reperes2023

REPÈRES (NOVEMBRE 2023) – REVUE-GFP N°1 – 2024

->Données générales sur les finances publiques
BUDGET DE L’ÉTAT ET DES OPéRATEURS

Novembre 2023 : les prix à la consommation augmentent de 3,4 % sur un an

Dans une note publiée le 30 novembre 2023 l’INSEE indique que sur un an les prix à la consommation augmentent de 3,4 % en novembre 2023, après +4,0 % en octobre. Cette baisse de l’inflation serait due au ralentissement sur un an des prix des services, de l’énergie et, dans une moindre mesure, des produits manufacturés et de l’alimentation.

Sur un mois, les prix à la consommation se replient légèrement en novembre 2023 (-0,2 % après +0,1 % en octobre). Les prix des services diminuent également, notamment ceux des transports, et ceux de l’énergie. Les prix des produits manufacturés sont stables par rapport au mois précédent. Ceux de l’alimentation augmentent sur un mois, du fait essentiellement de la hausse des prix des produits frais.

->Procédure budgétaire

La loi de finances de fin de gestion pour 2023 (LFFG) du 30 novembre 2023

La LFFG (L. n°2023-1114 du 30 nov. 2023) est une nouvelle catégorie de loi de finances, introduite par la réforme de la LOLF par la loi organique du 28 décembre 2021. La LFFG pour 2023 est la première loi adoptée par le Parlement selon ce nouveau format. Après sa promulgation par le Chef de l’État, elle a été publiée au JORF le 1er décembre 2023. Le déficit public pour 2023, inscrit dans la LFFG, reste prévu à 4,9 % du PIB, comme au moment du dépôt du PLF pour 2024 ainsi que dans le programme de stabilité de 2023. Les hypothèses macroéconomiques sont aussi inchangées : croissance de 1% pour 2023.

Quant au déficit budgétaire de l’État prévu pour 2023, finalement arrêté dans la loi de finances de fin de gestion pour 2023, il s’élève à 171,2 Md€. L’écart de près de 7 Md€ par rapport à la loi de finances initiale du 30 décembre 2022 pour 2023 s’explique notamment par l’ouverture de crédits pour financer la hausse de la charge de la dette (+3,8 Md€, soit +7 %) et par la baisse des recettes non fiscales.

En outre, la LFFG prévoit d’ouvrir des crédits pour financer : l’augmentation des dépenses de défense, induites par des surcoûts au titre d’opérations extérieures et par le soutien à l’Ukraine ; plusieurs mesures de soutien sectorielles liées aux crises agricoles ; le rehaussement des montants des prestations sociales versées aux familles monoparentales ; les aides exceptionnelles à destination de Mayotte pour résoudre en urgence la crise de l’eau potable.

Pour le financement de ces mesures qui s’élèvent globalement à 9 Md€, la loi annule 5,3 Md€ de crédits non utilisés (annulations qui portent, par exemple, sur les guichets d’aide aux entreprises face à la hausse de l’inflation ou sur le dispositif « MaPrimeRénov »). La répartition de ces crédits est précisée par décret (Décr. n° 2023-1116 du 30 nov. 2023 portant répartition des crédits ouverts et annulés par la LFFG pour 2023).

->Politique budgétaire

La revue des dépenses publiques est toujours en marche

À l’initiative du Gouvernement, la loi de finances initiale pour 2023 prévoit la mise en place d’un dispositif permanent et récurrent d’évaluation de la qualité de l’action publique. Après le premier rapport remis au Parlement en juillet 2023, le 16 novembre 2023 la Première ministre a réuni à Matignon les ministres concernés par ce nouveau dispositif d’évaluation de la qualité de l’action publique qui doit contribuer à atteindre les objectifs de l’exécutif, à savoir trouver 12 Md€ d’économies d’ici 2024 (v. infra dans la rubrique « Management public »).

En marge de cette réunion, il a été annoncé que le Gouvernement entend notamment analyser en profondeur les aides accordées aux entreprises. L’objectif est d’évaluer ces aides afin de définir celles qui méritent d’être conservées et celles qui pourraient être supprimées. En 2022, les aides aux entreprises ont représenté un coût total de 110 Md€ pour l’État, que ce soit sous forme d’allègement de cotisations, de fiscalité réduite ou d’aides directes, selon la Direction du budget. Le Gouvernement affirme que la « cartographie » de ces aides va permettre de savoir si toutes ces aides sont efficaces et donc être en mesure d’envisager en conséquence la suppression ou la réforme de certaines dépenses à destination des entreprises. Le Gouvernement va également lancer une revue sur les quelque 80 000 « dispositifs médicaux ».

Une nouvelle note de FIPECO sur le financement public de la SNCF

Une nouvelle note de FIPECO (publiée en novembre 2023) fait l’addition des sommes consacrées au fonctionnement, à l’investissement et à la protection sociale de la SNCF (sans oublier 800 M€ de charge de la dette reprise par l’État) qui aboutit à 20 Md€ au total. Pour François Ecalle, magistrat honoraire de la Cour des comptes, ce chiffre représente « un signal d’alarme ». La question de l’efficience de la dépense publique doit être posée selon lui. Cette présentation est contestée par la SNCF. Selon la direction de celle-ci, en rapprochant les coûts financiers publics pour le fonctionnement, les investissements et le système de protection sociale, FIPECO ne fait « qu’additionner des choux et des carottes » (v. Les Échos, 29 nov. 2023) Les subventions d’investissements – qui ont doublé en six ans – représentent le poste de dépenses le plus dynamique. Selon la compagnie ferroviaire, la réforme de 2018 exigeait que la SNCF dégage un cash-flow libre positif dès 2022, ce qui a été fait au premier semestre 2023 selon la direction de la SNCF.

->Patrimoine de l’État

Vers une réduction des surfaces de bureaux des services de l’État

Le ministre des comptes publics, Thomas Cazenave, a annoncé sur la matinale de Sud Radio, le 22 novembre 2023, son ambition de réduire les dépenses publiques liées à l’immobilier de l’État. Il souhaite notamment créer une foncière immobilière pour les bureaux, qui seront loués aux ministères afin de les inciter à faire des économies. Le Gouvernement redonne ainsi vie à une réforme déjà tentée en 2006, qui n’avait pas totalement rempli ses objectifs. Assurant que l’État dépense 2 Md€ en loyer chaque année, le ministre des comptes publics a donc indiqué qu’il souhaitait réduire les surfaces de bureaux de l’État de 25 % : « On va changer complètement le modèle : on aura une foncière publique qui sera propriétaire et les ministères vont louer leurs locaux », a-t-il précisé. Selon le ministre des comptes publics : « C’est plus incitatif : s’ils veulent récupérer de l’argent, ils vont réduire leur surface ».

->Budget des opérateurs

Le domaine national de Chambord

L’originalité de Chambord tient à son statut d’EPIC, qui constitue une exception pour les châteaux-musées. Du fait de ce statut, dans son rapport « portant sur une entreprise publique » publié le 10 novembre 2023, la Cour des comptes a examiné les activités de diversification économiques et leur rentabilité. Elle a également examiné les implications du régime de la domanialité, qui s’étend à l’ensemble du domaine, y compris au village de Chambord.

La Cour des comptes met en évidence la faiblesse de la gouvernance tant institutionnelle qu’opérationnelle du domaine et l’urgence à renforcer le rôle du conseil d’administration, ainsi qu’à se doter d’une organisation adaptée à la diversité des enjeux du domaine, et à se doter de l’ensemble des documents stratégiques prévus par les textes en vigueur.

La Cour des comptes a examiné pour la première fois, s’agissant d’un établissement culturel, le respect de la régularité des opérations de mécénat au regard de la charte adoptée par le conseil d’administration et du régime fiscal du mécénat en nature et du mécénat de compétence. Au regard des observations effectuées pour le Domaine national de Chambord, la Cour des comptes appelle à préciser le contenu des textes en vigueur qui peuvent donner lieu à des interprétations différentes et au renforcement du contrôle interne dans le domaine du mécénat par les établissements culturels. In fine, la Cour des comptes formule huit recommandations et trois rappels du droit.

Le fonds « Definvest »

Créé le 17 novembre 2017, le fonds « Definvest » est propriété de l’État et doté de 100 M€ gérés en compte de tiers par Bpifrance Investissement.

Depuis sa création, le fonds « Definvest » a investi près de 36 M€ dans une vingtaine de PME couvrant un vaste secteur d’activités stratégiques pour la défense. Ce fonds constitue un complément aux outils existants, mais dans son rapport d’observations définitives publié le 3 novembre 2023, la Cour des comptes relève qu’il n’a pas encore atteint la maturité nécessaire pour permettre d’être assuré qu’il réponde pleinement aux objectifs fixés.

La Cour des comptes constate que la rentabilité de ses investissements demeure encore fragile. Sa dotation financière ne saurait suffire en soi à combler tous les besoins des PME stratégiques de défense, ce qui plaide pour une meilleure articulation des outils de soutien à la disposition du ministère des Armées. Finalement, la Cour formule trois recommandations.

COMPTABILITÉ PUBLIQUE
->Responsabilité des gestionnaires publics

Arrêt n° 2023-1382 « Caisse de crédit municipal de Bordeaux (CCMB) »

Le 24 novembre 2023, la Cour des comptes a publié son cinquième arrêt rendu sous l’empire du régime de responsabilité financière des gestionnaires publics entrée en vigueur le 1er janvier 2023.

Le Procureur général avait renvoyé devant la chambre du contentieux de la Cour des comptes le directeur général de la Caisse de crédit municipal de Bordeaux (CCMB) ainsi que le directeur général adjoint de celle-ci, en poste au moment des faits.

En premier lieu, il leur était reproché d’avoir octroyé des prêts en enfreignant les règles relatives à l’exécution des dépenses de l’établissement et manqué à leur devoir général d’organisation, de contrôle et de surveillance. Selon la décision de renvoi, les agissements irréguliers devaient être regardés comme formant un ensemble constitutif d’une faute grave de gestion au sens de l’article L. 131-9 du code des juridictions financières. Par ailleurs, chacun des prêts en cause était affecté d’irrégularités, de négligences et de manquements au devoir d’organisation, de contrôle et de surveillance qui, selon cette même décision de renvoi, caractérisaient autant de fautes graves de gestion au sens du même article.

La Cour des comptes a relevé le caractère incomplet des dossiers et l’insuffisance des sûretés, en particulier pour quatre d’entre eux. Ces carences constituant des manquements aux règles applicables en matière prudentielle aux établissements de crédit, la chambre du contentieux a retenu l’existence d’une faute grave affectant la gestion de l’activité de prêt ainsi que les règles d’exécution des dépenses de la Caisse. Au regard des provisions passées, des défauts de paiement intervenus, de l’insuffisance des garanties constituées pour les quatre prêts et de la situation financière des débiteurs, la Cour des comptes a évalué le préjudice minimal pour la CCMB à 3,9 M€. Ce préjudice, qui selon les années représentait de 36 à 50 % du produit net bancaire, a été jugé significatif au sens de l’article L. 131-9 du code des juridictions financières.

La Cour des comptes a jugé que la responsabilité des fautes graves ayant causé un tel préjudice financier incombait conjointement aux deux personnes renvoyées. Au regard de la gravité des fautes commises dans le cadre de l’attribution des prêts et du préjudice financier en résultant pour la CCMB, la Cour des comptes a prononcé une amende de 20 000 € à l’encontre du directeur général et de 10 000 € à l’encontre du directeur général adjoint. Elle a également décidé de la publication de l’arrêt au JORF.

FINANCES LOCALES
->Données générales sur les finances locales

Cap sur les finances des communes et intercommunalités en 2022

Cette analyse de l’OFGL apporte une vision nuancée sur la bonne santé financière des collectivités en 2022. En termes de dépenses, le couple « communes-EPCI » occupe le devant de la scène avec des dépenses (hors remboursements de la dette) proche de 159 Md€.

La situation s’avère toutefois très disparate. En 2022, l’épargne brute du bloc communal s’élève à 25,3 Md€. De même, l’observation du taux d’épargne brute (part des recettes de fonctionnement dédiée à l’épargne) s’avère instructive : il est d’environ 18 % au niveau du bloc communal soit au même niveau qu’en 2021 et 2019.

Cependant, il diminue de 0,6 point au niveau des communes passant de 16,2 % à 15,6 % tandis qu’il augmente de 0,6 point au niveau des intercommunalités passant de 20,7 % à 21,3 %.

Concernant les communes, le taux d’épargne brute est inversement corrélé à la taille de la commune : plus la population est importante, plus ce taux diminue. Les communes de moins de 100 habitants ont des taux d’épargne brute de 31 % en moyenne, tandis que les villes de plus de 100 000 habitants (hors Paris) ont un taux d’épargne brute moyen de 14 %. La valeur médiane pour l’ensemble des communes est de 22 %.

Les finances des départements

Dans ce nouveau Bis de la DGCL, les fonctionnaires reviennent sur la situation financière en amélioration en 2022 avec une sorte de décalage par rapport à la situation actuelle. En effet, le fort ralentissement du marché immobilier entraîne une chute spectaculaire des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

Selon les termes de la note, les résultats financiers « affichent de nouveau en 2022 des résultats globalement favorables ». Cette situation s’explique par une hausse continue des recettes de fonctionnement en 2022. Cette situation permet le maintien de dépenses d’équipement à un niveau élevé (+8,2 % en 2022, après +13,5 % en 2021). Dans le même temps, les délais de désendettement se réduisent.

->Dépense publique locale

Collectivités locales : comment financer l’accélération des investissements climat ?

Cette étude de la Banque postale et de l’Institut de l’économie pour le climat aborde, pour la première fois, la question du financement des investissements nécessaires pour la transition écologique. Cette étude constate une augmentation des dépenses d’équipement dès 2022, avec un pic en 2030 d’un montant de 80 Md€.

À titre de comparaison le montant de la dépense s’élève aujourd’hui à 55 Md€.

Le mode de financement d’une telle hausse des dépenses d’investissement n’est aujourd’hui pas acté. Certes, la rénovation énergétique des bâtiments publics aboutira à une réduction de 1,2 Md€ constants en 2030 par rapport au niveau de 2019 mais cela n’est pas suffisant pour équilibrer les dépenses et les recettes.

Dans tous les cas, l’endettement public local augmentera fortement avec suivant les scenarii une augmentation comprise entre 25 et 100 Md€.

Avec quatre scenarios à l’horizon 2030, cette étude met sur la table d’autres points à débattre comme l’évolution des dépenses d’investissement ou encore l’évolution de la fiscalité et de la DGF.

Cap sur les investissements scolaires des collectivités locales

Dans cette nouvelle analyse (n° 21, oct. 2023) l’OFGL aborde la question de l’éducation. Ce thème a été choisi à juste titre compte tenu de son importance. Ainsi, les collectivités assument près de 23 % de la dépense intérieure d’éducation sur un montant global de 180,1 Md€ en 2022.

En termes de montant, le secteur local assure 22,7 % de cette dépense, soit 40,9 Md€. Cependant les dépenses de l’État concernent principalement les rémunérations des enseignants. Dans le détail, les collectivités prennent en charge le financement du fonctionnement courant, de l’investissement, d’une partie du transport scolaire ainsi que de l’hébergement et la restauration scolaire.

Cette étude a le mérite de revenir sur le coût par niveau par élève. Ainsi, plus le degré d’éducation augmente, plus le coût par élève augmente : 646 € par écolier, 916 € par collégien et 1 317 € par lycée. L’État participe, malgré tout, aux dépenses d’investissement des collectivités avec différents dispositifs comme la dotation départementale d’équipement des collèges (DDEC) ou encore la DRES (dotation régionale d’équipement scolaire). Les nouvelles subventions (DSIL et DETR) accompagnent également le financement des dépenses d’enseignement.

FINANCES SOCIALES
->Dette sociale

PLFSS 2024 : la commission des finances du Sénat s’inquiète de la dette sociale.

Le rapport de la Commission des finances du Sénat saisie pour avis du PLFSS 2024 s’alarme des conséquences de la persistance de déficits importants pour les régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale (v. Repères de sept. 2023), au niveau de 17 Md€ entre 2026 et 2027, sur le montant de la dette sociale qui pourrait s’accroître de 60 Md€ en 2027, alors même que les conditions de refinancement de la CADES et de l’ACOSS se durcissent. Dans ces conditions, la durée de vie de la CADES qui va encore se voir transférer 8,8 Md€ de l’ACOSSS devrait être prolongée au-delà de 2033.

->Politiques d’allègement des charges et coût du travail

Rapport de la DARES sur l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés

La DARES a présenté le 15 novembre les résultats 2022 de la mise en œuvre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH). Le taux d’emploi direct des personnes en situation de handicap reste de l’ordre de 3,5 % des emplois assujettis (l’obligation légale d’emploi de ces travailleurs est de 6 % des effectifs). Ce taux d’emploi direct est beaucoup plus important dans les grandes entreprises et il varie fortement selon les secteurs, étant très proche de l’obligation légale dans l’administration publique, l’enseignement et le médico-social.

L’envoi par le Gouvernement aux partenaires sociaux du document de cadrage sur l’emploi des seniors.

Le ministre du travail a adressé aux partenaires sociaux, le 21 novembre, un « document d’orientation » pour cadrer la négociation sur l’emploi des seniors, qui, selon les informations parues dans « Les Échos », laisse à ceux-ci finalement une assez large marge de manœuvre sous réserve toutefois de ne pas dégrader les finances publiques. Trois thèmes seraient à aborder: l’emploi des seniors, avec l’objectif de porter le taux d’emploi des 60-64 ans de 36,2 % actuellement (46 % dans la zone €) à 65 % à l’horizon 2030, en mobilisant un certain nombre d’instruments (négociation collective de branche, formation, aménagement des conditions de travail…); la progression des carrières (mobilité interne et externe pour prévenir l’usure professionnelle…); le compte épargne temps universel (CETU), promesse de campagne d’Emmanuel Macron, dont la gestion pourrait être centralisée auprès d’un opérateur unique comme la Caisse des dépôts.

->Formation professionnelle

Vers la mise en place d’un reste à charge pour le CPF ?

Dans le cadre de la recherche d’économies pour le PLF 2024 et, plus précisément pour limiter le déficit de « France Compétences », le gouvernement est revenu à la charge sur la mise en place d’un reste à charge pour le compte personnel de formation (v. Repères de juillet 2023) dont le coût devrait dépasser 2 Md€ en 2023. Le ministre du travail, Olivier Dussopt, a confirmé qu’un décret à cet effet interviendra pour une mise en place à la fin du premier trimestre, mais avec une portée plus limitée que ce qui avait été évoqué (à savoir une ponction de 30 % du montant de la formation) puisque ne serait pas concernée, par exemple, la mobilisation du CPF dans le cadre du plan de formation, et qu’en tout état de cause le calibrage du reste à charge n’interviendra qu’après une concertation avec les partenaires sociaux.

->Dépenses de santé, hôpital, assurance maladie

Le débat sur l’aide médicale d’État

Le coût de l’aide médicale d’État (1,1 Md€ pour 400 000 bénéficiaires en 2023), aide qui permet d’assurer la couverture médicale des sans-papiers, fait débat à la fois dans le cadre du PLF 2024 et du projet de loi sur l’immigration ; le ministre de l’intérieur s’est prononcé en faveur de la transformation de cette aide en une aide médicale d’urgence (AMU) beaucoup plus restrictive, avec un panier de soins réduit. La version d’étape du rapport commandé par la Première ministre à Patrick Stefanini et Claude Evin conclut à l’utilité de l’AME. Selon ce rapport, l’AME n’est pas « un facteur d’attractivité », car elle est très contrôlée, et de surcroît est marquée par un non-recours de 50%. Le débat va se dénouer à l’Assemblée Nationale…

Rapport du Haut conseil sur l’avenir de l’Assurance Maladie sur le financement et le pilotage de l’investissement dans le secteur de la santé

Le Haut Conseil sur l’avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) a publié le 15 novembre un ensemble de documents sur le financement et le pilotage des investissements dans le secteur de la santé, dans une perspective comparative internationale. Le premier volet porte sur les enjeux de gouvernance et de répartition des rôles entre les acteurs de l’investissement en santé, dans le double souci à la fois de mettre en place des moyens efficients au service des soins et d’assurer une répartition géographique qui garantisse l’égalité d’accès à ceux-ci. En France, l’exercice de cette responsabilité reste du ressort de l’État au niveau des ARS ; le second volet concerne la planification stratégique. Celle-ci repose sur la nécessité de tenir un inventaire le plus exhaustif possible du patrimoine existant ; en France, l’expérience passée montre, selon le rapport du HCAAM, que la planification, initialement centrée sur la programmation des investissements, s’en est progressivement détournée pour devenir un outil de restructuration de l’offre, mais la responsabilité de la planification est en reconfiguration avec le souci d’associer plus étroitement l’échelon local. S’agissant des critères d’investissement, le rapport insiste sur le fait que la lourdeur des projets hospitaliers mériterait d’expérimenter d’autres relations entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre du fait de la complexité quasi industrielle des projets et des enjeux d’optimisation des flux, qui sont inhérents au fonctionnement hospitalier, en s’appuyant sur des partenariats à long terme. S’agissant enfin du financement, le choix du modèle de financement le plus adapté (subventions ou revenus d’exploitation résultant de la tarification) dépend de la stratégie adoptée en matière de régulation de l’offre, la France se trouvant dans une situation intermédiaire associant subvention et mobilisation des excédents d’exploitation; quant au contrôle budgétaire et financier, il est exercé en France par la même autorité que celle qui régule l’offre de soin(les ARS), alors que d’autres États, comme l’Allemagne, distinguent ces deux rôles au travers d’administrations distinctes.

->Dépenses liées à la Famille

Note du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge sur les évolutions de la base mensuelle des allocations familiales sur une longue période

France Stratégie a publié une note du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge qui analyse sur une très longue période (1940-2022) l’évolution de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) qui est la base de calcul servant à la fixation du montant de la plupart des prestations familiales et qui fait l’objet d’une revalorisation mensuelle automatique. Pour évaluer les variations du pouvoir d’achat de la BMAF, l’étude compare son évolution par rapport à divers indicateurs de revenu (revenu disponible brut par tête, PIB par tête). Il apparaît que la BMAF aurait très fortement augmenté dans la période antérieure à 1950, allant jusqu’à ce que les prestations familiales représentent, à cette période, une part très importante du revenu disponible des familles par rapport au salaire direct, et cela malgré l’inflation importante de l’époque. Par la suite, le pouvoir d’achat de la BMAF, qui a été indexée sur les prix et non plus sur les salaires, a continué d’augmenter jusqu’aux années 1980, entrainant corrélativement celui des prestations familiales ; il s’est stabilisé dans les années 1990 jusqu’au début des années 2000 et il a fortement décroché à partir de 2010. Si l’on évalue la part relative des prestations familiales par rapport au revenu disponible par tête et au salaire moyen par tête (SMPT) depuis 1950, celle-ci s’est effondrée, passant de 35,4 % du SMPT pour un couple de deux enfants en 1949 à 4,2 % en 2022, ce qui, selon l’étude, montre la dégradation de la capacité des prestations familiales à satisfaire l’objectif de compensation de la charge des enfants.

->Assurance chômage

Accord a minima des partenaires sociaux sur l’Assurance chômage, et le refus de validation par le Gouvernement

Les partenaires sociaux (à l’exception de la CFE-CGC et de la CGT du côté patronal) étaient parvenus le 10 novembre à un accord sur une nouvelle convention d’Assurance chômage. Le texte comportait quelques améliorations pour la situation des chômeurs : le nombre minimum de mois pour être indemnisé pour les primo-entrants sur le marché du travail était ramené à cinq, la durée minimale d’indemnisation aurait été alignée sur cinq mois, la formule de calcul de l’allocation journalière aurait été assouplie en abaissant de 75 % à 70 % le plafond des jours non travaillés pour ceux qui enchainent les contrats courts, la dégressivité au bout de six mois ne se serait plus appliquée qu’aux moins de 55 ans (contre 57 ans actuellement) ; par ailleurs le patronat avait obtenu la suppression de la contribution exceptionnelle de 0,05 points instituée en 2017 et quelques aménagements sur le bonus-malus pour le recours aux contrats courts. Du côté des économies, le versement de l’allocation se serait fait sur la base de 30 jours calendaires, et des restrictions avaient été introduites pour l’allocation versée aux chômeurs créateurs d’entreprise qui occasionne beaucoup d’effets d’aubaine. Les partenaires sociaux, dont la marge de manœuvre était très réduite par la lettre de cadrage que leur avait envoyée le gouvernement (v. Repères de sept. 2023) avaient voulu parvenir à un accord pour sauver l’autonomie du Régime et éviter la reprise en main de celui-ci par l’État en cas d’échec. Mais le 27 novembre, le Gouvernement a fait connaître qu’il ne validerait pas cet accord, au motif qu’il ne prenait pas en compte les conséquences du recul de l’âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans sur l’indemnisation des chômeurs, se privant ainsi d’importantes économies.

->Dépendance

Présentation de la stratégie « bien vieillir »

La ministre des solidarités et des familles, Aurore Bergé, a présenté le 17 novembre la stratégie nationale du Gouvernement pour l’accompagnement des personnes âgées. Celle-ci se décline en quatre axes : prendre en compte de nouveaux besoins et reconnaître la place des seniors ; donner le choix de vieillir où on le souhaite ; accompagner les solidarités entre générations; garantir les droits et la participation des citoyens âgés. C’est le second axe qui comporte le plus d’engagements financiers, que ce soit pour le maintien à domicile (création de places d’infirmiers à domicile, adaptation des logements…) ou la modernisation des EHPAD dont le modèle financier sera simplifié (création d’un forfait global incluant les soins et la prévention de la perte d’autonomie) et qui bénéficieront de 50 000 professionnels d’ici 2030) avec un renforcement des contrôles. Une petite partie de ces mesures (essentiellement celles visant la protection des personnes âgées et les conditions de mobilité et d’accessibilité) est reprise dans la proposition de loi « Portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France », déposée par Mme Aurore Bergé (antérieurement à son entrée au Gouvernement) et qui vient d’être adoptée le 23 octobre par l’Assemblée Nationale. La Première ministre a annoncé le 22 novembre souhaiter une « loi de programmation pour le grand âge » d’ici la fin 2024. En tout état de cause et dès à présent, ces annonces s’inscrivent dans un contexte de pression accrue sur le gouvernement pour augmenter les moyens pour l’accompagnement du vieillissement et de la dépendance. Ainsi, par amendement au PLFSS 2024 les départements vont se voir attribuer 250 M€ supplémentaires par la Caisse nationale de solidarité pour l’économie (CNSA). Surtout celle-ci va se voir attribuer en 2024 une fraction supplémentaire de CSG (0,15 points soit 2,6 Md€ supplémentaires) qui va être retirée des ressources de la CADES.

Une note de l’Institut des politiques publiques sur le coût du maintien à domicile

Une note de l’Institut des politiques publiques évalue les besoins de financement qui seraient nécessaires pour faire face à l’accroissement du nombre de personnes dépendantes d’ici 2040 dans l’hypothèse d’un « virage domiciliaire ». Le nombre de personnes bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie pourrait passer de 1,3 millions en 2021 à 1,7 millions en 2040, dont près de 700 000 en EHPAD ou en résidence autonomie, soit une progression beaucoup plus sensible que dans les décennies précédentes. Le volume d’aide professionnelle devrait augmenter au moins de 42 % à domicile et de 14 % en EHPAD, correspondant à près de 100 000 postes supplémentaires (aides et infirmières) pour le maintien à domicile et 60 000 postes en EHPAD, où l’augmentation serait moindre. Sous l’hypothèse de revalorisations salariales pour renforcer l’attractivité des professions et d’une augmentation des plafonds d’aide, le coût supplémentaire d’un « virage domiciliaire » pourrait être de 4,6 Md€ en 2040.

->Solidarité, lutte contre la pauvreté, revenu universel

Fiche de FIPECO sur les inégalités et la redistribution

Le site FIPECO a actualisé sa fiche sur les inégalités et la redistribution. Après un rappel sur les différents instruments de mesure de la redistribution (coefficient de Gini…) et leurs limites, il rappelle l’importance en France de la redistribution par rapport aux inégalités primaires, redistribution qui est assurée à hauteur de 28% par l’impôt sur le revenu, et de 62% par les prestations sociales (minima sociaux et prime d’activité, allocations familiales et aides au logement).

FISCALITÉ ET PROCÉDURES FISCALES
->Politique fiscale

La hausse des accises sur les tabacs est-elle influente sur la lutte contre le tabagisme ?

Présenté le 28 novembre par le ministre de la santé, le Programme national de lutte contre le tabagisme (PNLT) 2023-2027, co-porté avec le ministère chargé des comptes publics, vise à bâtir la première génération sans tabac à l’horizon 2032, comme souhaitée par le Chef de l’État. Faut-il rappeler que le tabagisme est la première cause de mortalité évitable, de mortalité par cancer et de mortalité avant 65 ans ; le tabac est responsable dans notre pays de près d’un décès sur huit. Lancé en 2014, ce programme national a permis la mise en place d’une gouvernance, la rénovation du cadre juridique sur le tabac et la mise en œuvre d’actions emblématiques (paquet neutre, avertissements sanitaires agrandis, etc.). Les premiers résultats sont encourageants en matière de réduction du tabagisme quotidien chez les adolescents. Ainsi, après plusieurs années de stabilité, la prévalence du tabagisme qui avait diminué d’un million entre 2016 et 2017 poursuit sa baisse, mais de manière plus modérée, avec 0,6 M de fumeurs en moins entre 2017 et 2018. Le PNLT traduit la volonté d’agir encore plus fortement contre ce fléau, en combinant des actions sur le volet économique et sur les volets sociaux et sanitaires, et en élargissant la palette d’interventions. Quid du volet fiscal ? Les consommateurs de tabac vont de nouveau subir une hausse du prix du paquet de cigarettes à compter du 1er janvier 2024. En effet, pour éviter un décrochage des prix des cigarettes par rapport aux autres produits, le Parlement a décidé l’an passé de faire évoluer l’imposition du tabac en fonction de l’inflation de l’année N − 1 et non plus de l’année N – 2 (v. Repères de sept. 2022). Et le plafond de 1,75 % qui limitait la hausse des accises a été supprimé. Ainsi, le prix du paquet de cigarettes est constitué à plus de 80 % de taxes. Le prix moyen du paquet de cigarettes a atteint 11,14 € en juin 2023. Les prix des paquets au 1er janvier 2024 vont s’accroitre sur la base d’une inflation à 4,8 % pour 2023. Afin de préserver les marges des industriels, l’augmentation du prix d’un paquet de cigarettes devrait être de 43 centimes selon la Société nationale d’exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA). Le prix moyen du paquet de cigarettes devrait atteindre 12 € en janvier 2024. L’objectif étant d’atteindre 13 € à la fin du quinquennat. Ces nouvelles hausses de la fiscalité feront-elles baisser le tabagisme ? Cela reste à démontrer…

Le seuil d’importation du tabac en France désavoué par le Conseil d’État

Si la chute des ventes est certaine (1,5 Md de ventes en 2022 contre 2 Md en 2018), le nombre de fumeurs demeure stable autour de 12 millions. Ainsi, la contrebande de cigarettes et le commerce transfrontalier de tabac sont un phénomène croissant en France. Un rapport de la commission des finances de l’Assemblée nationale, rendu public après la crise sanitaire (v. Repères, oct. 2021), avait déjà observé un pic exceptionnel de recettes fiscales en 2020 et 2021 (14,8 Md€) puisque les confinements avaient obligé les consommateurs de tabac à réaliser de nouveau leurs achats chez les buralistes situés en France. Les saisies de cigarettes de contrebande par l’administration des douanes sont aussi graduelles (v. rapport d’activités de la DGDDI de 2022), laquelle a même découvert des usines clandestines en France, ce qui témoigne des limites de la politique fiscale menée par le Gouvernement… Selon la Confédération des buralistes, la hausse de la fiscalité a installé et renforcé le marché parallèle et le commerce transfrontalier. Selon le comité national contre le tabagisme, de nouveaux relèvements des accises sont essentiels du fait de l’inflation. En 2023, le rendement budgétaire a été largement inférieur aux estimations du Gouvernement établies à 600 M€. Avec 13,7 Md€ de recettes en 2023, c’est plutôt la stabilité de la recette fiscale qui a prévalu, ce qui signifie que le marché parallèle prend le relais… Pour 2024, le Gouvernement espère 250 M€ de recettes fiscales supplémentaires. Finalement, il faut admettre qu’au-delà d’un certain seuil de pression fiscale, la hausse de la fiscalité est contre-productive. Cela n’a plus beaucoup d’impact sur le comportement des consommateurs de tabac, lesquels se dirigent vers le commerce transfrontalier et la contrebande de fausses cigarettes, ce qui est d’autant plus dangereux pour leur santé dans ce dernier cas. En imposant au Gouvernement de respecter le droit de l’UE et d’autoriser les consommateurs à ramener jusqu’à 800 cigarettes d’un autre État de l’UE, contre 200 aujourd’hui, soit quatre cartouches de cigarettes au lieu de seulement deux à ce jour, le Conseil d’État a rendu une décision (CE, 29 sept. 2023, Req. n° 474580), à la requête d’un jeune étudiant, qui vient reconnaître que les seuils fixés par le Code général des impôts (CGI) sont en contrariété avec le droit de l’UE, ce qui a très certainement fait expectorer le ministre des comptes publics ! Le Conseil d’État a enjoint la Première ministre de prendre, avant la fin du printemps, un décret pour se mettre en conformité avec le droit de l’UE, et de revoir ses seuils d’importation du tabac en France…

Une loi de finances de fin de gestion pour 2023 sans dispositions fiscales nouvelles

Le PLF de fin de gestion pour 2023, délibéré en conseil des ministres du 31 octobre 2023, est présenté pour la première fois cette année. Il s’agit d’une nouvelle catégorie de loi de finances, introduite par la réforme de la LOLF par la loi organique du 28 décembre 2021 (art. 35 LOLF). Elle est distincte de la loi de finances rectificative de droit commun. C’est un texte qui est circonscrit aux seules dispositions essentielles à l’exécution budgétaire de l’année en cours. Il présente les ajustements de crédits indispensables à la gestion de la fin de l’année, mais ne comporte notamment aucune disposition fiscale nouvelle. Le solde budgétaire de l’État présenté dans le projet initial s’établit à -171,4 Md€ en 2023, soit un écart de -6,4 Md€ par rapport à la loi de finances initiale, qui s’explique principalement par la hausse de la charge de la dette (+3,8 Md€) sur les dépenses du budget général et par la baisse des recettes non fiscales (- 4,4 Md€). Cette baisse est en partie contrebalancée par la hausse des recettes fiscales nettes (+2,4 Md€). Les prévisions de recettes fiscales nettes pour 2023 sont révisées à la hausse à hauteur de +2,4 Md€. Cette augmentation provient notamment de la révision de certaines hypothèses macroéconomiques sous-jacentes à la LFI 2023 et des remontées comptables observées à date. Les recettes d’impôt sur le revenu seraient supérieures de +2,7 Md€ à la prévision initiale pour atteindre 90,0 Md€. Les recettes d’impôt sur les sociétés seraient supérieures de +6,0 Md€ à la prévision de la LFI 2023 pour atteindre 61,3 Md€, portées par les bons résultats des entreprises françaises en 2022 et 2023. La part État des recettes de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) augmenterait de +1,9 Md€ par rapport à la prévision initiale pour atteindre 96,6 Md€. Les autres recettes fiscales nettes baisseraient de 8,0 Md€ par rapport à la LFI 2023 pour atteindre 66,3 Md€. En 2023, les recettes non fiscales s’élèveraient à 26,5 Md€. Enfin, en 2023, le solde des comptes spéciaux s’établirait à -5,4 Md€, soit une baisse de -1,8 Md€ par rapport à la LFI pour 2023. Le Gouvernement est parvenu à faire voter ce texte sans recours à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, par 91 voix pour et 41 contre à l’Assemblée nationale.

->Impôt sur le revenu

L’indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation et ses corollaires

Le Gouvernement a révisé le barème de l’impôt sur le revenu en 2024 pour tenir compte de l’inflation. Selon une étude de l’Institut des politiques publiques (v. étude du 27 sept. 2023), cela ne constituerait qu’une très légère baisse d’impôt sur le revenu car les salaires sont encore en phase de rattrapage des prix. C’est l’une des principales mesures du projet de loi de finances pour 2024 (v. art. 2 du PLF – v. Repères d’oct. 2023), en cours d’examen par le Parlement. En effet, le barème de l’impôt sur le revenu sera modifié, à compter du 1er janvier 2024, afin de tenir compte de l’inflation. Les différents seuils seront donc accrus de 4,8 %. Les foyers fiscaux ne s’acquitteront ainsi d’aucun impôt sur les 11 294 premiers euros perçus en 2023 (contre 10 777 € perçus en 2022), puis 11 %, 30 %, 41 % sur les tranches de revenus suivantes et jusqu’à 45 % pour les revenus supérieurs à 177 107 € (contre 168 995 € perçus en 2022). Il faut souligner que sur 40,2 millions de foyers fiscaux, seuls 17,9 millions de foyers ont été imposés, soit moins de la moitié des foyers fiscaux ont supporté le poids de la charge fiscale en France en 2022. Le Gouvernement n’a pas manqué de présenter cette révision du barème comme une mesure de soutien aux ménages frappés par l’inflation. Selon le Gouvernement, si le choix du gel du barème avait été retenu, et qu’aucune indexation n’ait été mise en œuvre par le législateur, le rendement budgétaire de l’impôt en 2024 sur les revenus perçus en 2023 aurait été majoré d’environ 6,1 Md€.

->Fiscalité locale

Les corollaires fiscaux locaux des failles de la déclaration d’occupation des biens immobiliers

Depuis quelques jours, de nombreux étudiants, et même des enfants, se plaignent par voie de presse d’avoir reçu des avis de taxe d’habitation (TH). L’informatique de l’administration fiscale a estimé que des étudiants avaient leur résidence principale chez leurs parents puisqu’ils sont rattachés à leur foyer fiscal, et que dès lors leur résidence étudiante était donc assimilable à une résidence secondaire, pour laquelle la TH a été exigée. Environ 3,9 millions d’avis de TH sur les résidences secondaires ont été adressés par l’administration fiscale, soit un chiffre bien loin des 27,6 millions d’avis adressés en 2020 ! Ainsi, la réforme de la TH a partiellement atteint l’un de ses principaux objectifs poursuivis par le législateur : mettre un terme aux réclamations et demandes de dégrèvements car elles mobilisaient un nombre significatif de fonctionnaires de l’administration fiscale pour y répondre. Toutefois, l’administration fiscale a encore reçu autant de réclamations de la part des contribuables au sujet de la TH en 2023 qu’en 2022 suite aux loupés de la déclaration d’occupation des biens immobiliers. En effet, malgré trois reports successifs de la date limite de ladite déclaration, près d’un propriétaire sur cinq n’a rien déclaré du tout… sans même parler de ceux qui se sont trompés dans leur déclaration ! Or si une habitation n’est pas déclarée occupée par un locataire, la TH sur la résidence secondaire s’applique, et il en va de même lorsque l’occupant déclaré dispose déjà d’une résidence principale, comme c’est le cas pour les étudiants et enfants rattachés au foyer fiscal parental (v. Repères d’août 2023) ! Il faut aussi préciser que de nombreuses communes ont eu la possibilité de surtaxer à la TH les résidences secondaires, ce qui vient alourdir les sommes réclamées au titre des avis d’imposition de TH adressés aux contribuables concernés. Le processus de dégrèvement de TH pour les cas précités va être finalement géré par des services fiscaux en sous-effectifs aujourd’hui. Pour les étudiants et les jeunes enfants, la DGFIP indique que ces situations marginales ont été identifiées par les services et pour lesquels les TH vont être automatiquement dégrevées. L’administration fiscale relativise la portée de ces incidents et évoque des erreurs marginales, inhérentes à une réforme fiscale de grande ampleur.

->Impôts sur le capital

Les dons aux associations en nette progression depuis la mise en place de l’IFI

Depuis cet été, une controverse est née depuis que le ministre des finances a annoncé vouloir rapprocher l’abattement fiscal bénéficiant aux locations touristiques de celui appliqué aux Depuis 2020, le nombre de foyers fiscaux assujettis à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ne cesse de croître. Selon le rapport d’activités de la DGFIP, on en recensait 143 348 en 2020, puis 152 696 en 2021 et enfin 163 901 en 2022, soit une hausse de près de 15 %. Fort logiquement, les recettes au profit de l’État générées par cet impôt sur le capital immobilier progressent également, passant de 2 Md€ en 2020 à 2,3 Md€ en 2022. Par voie de conséquence, les sommes collectées par les associations auprès des plus fortunés désormais assujettis à l’IFI ont progressé plus rapidement que prévu, selon l’étude annuelle du réseau Recherche & Solidarités en collaboration avec l’administration fiscale. La Croix-Rouge est devenue le premier bénéficiaire des dons. Les foyers fiscaux assujettis à l’IFI sont de plus en plus nombreux à déclarer un don. Ils étaient 33.200 en 2022, soit une hausse de 66 % depuis 2020. Il faut toutefois souligner que 51 600 foyers assujettis à l’ISF avaient déclaré un don en 2017. L’inflation liée à la crise énergétique résultant de la guerre en Ukraine n’a pas altéré la générosité publique en France. Il faut formuler le vœu que le niveau du nombre de déclarants ayant fait un don atteint avant la réforme de l’IFI soit prochainement dépassé. Toutefois, l’évolution du marché immobilier inquiète raisonnablement les professionnels du secteur associatif. À suivre…

->TVA

Vers une baisse de TVA sur les réparations de vêtements, souliers et d’électroménager ?

Fin 2022, des amendements parlementaires au PLF pour 2023 défendaient la fixation d’un taux de TVA réduit de 5,5 % sur les activités de réparation de cycles, chaussures et articles en cuir et retouches textiles. Ils visaient à favoriser et encourager ces activités de proximité, qui à ce jour peinent à trouver un essor économique. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (dite AGEC – L. n° 2020-105 du 10 février 2020) a créé des fonds de la réparation financés par certaines filières à responsabilité élargie des producteurs. Le levier de la TVA resterait selon les défenseurs de cette cause le seul moyen de contribuer à cet objectif. La Directive européenne 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) permet déjà d’instaurer en France un taux réduit pour la réparation des cycles, des chaussures, des articles en cuir et des vêtements (article 106 et annexe IV). Plusieurs États de l’UE ont déjà adopté une TVA réduite sur ces activités avec des taux allant de 5 à 8 % (Belgique, Suède, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, etc.). Une étude de l’ADEME, paru fin 2018, permet de disposer d’informations concernant les entreprises exerçant leur activité dans ces trois domaines de la réparation. Ces trois secteurs représentent 12 382 entreprises, emploient 19 000 actifs et pèsent 492 M€ de chiffre d’affaires. Selon les défenseurs de cette mesure, l’impact d’une TVA à taux réduit à 5,5 % aboutirait, à périmètre constant, à une baisse de recettes pour l’État de 50 M€. Une TVA à taux réduit contribuerait à l’implantation ou la réimplantation de ces activités dans les centres-villes. Un rapport Ledoux-Jacquillat remis en novembre au ministre de la transition écologique prône une baisse de la TVA en ce sens. En effet, suite au débat budgétaire de l’automne 2022, le Gouvernement avait chargé, au printemps 2023, Emmanuelle Ledoux, directrice de l’Institut national de l’économie circulaire (INEC), et Emery Jacquillat, président de la CAMIF, d’étudier si des produits recyclés ou écoconçus pouvaient bénéficier de taux réduits de TVA. La Cour des comptes a exprimé à plusieurs reprises son mécontentement devant la multiplication des taux réduits de TVA, jugés inefficaces et coûteux pour les finances publiques (v. Repères de févr. 2023). La baisse de la TVA dans la restauration en 2009 est souvent brandie comme l’exemple à ne pas suivre car elle bénéficie rarement aux consommateurs. Est-ce véritablement à cause de la seule TVA à taux normal que nous avions 8 000 cordonniers dans les années 1980 en France, et qu’il y en a moitié moins de nos jours ? C’est le régime fiscal des TPE qu’il faut revoir dans son ensemble pour redonner viabilité et attractivité économique aux commerçants et prestataires de services de proximité alors qu’ils ont été asphyxiés fiscalement depuis quarante ans. Selon le rapport Ledoux-Jacquillat, « l’enjeu est de consommer moins mais mieux. Ce modèle économique est plus favorable pour l’État, car un produit qui est trois ou quatre fois plus cher parce qu’il est conçu et fabriqué en France génère plus de rentrées fiscales, même avec une TVA réduite, qu’un produit jetable fabriqué en Chine ». Le Gouvernement fera-t-il mentir le proverbe selon lequel « ce sont toujours les cordonniers qui sont les plus mal chaussés » ?

Une baisse de TVA controversée sur l’équitation et les compétitions de jeux vidéo

À la lecture du PLF pour 2024 (art. 10 sexies et suivant) les entreprises de loisirs sportifs marchands comme les salles de sport, d’escalade ou de yoga ont été déçues des arbitrages fiscaux du Gouvernement qui prévoient d’instaurer un taux réduit de 5,5 % de TVA sur les prestations effectuées par les centres équestres (enseignement et pratique de l’équitation, activités de démonstration et accès aux installations dédiées à l’utilisation des équidés). La commission des finances du Sénat propose toutefois de borner à trois ans cette dépense fiscale et d’en prévoir l’évaluation. Certains acteurs faisant également la promotion de l’activité physique et sportive crient à l’injustice fiscale. En parallèle, un autre aménagement fiscal, avec un taux réduit de 5,5 %, devrait être accordé aux compétitions d’e-sport, c’est-à-dire aux billetteries des compétitions de jeux vidéo. Pour assurer sa conformité au droit de l’UE, la commission des finances du Sénat a proposé d’en modifier la base légale. Elle a proposé également de prévoir l’évaluation et le bornage du dispositif.

Les inquiétudes du Sénat sur le poids décroissant des recettes de TVA au profit de l’État

À juste titre, comme la Cour des comptes (CPO, La TVA, une taxe à recentrer sur son objectif de rendement pour les finances publiques, févr. 2023) et la doctrine (v. la tribune d’A. Baudu et X. Cabannes, « La TVA : un édifice qui s’émiette, un pouvoir fiscal local qui s’effrite », AJDA 2023. 97), la commission des finances du Sénat s’inquiète du fait que l’État se soit privé de la moitié du produit de la TVA au profit des collectivités territoriales, de la Sécurité sociale et de l’audiovisuel public. Ses recettes reposent toujours plus sur l’impôt sur les sociétés, et l’impôt sur le revenu, qui sont bien plus volatils, en fonction de la conjoncture économique (v. rapport général n° 128, tome II, fascicule 1, Sénat, Doc. Parl., 21 nov. 2023).

->Contrôle fiscal

L’annexe « Gestion des finances publiques, lutte contre l’évasion fiscale » du PLF 2024

Comme l’an passé, la rapporteure spéciale, chargée de l’examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques » à l’Assemblée nationale, a formulé des critiques et a réitéré ses 34 recommandations formulées lors du PLF pour 2023 (annexe n° 26 au PLF 2024, Doc. parl., A.N., 2023). Selon cette annexe explicative à la seconde partie du PLF pour 2023, la lutte contre l’évasion fiscale n’est pas suffisamment efficace en France, reprenant dans les grandes lignes les conclusions du rapport rendu par le CPO en 2019 intitulé « La fraude aux prélèvements obligatoires » (v. Repères, nov. 2022). Le manque de moyens humains au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFIP) est pointé du doigt par la rapporteure spéciale. Le « plan de lutte contre la fraude fiscale » du Gouvernement, présenté au printemps 2023 (v. Repères, mai 2023), n’a pas du tout convaincu la rapporteure spéciale de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Le Gouvernement a annoncé 1.500 postes supplémentaires au contrôle fiscal d’ici à 2027. Redéploiements effectués au sein du réseau de la DGFIP ou véritables créations de postes ? Avec 92.166 postes en 2022, dont un tiers d’inspecteurs des finances publiques (v. rapport d’activités de la DGFIP de 2022), la DGFIP a perdu en moyenne plus de 2000 postes par an depuis dix ans au motif que l’intelligence artificielle, principal argument développé par le Gouvernement pour contrebalancer ces réductions d’effectifs, ferait des merveilles, ce qui reste encore à démontrer…

Rapport de la Cour des comptes sur la détection de la fraude des particuliers

En 2022, la Cour des comptes procédait à une première consultation citoyenne pour recueillir des propositions d’enquêtes visant à enrichir son programme de travail. À l’issue de près de 9 000 inscriptions et 333 contributions en ligne, six thèmes ont fait l’objet d’investigations en 2023. La détection de la fraude fiscale des particuliers est le quatrième rapport d’initiative citoyenne, qui a été publié en novembre 2023. Les contributions citoyennes à l’origine de la présente enquête ont justifié cette proposition par « la nécessité de vérifier que l’administration dispose de moyens efficaces de détection de la fraude fiscale des particuliers », signe de l’attachement des administrés au civisme fiscal et au principe d’égalité devant l’impôt. Conformément à la demande faite à la Cour des comptes, le présent rapport ne traite que des impôts directement acquittés par les particuliers. Ceux-ci représentaient plus de 160 Md€ en 2022. Une lutte efficace contre la fraude fiscale constitue non seulement l’une des conditions du consentement à l’impôt, mais également un enjeu budgétaire, puisque le montant total des sommes recouvrées par l’administration fiscale après contrôle s’est élevé à 14,6 Md€ en 2022, dont un peu plus du tiers sur des particuliers. Si la Cour des comptes pointe et salue le recours croissant au croisement automatique de données, elle invite l’administration fiscale à expliciter davantage sa stratégie et à en mesurer les effets. Les magistrats ne remettent pas en question l’utilisation de ce « data mining » (v. étude de E. Caron, « Le Big Data fiscal : quelles conséquences pour le contrôle fiscal et les contribuables ? », GFP 6-2021, p. 77–83), mais ils demandent à l’administration fiscale d’être plus intelligible sur ses objectifs, ses pratiques et ses résultats en la matière. Si la Cour des comptes regrette que l’administration fiscale reste discrète sur sa méthodologie de travail, peut être pouvons-nous comprendre qu’elle ne souhaite pas dévoiler celle-ci aux yeux des fraudeurs de l’impôt, qui regorgent d’ingénierie pour la doubler. La confidentialité est parfois salutaire et la transparence plus hasardeuse…

Dépôt d’un projet de loi autorisant l’approbation de la convention fiscale franco-moldave

En novembre, un projet de loi a été déposé à l’Assemblée nationale afin d’autoriser l’approbation de la convention fiscale entre la France et la Moldavie afin d’éliminer les risques de double imposition en matière d’impôt sur le revenu et pour la prévention et l’élimination des risques d’évasion et de fraude fiscale, signée le 15 juin 2022 à Chisinau (projet de loi n° 1817, A.N., doc. parl., 31 oct. 2023).

Mise à jour de la Charte des droits et obligations du contribuable vérifié

La nouvelle version publiée en octobre 2023 de la Charte des droits et obligations du contribuable vérifié prévoit que les demandes de recours hiérarchique ou d’interlocution portant sur le bien-fondé des rectifications maintenues dans la réponse aux observations du contribuable, formulées par les contribuables faisant l’objet d’une procédure de rectification contradictoire dans le cadre d’un contrôle fiscal externe (vérification de comptabilité, examen de comptabilité ou examen contradictoire de la situation fiscale personnelle), doivent désormais être présentées dans un délai de trente jours. Les commentaires doctrinaux au BOFIP correspondants ont été mis à jour en conséquence.

MANAGEMENT PUBLIC
->Fonction publique d’État

Des avancées sur la mutualisation des fonctions supports de l’État

Un décret publié au JORF le 5 novembre 2023 (Décr. n° 2023-1019 du 3 nov. 2023 relatif à la mutualisation entre certains établissements publics de l’État des fonctions et moyens nécessaires à la réalisation de leurs missions) précise les dispositions de l’article 201 de la loi dite « 3DS » du 21 févier 2022 qui prévoyait que des établissements publics exerçant des « fonctions similaires » sur des « périmètres géographiques différents » puissent mutualiser certaines fonctions supports. Le texte précise que les fonctions et moyens relatifs à la gestion financière et budgétaire, des systèmes d’information, des ressources humaines, de l’immobilier ou encore de la logistique pourront être mutualisés par le biais d’un groupement d’intérêt public ou d’une convention de coopération. Le gouvernement espère que cette mesure permettra de générer des gains de productivité et une montée en compétence des fonction supports.

->Ministère des finances

Vers un renforcement des pouvoirs de contrôle de l’Inspection générale des finances ?

Dans le cadre du débat portant sur le projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, le Gouvernement, après l’article 49 du PLF pour 2024, a déposé un amendement visant à renforcer les pouvoirs de contrôle de l’Inspection générale des finances (IGF). C’est un service à vocation interministérielle relevant des ministères économiques et financiers. Elle dispose d’une compétence de contrôle et de vérification sur l’ensemble des organismes soumis au décret GBCP du 7 novembre 2012 et sur certaines entités recevant des concours financiers de l’État définies par le législateur (art. 2 L. n° 47 1465 du 8 août 1947 relative à certaines dispositions d’ordre financier et art. 43 L. n° 96 314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier), ainsi que d’une compétence de conseil et d’évaluation relative à l’ensemble des politiques publiques sur saisine du Gouvernement. L’affaire Orpea, à l’occasion de laquelle les pouvoirs publics ont souhaité lancer un contrôle des inspections générales des finances et des affaires sociales, a montré que celles-ci rencontrent des difficultés croissantes pour exercer pleinement leurs missions. Ces dispositions sont donc nécessaires pour lever les difficultés récurrentes qui entravent la capacité de l’inspection générale des finances à contrôler le bon usage des fonds publics dans certains secteurs économiques. Ainsi, dans le cadre de ses missions de contrôle, l’IGF doit bénéficier d’un droit de communication, afin que ne puissent être opposés à ses membres des secrets légalement protégés, ce qui rendrait le contrôle inopérant. Ce principe s’applique également aux agents des sociétés faîtières (holding), lorsqu’une filiale fait l’objet d’une vérification ou d’un contrôle par l’IGF. Une astreinte est prévue lorsqu’il n’est pas satisfait à la demande des membres de l’inspection. Cet amendement couvre également les missions de conseil menées par l’IGF à la demande du Gouvernement. Dans le cadre de ces missions, les acteurs privés seront autorisés à transmettre à l’IGF des informations couvertes par le secret professionnel ou par le secret des affaires, sans y être contraints. De telles informations étant généralement indispensables pour établir un diagnostic robuste, il est nécessaire de sécuriser le cadre juridique de ces échanges. Par ailleurs, les administrations et services des ministères économiques et financiers, qui prêtent leur concours aux services d’inspection, sont également amenés à transmettre de telles informations et doivent bénéficier de la même dérogation. Il est précisé que cet article est sans conséquence sur la protection du secret de la défense nationale, du secret médical, du secret des délibérations judiciaires, du secret de l’enquête ou de l’instruction judiciaires ou du secret professionnel de l’avocat, dont la levée n’est pas nécessaire au bon déroulement des missions de l’IGF, et qui demeurent donc opposables. Les membres de l’IGF étant amenés à connaître de secrets légalement protégés, il est précisé que leurs investigations sont elles-mêmes couvertes par le secret, et que les publications de l’IGF ne peuvent pas y porter atteinte.

->Gestion publique

Deuxième phase des revues de dépenses publiques lancée par le Gouvernement

Le 16 novembre 2023, la Première ministre a lancé la deuxième édition des revues de dépenses lors d’une réunion avec les membres du Gouvernement. Si 16 Md€ d’économies ont été dégagés en 2024 en grande partie grâce à la fin des dispositifs d’urgence et d’aide dans le domaine de l’énergie, le Gouvernement maintient son objectif de trouver 12 Md€ d’économies d’ici 2025. Une dizaine de revues, pilotées par les différentes inspections générales, ont été lancées et d’autres suivront dans l’année. Les aides aux entreprises et les dispositifs médicaux sont notamment les principales pistes envisagées par le Gouvernement pour réduire la dépense publique (v. la note de FIPECO mise à jour en novembre 2023).

Questions sur l’accompagnement des collectivités locales dans la transition écologique->Fonction publique territoriale

A l’occasion du Salon des Maires, le ministre de la transition écologique a souhaité mettre en lumière les dispositifs d’accompagnement des collectivités territoriales dans la transition écologique, aujourd’hui sous-utilisés. Il est notamment revenu sur la plateforme Aides-territoires, lancée en 2018, et qui recense un grand nombre d’aides et d’expertises disponibles pour accompagner les collectivités. Ces annonces font écho aux conclusions du rapport sénatorial « Engager et réussir la transition environnementale de sa collectivité » qui pointe du doigt l’énorme besoin en expertise des collectivités en la matière. La question des aides financières de l’État à destination des collectivités questionne également. Dans une étude publiée le 7 novembre 2023 (intitulée « Collectivités locales : comment financer l’accélération des investissements climat ? »), l’Institut de l’économie pour le Climat (I4CE) et la Banque des Territoires pointent du doigt le nécessaire soutien financier de l’État. En effet, l’étude démontre qu’une augmentation de la DGF limitée à une indexation et un maintien du « fonds vert » à 2,5 Md€ ne suffira pas à financier la transition écologique dans les territoires, et ce quel que soit le scénario retenu.

->Transitions

Le « Budget Vert » élargi aux collectivités locales et aux opérateurs de l’État

Alors que la méthodologie de Budget Vert – qui vise à mesurer l’impact environnemental des dépenses publiques – a été déployée en 2020 par la direction du budget sur le projet de loi de finances, le PLF pour 2024 prévoit plusieurs élargissements. En effet, le Gouvernement a retenu deux amendements qui visent à imposer aux collectivités territoriales de mesurer l’impact environnemental de leurs dépenses d’investissement et à isoler leur « dette verte » pour permettre une traçabilité des investissements dédiés à la transition écologique. En sus, un autre amendement retenu imposera dès 2026 aux opérateurs de l’État dont les dépenses sont supérieures à 60 M€ de mettre en place un « Budget Vert » en suivant la méthodologie de la direction du budget.

Intelligence artificielle à la DGFIP : entre développement rapide et attente d’un « saut qualitatif »

Le 8 novembre 2023, la direction de la transformation numérique (DTNUM) de la DGFiP organisait un séminaire sur l’Intelligence artificielle (IA) générative. L’occasion de faire un point sur les expérimentations en cours (ciblage des contrôle, résumé d’amendements, retranscription de réunions et rédaction de compte-rendu, extraction d’information des déclarations de succession) et de redire la volonté de cette administration de se saisir de ces nouveaux outils. La DGFiP entend par exemple étendre l’utilisation du « traitement automatisé d’analyse prédictive de la dépense » (TAAP) – l’IA permettant de cibler le contrôle des factures en fonction du risque d’anomalie – aux dépenses des collectivités et des hôpitaux. Pour autant, certaines utilisations ne semblent pas encore donner pleinement satisfaction. Concernant la réponse aux questions des contribuables, la DTNUM explique que l’IA produit très souvent des réponses fausses. Par ailleurs, dans son rapport d’initiative citoyenne portant sur la détection de la fraude fiscale des particuliers (v. rapport rendu public le 15 novembre 2023), la Cour des Comptes ne note aucun « saut qualitatif » dans le ciblage des contrôles en dépit d’un effort important dans la modernisation des méthodes. Les magistrats estiment cependant que le déploiement de l’IA a permis de générer des économies en supprimant des centaines d’emplois.

EUROPE
->Politique européenne

Prévisions économiques mitigées de l’automne 2023

Le 15 novembre 2023 la Commission européenne a publié ses prévisions économiques. Elle considère que la reprise économique « s’annonce modeste après une année difficile ». L’inflation devrait ralentir.

Directive sur les retards de paiement : saisine de la CJUE par la Commission

Le 16 novembre 2023, la Commission européenne a décidé de saisir la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’un recours contre la Belgique, la Grèce et l’Italie pour violation de la directive sur les retards de paiement (directive 2011/7/UE). Cette dernière contraint les pouvoirs publics à payer leurs factures dans un délai de 30 jours (ou de 60 jours pour les hôpitaux publics) afin de montrer l’exemple aux entreprises.

Cour des comptes européenne : rapport sur la politique aquacole de l’UE

Au mois de novembre, la Cour des comptes a publié plusieurs travaux importants (voir infra cette chronique). En matière de politiques européennes, elle a aussi publié le 25 novembre un rapport spécial n° 25/2023 critique vis-à-vis de la politique aquacole de l’UE (l’élevage ou la culture d’organismes aquatiques, notamment de poissons, de coquillages et d’algues, qui doit participer à la sécurité alimentaire et qui est encouragée dans le cadre du Pacte vert) : « Une production qui stagne et des résultats mitigés malgré la hausse des financements de l’UE ».

Financement international de l’action climatique par l’UE

Le 23 novembre 2023, dans la perspective de la COP 28, le Conseil a approuvé les montants engagés en 2022 par l’Union européenne et ses 27 États membres, à savoir une contribution de 28,5 Md€ provenant de sources publiques pour financer la lutte contre le changement climatique. Ils ont aussi mobilisé un montant supplémentaire de 11,9 Md€ en financement privé afin d’aider les pays en développement à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et à s’adapter aux effets du changement climatique.

->Pacte de stabilitÉ et de croissance

Cour des comptes : sa contribution à la réforme du Pacte de stabilité

Le 7 novembre, la Cour des comptes européenne a participé aux débats sur la réforme du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) attendue pour cette année 2023 en publiant un document d’analyse n° 05/2023 consacré à « Réformer la gouvernance économique de l’UE : des opportunités, mais aussi des risques et des défis à surmonter ». De façon générale la Cour des comptes approuve les propositions de la Commission « car elles répondent à la plupart des grandes préoccupations » de la Cour des comptes européenne, « notamment en ce qui concerne la transparence et l’adhésion au niveau national ». Toutefois, la Cour des comptes européenne s’inquiète des moyens de garantir dans le Pacte réformé « la réalisation d’ajustements budgétaires rapides et efficaces qui concourent à la soutenabilité de la dette ».

->Budget européen

Cour des comptes européenne : rapports sur l’exercice budgétaire 2022

Au mois de novembre, la Cour des comptes a publié plusieurs travaux annuels relatifs à l’exercice budgétaire 2022. Le 13 novembre, c’est un document d’analyse  06/2023 à propos du rapport annuel de la Commission sur la gestion et la performance du budget de l’UE concernant l’exercice 2022. Le 14 novembre elle a publié son rapport annuel sur les entreprises communes de l’UE relatif à l’exercice 2022 et le 15 novembre son rapport sur les comptes annuels des Écoles européennes relatifs à l’exercice 2022. Enfin, le 29 novembre, elle a publié son rapport sur tout engagement éventuel découlant de l’exécution, par le Conseil de résolution unique, le Conseil de l’Union européenne ou la Commission, des tâches qui leur incombent en vertu dudit règlement pour l’exercice 2022.

Budget européen 2024 : accord entre le Parlement et le Conseil

Le 11 novembre 2023, à la satisfaction de la Commission européenne compte tenu d’un contexte préoccupant et d’un cadre financier pluriannuel rallongé pour atteindre plus de 2000 Md€, Parlement et Conseil sont parvenus à un accord sur les dépenses budgétaires de l’Union pour 2024 avec un total de 189 Md€ d’engagements et 143 Md€ de crédits de paiement. Il a été approuvé par le Conseil le 20 novembre. Le texte du Comité de conciliation a fait l’objet d’un rapport le 16 novembre et d’une adoption définitive par le Parlement le 22 novembre 2023 (résolution législative 2023/0264(BUD).

Avenir de l’UE : les propositions du Parlement pour modifier les traités

Le 13 décembre, la Commission européenne adopte deux décisions concernant la Hongrie et la situation de l’État de droit dans cet État membre. Elle considère que la réforme judiciaire menée Le 22 novembre 2023, à une faible majorité, le Parlement européen a adopté une résolution reprenant le rapport approuvé par la Commission des affaires constitutionnelles le 25 octobre sur les projets de réforme des institutions européennes (2022/2051(INL)). Contrairement à ce que plusieurs commentateurs ignorant du droit de l’Union ont pu déclarer, le Parlement n’a pas la compétence de modifier par une résolution les traités européens. Les évolutions majeures souhaitées par les parlementaires en ce qui concerne le système de financement de l’Union concernent une extension des votes à la majorité qualifiée. La fiscalité étant un des derniers domaines à l’unanimité, on comprend qu’elle soit visée (l’article 192 paragraphe 2 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne – TFUE – serait supprimé). De même, le Parlement souhaite obtenir « un droit d’initiative législative à part entière et un rôle de co-législateur pour le Parlement en ce qui concerne le budget à long terme » c’est-à-dire le Cadre financier pluriannuel (CFP) qui dépend politiquement prioritairement aujourd’hui d’un accord entre les États membres (même si le Parlement participe à l’adoption du règlement qui contient formellement le CFP).

->Contrôle budgétaire

Réunion annuelle des collèges de la Commission et de la Cour des comptes

Le 13 novembre les collèges de la Commission européenne et de la Cour des comptes européenne se sont rencontrés à Bruxelles pour la réunion annuelle entre ces deux institutions de l’UE. Elles ont à cette occasion « réaffirmé leur engagement à poursuivre une coopération constructive en tant que pouvoirs exécutif et de contrôle de l’UE, tout en explorant parallèlement les moyens d’approfondir leur collaboration dans le plein respect de leurs rôles respectifs ».

Approbation par le Parlement de deux nominations à la Cour des comptes

Le 22 novembre 2023, après leur audition par la Commission du contrôle budgétaire, le Parlement a approuvé la nomination à la Cour des comptes européenne de deux membres : un nouveau membre, le Finlandais Petri Sarvamaa (v. le rapport de la Commission du 9 novembre), qui était député européen depuis plus de dix ans, et le renouvellement du mandat de la Belge Annemie Turtelboom (v. le rapport de la Commission du 9 novembre), qui avait occupé plusieurs postes ministériels nationaux et communautaires entre 2008 et 2016.

->EURO

Christine Lagarde lance son plan pour l’euro numérique

Après deux ans de travaux d’étude (voir le rapport de la BCE du 18 octobre 2023 et les propositions de règlement de la Commission n° 368 et 369 du 28 juin 2023), et conformément à ce que la Présidente Lagarde avait annoncé le 18 octobre 2023 après la décision en ce sens du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne, débute le 1er novembre 2023 une phase préparatoire au lancement d’un euro numérique. C’est la deuxième phase du projet. Il s’agirait d’une monnaie numérique de banque centrale, qui serait équivalente aux espèces, mais sous forme électronique. L’euro numérique viendrait en complément des billets et pièces et constituerait une solution de paiement supplémentaire.

->Fiscalité

Le Parlement donne un avis positif sur plusieurs textes réformant la TVA en matière de numérique

Le 22 novembre 2023, le Parlement, interrogé pour consultation (la procédure législative étant spéciale puisqu’elle requiert l’unanimité de États membres en matière de fiscalité) a adopté plusieurs textes complétant la législation européenne de la TVA pour l’adapter à « l’ère du numérique ». Il a approuvé la proposition amendée de la Commission du 8 décembre 2022 de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne les règles en matière de TVA adaptées à l’ère numérique et a aussi approuvé sa proposition du 17 mai dernier modifiant la même directive à propos des assujettis, des régimes particuliers concernant les ventes à distance de biens importés et la déclaration et le paiement de la TVA à l’importation.  Il a de la même façon approuvé sa proposition du 8 décembre 2022 amendée de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) n°904/2010 en ce qui concerne les modalités de coopération administrative.

->États-membres

Crise budgétaire ; l’Allemagne lève son frein à l’endettement

Le 23 novembre 2023, le gouvernement allemand demande au Parlement de reconnaître une « situation d’urgence » pour adopter un budget additionnel pour 2023. La situation a été précipitée par une décision particulièrement sévère (mais pas surprenante) rendue le 15 novembre par la Cour constitutionnelle fédérale à propos de la technique imaginée par l’exécutif pour escamoter une partie de l’endettement afin de se laisser les marges de manœuvre (immenses) nécessaires pour financer la réorganisation complète du pays (économique, militaire et environnementale). Elle avait été critiquée dans un rapport publié le 5 septembre 2023 de la Cour fédérale des comptes, institution d’audit non juridictionnelle située à Bonn, qui avait logiquement critiqué en juin 2023 les propositions de la Commission européenne d’assouplir le PSC à propos de l’endettement public. Cette Cour comptabilisait 29 fonds hors budget, certains datant de 1950 mais leur nombre et surtout leur volume ayant explosé ces dernières années. En effet la loi de finances 2021 – mise en cause devant la Cour constitutionnelle – avait décidé de transférer un crédit non utilisé de 60 Md€, destiné à l’origine à lutter contre le Covid-19, dans un fonds spécial « pour la transformation et le climat », qui a servi à financer hors budget de larges subventions aux entreprises et aux ménages. Ce système de financement hors bilan permettait de contourner le « frein à la dette » (Schuldenbremse, constitutionnalisé en 2009) puisque ces milliards n’étaient pas pris en compte pour calculer la limite des déficits publics à 0,35 % du PIB. Cette technique de fonds spéciaux a été aussi utilisée pour financer les 100 Md€ d’un vaste plan de réarmement suite à l’invasion russe de l’Ukraine (2022) après le fonds de stabilisation économique de 200 Md€ annoncé en 2020. Elle a atteint 147 Md€ en 2023 (contre moins de 50 Md€ de dette publique). C’est le transfert entre deux fonds sans rapport par la loi de finances de 2021 qui a été déclaré inconstitutionnel par la Cour, privant le gouvernement du financement de sa politique pour le climat.

INTERNATIONAL
->Monnaies

La Banque d’Angleterre maintient ses taux d’intérêt à leur plus haut niveau

Le 2 novembre 2023, dans un contexte général de fin du cycle de resserrement des politiques monétaires (la Banque du Japon n’étant toujours pas convaincue que l’inflation nationale soit durable et stable à 2 % : voir la présente chronique d’octobre 2023), et après la Banque centrale européenne et la Réserve fédérale américaine, la Banque d’Angleterre a opté pour le statu quo en maintenant son principal taux directeur à 5,25 %, ce qui constitue quand même leur plus haut niveau en 15 ans.

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Aurélien BAUDU (Fiscalité et procédure fiscale – Coordination)

Fabrice BIN (Europe – International)

Florent GAULLIER-CAMUS (Budget de l’État et opérateurs – Comptabilité publique)

Léonard GOURBIER (Management public)

Matthieu HOUSER (Finances locales)

Yves TERRASSE (Finances sociales)