dossiers, pris 295 décisions, formulé 400 recommandations et rendu 29 avis au Parlement.
->Les “nouvelles ”propositions de l’Institut Montaigne sur la réforme de l’État
Une note de l’Institut Montaigne, rédigée sous la responsabilité du Conseiller d’État Jean- Ludovic Silicani, ancien Commissaire à la réforme de l’Etat, intitulée « Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple » formule des propositions pour réduire d’un point de PIB les dépenses de fonctionnement des administrations publiques, qui représentent aujourd’hui environ 18 % du PIB, soit un tiers des dépenses publiques, sans modifier le périmètre des services publics. L’étude préconise une stricte spécialisation de chaque acteur public, une législation qui fixerait les objectifs à atteindre plutôt qu’une prescription détaillée des moyens, une modernisation du statut de la fonction publique (avec une réduction du nombre de fonctionnaires de 100 à 200.000),une généralisation de la numérisation des procédures et de l’utilisation de l’intelligence artificielle, la mise en place d’un réseau d’un millier de maisons de services au public.
->L’accès aux services publics dans les territoires ruraux
Un rapport de la Cour des comptes, réalisé avec le concours de six chambres régionales à la demande du comité d’évaluation des politiques publiques de l’Assemblée nationale, se penche sur la question de l’accessibilité des services publics en milieu rural .Il convient de distinguer trois catégories de services: les « indispensables »,gendarmerie, écoles, poste ; les services dématérialisés ou dématérialisables : délivrance de titres, pôle emploi, services de la DGFiP ; enfin, une demande mal mesurée :l’accès aux soins et la prise en charge de la dépendance. Plusieurs constats sont solidement étayés : l’accès physique aux services ne garantit pas leur qualité, la présence physique de services publics indispensables est restée dense, la poursuite de la rationalisation des réseaux est nécessaire pour renforcer l’efficience de la gestion, le sentiment d’abandon provient de la nécessité d’utiliser la voiture… Les recommandations pourraient être facilement mises en œuvre : une plus forte planification coordonnée de l’évolution des réseaux aux niveaux national et local, une mutualisation accrue, une meilleure articulation des divers dispositifs, le déploiement d’un réseau numérique performant, l’accompagnement des personnes fragiles et des zones sous- équipées, un appui sur les intercommunalités et les mairies, un renforcement des maisons de services au public par une professionnalisation et un financement pluriannuel contractualisé et la participation de davantage de services.…
->Stabilité de l’emploi public en 2017
D’après une ne étude de l’INSEE publiée le 13 mars 2019, le nombre de salariés de la fonction publique (5,7 millions) s’est réduit de 0,1 % en 2017. La réduction du nombre de fonctionnaires et la baisse des contrats aidés a été compensée par une augmentation du nombre de contractuels. La part des cadres A augmente : 53,7% dans la fonction publique de l’Etat contre 23,1 % de B et 21,9 % de C.
->Controverses sur le temps de travail dans la fonction publique
Alors que le projet de loi de transformation de la fonction publique prévoit la suppression en 2022 des accords dérogatoires au temps de travail dans les collectivités locales, la publication statistique annuelle de la DARES du ministère du travail, le 20 mars 2019, fait apparaître une durée annuelle du travail dans le secteur public (hors enseignants) de 1637 heures en 2018, inférieure au secteur privé (1708 heures) mais supérieure à la durée légale de 1607 heures. Elle est ramenée à 1577 heures avec les enseignants. Un rapport de l’Inspection générale des finances, dont des extraits ont été publiés par Le Figaro du 26 mars 2018 et qui s’intéresse spécifiquement aux règles dérogatoires aux 35 heures dans la fonction publique de l’État, précise que 310.000 fonctionnaires bénéficient de dérogations dont 190.000, équivalentes à 30.000 emplois à temps plein, sont « incohérentes ou dépourvues de justifications » : fonctionnaires administratifs et techniques de l’enseignement, fonctionnaires chargés de délivrer les titres dans les préfectures et sous- préfectures, bénéficiaires de jours de fractionnement ou de « jours ministres ».
->La réforme de la fonction publique
Le projet de loi de transformation de la fonction publique a été adopté au conseil des ministres du 27 mars 2019. Il comprend les différents points ayant fait l’objet d’une consultation, et d’un avis négatif, des partenaires sociaux (v. Repères de février 2019) mis en avant dans un dossier de presse : simplification du dialogue social par création d’un comité social et recentrage de la mission des commissions administratives paritaires, élargissement du recours au contrat y compris pour les emplois de direction et création d’un contrat de projet pour des missions ponctuelles spécifiques de un à six ans; facilitations des mobilités et accompagnement des transformations (ruptures conventionnelles, plans de départs volontaires, priorité d’affectation, portabilité de certains droits,… ) ; dispositions diverses sur le temps de travail dans la fonction publique territoriale, la protection sociale, l’égalité professionnelle. Un élément nouveau concerne la haute fonction publique dont les règles de recrutement, de formation initiale et continue et de déroulement de carrières pourront être réformées par ordonnance.
->Numérique et territoires
Une note de l’Institut Montaigne, signée de Gilles Babinet et intitulée : « Enjeux numériques des territoires : le citoyen-utilisateur au centre des réflexions » dégage des orientations pour une stratégie de numérisation des services publics qui ne soit pas la simple virtualisation des parcours physiques existants mais repose sur une conception innovante de l’offre de services. Il propose de créer des espaces d’innovations autonomes et externes (au contraire des startups d’État qui restent dans le giron de l’administration),de systématiser les comparaisons européennes (benchmark), de libérer les données d’intérêt général, y compris celles qui sont détenues par les plateformes privées, d’utiliser le service civique pour lutter contre l’illectronisme (estimé à 23 % de la population) ,de privilégier des approches centrées sur les besoins effectifs des usagers (designde service) quitte à repenser la norme administrative ou à bousculer les usages.
->Propositions pour une externalisation des services publics
Un rapport, commandité par une société de services (Webhelp), réalisé par un réservoir d’idées prive (Altermind) mais remis officiellement au ministre de l’action et des comptes publics dans le cadre du grand débat national préconise une stratégie volontariste d’externalisation dans les services publics. Le gisement d’économies sur le coût des services publics, surévalués à 400 Md€, est estimé à 25 Md€ dans des domaines tels que la restauration collective, la gestion des bâtiments et la relation usagers. Les auteurs auraient tout aussi bien pu démontrer que l’adoption par les services de méthodes de gestion souples, numérisées et attentives aux usagers pourraient être les bases d’une réforme de la gestion publique.
->Hausse des salaires dans la fonction publique en 2017
L’INSEE a publié les premiers résultats de son étude sur les salaires de la fonction publique en 2017. Le salaire net moyen en équivalent temps plein est de 2.280 €, soit + 1,9 % en euros courants et + 0,9 % en euros constants, en raison notamment de la revalorisation du point d’indice et de l’application du protocole PPCR. La rémunération moyenne du personnel en place (deux ans de suite sur le même emploi) augmente de 1,9 %.
EUROPE
->Succès de l’emprunt grec à 10 ans
Le 5 mars 2019, la Grèce a lancé avec succès son premier emprunt à 10 ans depuis une décennie. Elle lève 2,5 milliards d’euros. Avec une demande quatre fois supérieure à l’offre, l’agence grecque de la dette a pu finalement fixer le taux d’intérêt à 3,90 %, inférieur au taux initialement prévu.
->Revenu citoyen et projet de flattax en Italie
À l’approche des élections européennes, les deux partenaires du gouvernement italien de coalition rivalisent de propositions financières pour attirer les classes moyennes. Le 6 mars a été lancée la procédure pour demander le revenu citoyen promis par le Mouvement 5 étoiles, qui pourrait concerner trois millions de personnes. Le 19 mars, le chef de la Ligue a proposé l’instauration d’une flattax à 15 % d’impôt sur le revenu pour les foyers fiscaux dont les revenus annuels sont inférieurs à 50.000 euros, afin de les rapprocher des petits entrepreneurs bénéficiant déjà d’une mesure similaire. Le chiffrage du coût budgétaire d’une telle mesure reste discuté entre 15 et 60 milliards d’euros.
->La BCE maintient ses taux d’intérêt et bilan du QE
Lors d’un discours prononcé à Francfort le 7 mars 2019, le président Draghi a annoncé que la Banque centrale européenne (BCE) maintiendrait ses taux d’intérêts directeurs jusqu’à la fin de 2019, en tablant sur une convergence des taux d’inflation autour de 2%. La BCE a, par ailleurs, publié une étude évaluant positivement les effets de la politique de « Quantitative Easing(QE)». Comme l’a souligné la presse, ces effets sont néanmoins variables selon les pays : très positifs pour l’Espagne et la France, ils restent limités pour l’Italie, notamment en raison des tensions de l’an dernier autour du budget de la coalition. Quant à l’Allemagne, elle a le moins profité de cette politique car ses taux d’intérêts étaient déjà bas en 2014.
->Réunion Ecofin et Eurogroupe : rejet de la taxe GAFA
Le 12 mars 2019, les ministres des finances des États membres se sont réunis pour plusieurs réunions dont les ordres du jour étaient chargés. D’entrée, en Conseil Ecofin, le projet franco-allemand de taxe GAFA, pourtant décrié comme insuffisant par l’opposition française, mais aussi, pour des raisons opposées, par l’administration Trump, a été rejeté par opposition notamment de l’Irlande, la Suède, le Danemark et la Finlande. Faute de l’indispensable unanimité, la mesure est formellement suspendue. Par contre un accord a été passé pour simplifier les règles en matière de TVA applicables aux ventes en ligne. Lors de la réunion de l’Eurogroupe, le commissaire Moscovici a formellement présenté le rapport de « surveillance renforcée », adopté par la Commission au mois de février, et très favorable à la gestion budgétaire rigoureuse de la Grèce.
->Débats autour de la liste noire
Le 12 mars 2019, lors de ce même Conseil Ecofin, la liste des paradis fiscaux visés par l’Union européenne a été modifiée. Si la liste grise a été réduite, les territoires visés par la liste noire ont été triplés, passant de 5 à 15. Cette dernière liste comprend désormais Aruba, la Barbade, le Belize, les Bermudes, la Dominique, les Émirats arabes unis, les Fidji, les Îles Marshall, Oman et le Vanuatu. Ce recensement vise à « améliorer la bonne gouvernance en matière fiscale à l’échelle mondiale ». Son utilité, faute de sanctions conséquentes, reste critiquée.
->Décharge votée pourle budget européende 2017
Le 26 mars 2019 à Strasbourg, le Parlement européen a voté la « décharge » définitive pour la gestion par la Commission du budget 2017 de l’Union, confirmant ainsi sa bonne gestion.
INTERNATIONAL
->La FED maintient ses taux
Le 20 mars 2019, la Réserve fédérale américaine a annoncé un ralentissement important de sa politique de maitrise de l’inflation amorcée à la fin de l’année 2015. En effet, elle ne relèverait pas les taux cette année et elle arrêterait de réduire son bilan en septembre. Elle ne prévoit donc plus désormais qu’une seule hausse de taux d’ici 2021 et n’évoque plus la nécessité de resserrer sa politique monétaire pour prévenir une accélération de l’inflation. ■
Aurélien BAUDU (Fiscalité et procédure fiscale),
Fabrice BIN (Europe, international),
Jean-François CALMETTE (budget de l’État et des opérateurs),
Matthieu HOUSER (finances locales),
Michel LE CLAINCHE (comptabilité publique, management public, coordination),
Yves TERRASSE (finances sociales),
Robin DEGRON (coordination).