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REPÈRES (JUILLET 2024) – REVUE-GFP N°5 – 2024

BUDGET DE L’ÉTAT ET DES OPÉRATEURS
->Données générales sur les finances publiques

En juillet 2024, les prix à la consommation augmentent de 2,3 % sur un an

Dans une note publiée le 31 juillet 2024, l’INSEE précise que sur un an, selon l’estimation provisoire réalisée en fin de mois, les prix à la consommation augmenteraient de 2,3 % en juillet 2024, après +2,2 % le mois précédent. Cette légère hausse de l’inflation s’expliquerait par une forte accélération des prix de l’énergie, notamment ceux du gaz, qui serait en partie compensée par un ralentissement des prix des services et de l’alimentation.

Sur un mois, les prix à la consommation, hors énergie, augmenteraient légèrement en juillet 2024 (+0,1 %), au même rythme qu’au mois précédent. Les prix des services augmenteraient, tirés par la hausse saisonnière de ceux des transports et de l’hébergement. À l’inverse, les prix des produits manufacturés se replieraient sous l’effet des soldes d’été. Les prix de l’alimentation seraient en légère baisse sur un mois, et ceux du tabac seraient stables.

Deuxième trimestre 2024 : le PIB augmente de 0,3 %

Selon une note publiée le 30 juillet 2024, l’INSEE indique que le PIB augmente au deuxième trimestre (+0,3 % après +0,3 % au trimestre précédent). La demande intérieure repart légèrement à la hausse et contribue positivement à la croissance du PIB ce trimestre (+0,1 point après 0,0 point au premier trimestre 2024). La consommation des ménages est stable ce trimestre (0,0 % après -0,1 %). La contribution du commerce extérieur à la croissance est également positive au second trimestre 2024 (+0,2 point après +0,3 point). En effet, les importations sont stables (0,0 % après -0,3 %), et les exportations sont toujours dynamiques (+0,6 % après +0,7 %).

La situation et les perspectives des finances publiques selon la Cour des comptes

La Cour des comptes publie, ce 15 juillet 2024, son rapport annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques. Alors que la situation économique s’est normalisée et que l’inflation s’est résorbée, la France se trouve aujourd’hui dans une situation préoccupante. Le déficit public a atteint 154 Md€ et 5,5 points de PIB en 2023, dégradé de 0,7 point par rapport à 2022 et de 0,6 point par rapport à la prévision du Gouvernement. Sa situation contraste fortement avec celle de ses principaux partenaires européens, qui sont parvenus à stabiliser, voire à réduire significativement leur déficit public en 2023.

Pour la Cour, la dette publique, emportée par la réitération des déficits publics et par son poids, affiche un coût de plus en plus élevé qui contraint toutes les autres dépenses de l’État, obère la capacité d’investissement de ce dernier et l’expose dangereusement en cas de nouveau choc macroéconomique. Cette situation est d’autant plus préoccupante que la trajectoire de réduction du déficit public n’inclut pas les investissements indispensables qui devront être réalisés pour faire face au changement climatique. La Cour des comptes considère que la France doit maintenant consentir des efforts difficiles pour retrouver le contrôle de ses finances publiques et honorer ses engagements, tant vis-à-vis des États membres de la zone euro que des générations futures, à la faveur d’une stratégie crédible qui préserve la croissance et la cohésion sociale.

Alors que la réforme des règles budgétaires européennes entre en vigueur et que la Commission européenne entend ouvrir une procédure pour déficit excessif à son encontre, la France gagnerait à afficher clairement, sur la base de prévisions plus réalistes et de réformes crédibles, la manière dont elle entend reprendre le contrôle de ses finances publiques et honorer ses engagements européens. Lors de la présentation de ce rapport sur la chaine LCP-Assemblée nationale, le Premier président de la Cour des comptes a indiqué : « Quel que soit le gouvernement demain, il devra traiter la situation des finances publiques et faire en sorte que nous entamions notre effort de désendettement ».

À noter que la Cour des comptes consacre cette année un chapitre spécifique à l’urgence climatique. Les investissements nécessaires à l’atteinte de nos engagements climatiques sont estimés à un surcroît de plus de 60 Md€ par an en 2030, alors que les recettes fiscales assises sur les carburants devraient rapidement s’éroder et que la croissance pourrait structurellement fléchir chaque année du fait des coûts de la transition et du réchauffement. Aucun de ces trois facteurs n’est aujourd’hui intégré à la stratégie de finances publiques alors qu’ils pourraient avoir un impact à la hausse de l’ordre de 7 points de PIB sur le ratio de dette publique en 2030. Il apparaît ainsi urgent de mieux articuler transition énergétique et programmation des finances publiques. Or, les difficultés d’acceptabilité sociale ont paralysé les grands choix politiques concernant la répartition de l’effort, avec le risque que les générations futures héritent à la fois de la dette climatique et de la dette financière contractée pour y faire face.

->Budgets des pouvoirs publics

Les comptes et la gestion des services de la présidence de la République (exercice 2023)

Dans un rapport publié le 29 juillet 2024, et comme chaque année, la Cour des comptes a contrôlé les comptes et la gestion des services de la Présidence de la République. La Cour réalise, depuis 2018, un contrôle approfondi sur un domaine d’activité particulier de la Présidence de la République. Après la sécurité (2020), l’immobilier et le patrimoine (2021) et les systèmes d’information et de communication (2022), la Cour a examiné cette année la direction des opérations.

Au terme de l’exercice 2023, le résultat en comptabilité générale est déficitaire de 8,3 M€ alors qu’il était équilibré en 2022 (+0,3 M€). Contrairement aux derniers exercices, la dotation en loi de finances initiale (110,5 M€) et les produits réalisés (4,3 M€) n’ont pas permis de couvrir les dépenses, en hausse à 124,2 M€ (+10,9 M€), du fait de la progression des dépenses liées aux déplacements et d’une forte inflation nationale et internationale. Pour équilibrer le budget, un prélèvement sur trésorerie de 9,5 M€ a dû être opéré.

La Cour des comptes constate cependant que les améliorations constatées au cours des années précédentes en matière de gestion budgétaire et comptable se sont poursuivies en 2023. Après la consolidation du contrôle interne financier, les premiers travaux destinés à construire une carte des risques métiers et le plan d’action correspondant ont débuté. L’enjeu est désormais de mettre en œuvre ces procédures mais aussi d’appliquer les recommandations issues des audits menés par le contrôle interne.

Les progrès organisationnels et de gestion consécutifs aux observations de la Cour sont réels même s’il demeure des marges d’amélioration, s’agissant notamment de certains avantages accordés aux agents (logements, véhicules de fonction, restauration) ou encore de la gestion du personnel de sécurité de la Présidence de la République.

Concernant le sujet spécifique lié à la direction des opérations, les 214 agents de cette direction sont chargés de la mise en œuvre des déplacements, réceptions et événements de la Présidence, ainsi que de l’intendance générale du Palais.

L’activité de la direction a très fortement repris après les années marquées par la crise sanitaire et la campagne électorale de 2022. Ainsi, le budget initial de 2023 a ainsi été augmenté de près de 45 % en cours d’exercice et la quasi-totalité des crédits a été consommée, soit plus de 31 M€ (contre 22 M€ en 2022). Cette hausse des dépenses s’explique principalement par le nombre d’événements et les répercussions de l’inflation, notamment sur les deux principaux postes que sont les transports et l’hébergement. Pour les réceptions, elle résulte non seulement de l’accroissement de l’activité, mais aussi de l’augmentation du nombre d’invités, dans un contexte de rénovation des grandes cuisines qui a conduit à recourir plus fréquemment à des prestations de traiteur.

La Cour des comptes relève que les procédures mises en place et les règles édictées pour contenir les dépenses traduisent une démarche volontariste de cadrage des activités (organisation des missions préparatoires, chaîne d’engagement de la dépense, refacturations, retours d’expérience, etc.). Les magistrats financiers soulignent toutefois que ces procédures se heurtent toutefois aux aléas affectant l’agenda du Président, au choix d’organiser ou non des déplacements et événements mais aussi à des problèmes d’organisation interne. Dans un contexte d’augmentation des coûts et afin d’assurer durablement l’équilibre du budget de la Présidence de la République, le rapport indique que les efforts doivent être poursuivis et confortés pour mieux anticiper les événements, améliorer la circulation de l’information entre les services, sensibiliser certains acteurs aux enjeux budgétaires et à l’impact de certains choix, disposer d’outils de travail partagés et encadrer les dépenses de déplacement et de réception.

L’Agence des participations de l’État

Dans un rapport publié le 16 juillet 2024, la Cour publie un rapport d’observations définitives sur L’Agence des participations de l’État (APE) qui gère depuis 2004 les participations financières de l’État et incarne ainsi « l’État actionnaire ».

Rattachée directement au ministre en charge de l’économie, c’est une structure de taille modeste (54 agents), mais qui joue un rôle important pour les cessions, les acquisitions et la gouvernance des participations financières de l’État de son périmètre : celles-ci, très présentes dans les secteurs de l’énergie, des transports et de l’industrie, sont évaluées à 160 Md€ début 2023.

L’enquête de la Cour, qui a porté sur les exercices 2018 à 2022 avec actualisation de certains chiffres à 2023, montre que l’APE est organisée de manière efficiente et que ses moyens sont maitrisés, malgré quelques points d’attention. La Cour observe enfin que l’exercice des missions de l’APE liées à la gouvernance des participations pourrait être modernisé et formule sept recommandations au total, qui ont appelé, de la part du Commissaire aux participations de l’État, quelques observations. Selon ce dernier, la plupart des recommandations formulées par la Cour devront en tout état de cause faire l’objet de travaux et d’analyses complémentaires. Ces travaux devront être conduits notamment avec la Direction du Budget (s’agissant par exemple de la comptabilisation en recettes du compte d’affectation spéciale « PFE » des dividendes reçus des participations de l’État, v. recommandation n°2, ou de l’étude d’une évolution de l’outil budgétaire utilisé par l’APE pour ses interventions en capital, v. recommandation n°3). L’affectation des dividendes au compte d’affectation spéciale « PFE » nécessite de modifier la LOLF, tandis que la suppression des comptes combinés de l’État actionnaire (v. recommandation n°4) nécessite de réformer la loi, et de définir quel serait le meilleur format pour les remplacer. Enfin, s’agissant de la « mise en place d’une cellule et des outils d’analyse des données de reporting des entreprises du portefeuille au format ESRS pour aller vers la publication d’un rapport sur la responsabilité sociétale des entreprises consolidé et audité » (v. recommandation n°7), cela renvoie à la question des moyens (humains, financiers, et en l’espèce de systèmes d’information).

La Garde républicaine

Le 18 juillet, la Cour des comptes a rendu publiques des observations définitives sur la Garde républicaine. Cette dernière est chargée de deux missions principales : participer aux services d’honneur et assurer la sécurisation de neuf palais nationaux (Palais de l’Élysée, Assemblée nationale, Sénat, Hôtels de Matignon, de Brienne, Quai d’Orsay, Conseil constitutionnel, hôtel de Roquelaure, Palais de justice de Paris sur l’île de la Cité). Des évènements récents aux États-Unis, avec l’attaque contre le Capitole à Washington en janvier 2021, ont rappelé le caractère essentiel que revêtait la mission de protection des palais nationaux. Pour remplir ces missions, elle mobilise 3 000 gardes aux compétences variées. Face à des défis nombreux (des unités sont sur-mobilisées et d’autres sont sous-utilisées, budget initial insuffisant, etc.), le plan d’action 2023-2026 vise à résoudre ces problèmes. Les 400 gardes des palais, placés sous un commandement unique depuis 2021, opèrent dans des « maisons militaires » aux fonctionnements variés et reçoivent des primes versées par les autorités affectataires sans souci de transparence. La gestion des ressources humaines a évolué mais nécessite encore des améliorations, notamment par une formation uniformisée et un renforcement des synergies. À côté de ces compagnies fortement sollicitées, plusieurs unités de la Garde républicaine sont davantage préservées, comme le régiment de cavalerie, les formations musicales ou les pelotons d’intervention, donnant ainsi l’image d’une Garde républicaine « à deux vitesses ». En 2022, l’exercice des missions de la Garde républicaine a coûté 230 M€. Des ajustements budgétaires en cours visent à clarifier les besoins annuels et à établir une doctrine sur l’utilisation des recettes affectées, issues des prestations rémunérées. La volonté de la Garde de développer des activités rémunérées, sans porter atteinte aux missions protocolaires, doit être encouragée mais recentrée sur les principales opérations et mieux valorisée. De même, la tarification des prestations n’a pas été revue depuis dix ans et mériterait d’être actualisée et adaptée, afin notamment de limiter certains rabais consentis et de laisser davantage la faculté à la Garde républicaine pour majorer ponctuellement certains tarifs.

->Budgets des opérateurs

L’Office français de la biodiversité

Dans un rapport publié le 17 juillet 2024, la Cour publie un rapport d’observations définitives sur l’Office français de la biodiversité (OFB) qui a été créé en 2019 afin de regrouper au sein d’un même établissement toutes les expertises de gestion, de connaissance et de protection des espèces et milieux aquatiques et terrestres (hors agences de l’eau). Dans son rapport, la Cour des comptes considère que l’objectif de regroupement ayant été atteint, le travail doit désormais se poursuivre dans l’objectif notamment de conforter la stratégie de l’établissement, d’asseoir sa gouvernance, d’ancrer les indicateurs de performance dans la préservation de la biodiversité et d’améliorer la gestion de l’établissement.

La Cour des comptes constate que la situation financière de l’OFB a été confortée par l’attribution de financements spécifiques récents (plan de relance, observatoire de l’éolien en mer…). En 2022, les produits ont augmenté plus rapidement que les charges, la capacité d’autofinancement est positive et les indicateurs bilanciels se sont améliorés. Cette tendance s’inverse cependant en 2023 avec le retour d’un exercice à nouveau déficitaire. Les magistrats financiers indiquent que l’établissement doit donc mieux appréhender le caractère conjoncturel de ces financements pour stabiliser sa situation. L’OFB a fait le choix d’une organisation financière classique, conforme au cadre règlementaire. Cependant, le contrôle interne financier mis en place postérieurement à la fusion met en lumière des pistes de progrès, notamment dans l’articulation entre les différents acteurs. Des améliorations notables ont été réalisées en matière de sincérité des comptes. Mais des marges de progression demeurent, en particulier pour fiabiliser le bilan en rapprochant inventaire physique et comptable, en traitant les dettes et créances anciennes et en veillant au rattachant des opérations à l’exercice. In fine, la Cour des comptes formule sept recommandations.

->Patrimoine de l’État

Vente aux enchères des biens mobiliers en 2023

Début juillet 2024, la Direction Nationale d’Interventions Domaniales (DNID) a annoncé un nouveau record pour les ventes aux enchères des biens mobiliers : 102,1 M€ pour les 311 ventes organisées au cours de l’année 2023.

COMPTABILITÉ PUBLIQUE

->Responsabilité des gestionnaires publics

La chambre du contentieux de la Cour des comptes rend trois nouveaux arrêts

La chambre du contentieux de la Cour des comptes a rendu trois nouveaux arrêts, en juillet 2024 : le 2 juillet, Office du tourisme de Strasbourg et de sa région (OTSR) ; le 5 juillet 2024, Régie métropolitaine Parcub, devenue Metpark ; le 23 juillet, Société anonyme d’économie mixte pour la gestion et l’animation du parc de loisirs de Saint-Cyr (SAEM SAGA).

Par le premier arrêt précité « Office du tourisme de Strasbourg et de sa région (OTSR) », les magistrats financiers ont sanctionné le directeur de l’organisme pour avoir engagé sans aucune habilitation ou au-delà du plafond de la délégation consentie par le président de cet Office, des dépenses relatives à des manifestations organisées tant en France qu’à l’étranger. Par exemple, lors du marché de Noël organisé à New-York en décembre 2019, le directeur avait signé pour plus de 400 000 € de factures valant engagement de dépenses supportées par une filiale de droit américain de l’office créée à cette occasion alors qu’il ne disposait d’aucune délégation de signature en matière de dépense pour cette entité juridique distincte de l’association OTSR. Le directeur a finalement été condamné à une amende de 1 500 €, montant inférieur au quantum de peine maximal possible en l’espèce pour cette infraction, qui peut aller jusqu’à un mois de rémunération en application du second alinéa de l’article L. 131-16 du code des juridictions financières.

Dans le deuxième arrêt précité « Régie métropolitaine Parcub, devenue Metpark », les magistrats financiers ont sanctionné les anciens directeur et directeur financier de la Régie. Outre l’engagement de dépenses sans habilitation, imputable au seul directeur, la juridiction a jugé qu’ils avaient commis une faute grave de gestion ayant entraîné un préjudice financier significatif en compromettant le recouvrement de créances de l’établissement. Le préjudice financier qui découle de cette faute de gestion s’élève selon la Cour à 376 600 € pour le montant imputable au directeur et à 348 400 € pour celui qui relève du directeur financier. Ces montants ont été estimés significatifs au regard de la moyenne des produits de gestion (19,4 M€) constatés sur les exercices auxquels la faute de gestion était rattachable. Eu égard à la gravité des faits, de l’importance du préjudice, la Cour a décidé de prononcer une amende de 2 500 € à l’encontre de l’ancien directeur. La Cour a fixé le montant de cette somme en raison de la situation personnelle de l’ancien directeur : « au vu des éléments qu’il a communiqués au cours de la procédure et pendant l’audience publique, la situation de M. X, actuellement sans emploi et en fin de droits au titre de l’indemnisation du chômage ». La Cour a prononcé une amende de 8 000 € à l’encontre de l’ancien directeur financier.

Et par le troisième arrêt précité « Société anonyme d’économie mixte pour la gestion et l’animation du parc de loisirs de Saint-Cyr (SAEM SAGA) », la Cour a sanctionné l’un des présidents renvoyés ainsi que le directeur général de la SAEM. Les deux infractions relevées, faute grave ayant causé un préjudice financier significatif et octroi d’un avantage injustifié, concernent des faits se rapportant aux conditions d’exécution de la convention de délégation de service public. La Cour a notamment constaté l’existence d’un faute grave ayant entrainé un préjudice financier d’environ 368 000 € au détriment du délégataire. Ce préjudice a été jugé significatif au regard des fonds propres ainsi que du chiffre d’affaires annuel de la structure. Le directeur général de la SAEM SAGA a été condamné à une amende de 4 000 €. L’un des deux présidents de cette société a été condamné à une amende de 1 000 €. La Cour a notamment tenu compte de circonstances atténuantes, du fait qu’il n’avait pas été alerté de l’irrégularité de la situation pendant tout l’exercice de son mandat. À noter que le second président renvoyé a été dispensé de peine. La juridiction financière a admis de larges circonstances atténuantes liées à la brièveté de sa présidence assumée pendant la crise sanitaire, à l’absence d’alerte sur les irrégularités commises et à sa volonté d’y mettre un terme par la préparation d’une nouvelle convention de DSP.

FINANCES LOCALES
->Données générales sur les finances locales

Premier fascicule de la Cour des comptes de son rapport annuel sur les finances locales

La Cour des comptes, dans son traditionnel rapport consacré aux finances publiques locales, note « une situation financière favorable pour le bloc communal, mais plus délicate pour les départements et les régions ». En termes de ressources, celles-ci évoluent de façon moindre que prévues pour les départements et les régions, mais elles s’accélèrent pour le bloc communal. Les départements ont été marqué en 2023 par les conséquences du retournement du marché immobilier (-4,5 Md€ de recettes de DMTO toutes collectivités confondues). La TVA encaissée s’avère également moindre que prévue. À périmètre constant, les encaissements de recettes de TVA ont au contraire moins augmenté (+1,9 %) que le PIB en valeur. Côté dépenses, sans surprise, le même constat que celui de la DGCL (v. infra.) est dressé avec une augmentation de +6,1 % à périmètre constant contre +5 % en 2022. La raison de cette hausse sont les mêmes qu’en 2022 avec l’impact de l’inflation le prix des achats de biens et services (en particulier, eau, énergie, chauffage et aliments).

Rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques

La Cour des comptes pointe une dérive des dépenses de fonctionnement et d’investissement des collectivités territoriales pour 2023 avec des dépenses plus élevées que prévues. Ainsi, par rapport à la loi de programmation des finances publiques, le surplus est supérieur à 4 Md€ alors que « les dépenses ont été inférieures sur le budget de l’État (-6 Md€) et des organismes divers d’administration centrale (-2 Md€) ». Mais la moitié de la hausse relève des dépenses d’investissement, ce qui pose la question de l’efficacité et de la pertinence de ces dépenses publiques locales. Effectivement, doit-on considérer qu’un surplus de 2 Md€ en dépense d’investissement participe à la croissance économique ? La Cour des comptes réitère, par ailleurs, sa doctrine traditionnelle en finances publiques locales en considérant que les dépenses des collectivités territoriales sont corrélées avec le niveau de leurs recettes. Dès lors, cela signifie qu’un ralentissement des dépenses de fonctionnement nécessite une baisse des recettes. Ce rapport alerte également sur la situation financière de 2024 avec un fort dynamisme sur les premiers mois de l’année alors que la loi de programmation prévoit une baisse en volume de 0,5 % des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales en 2024.

Les finances des collectivités locales en 2023 selon la DGCL

La DGCL dresse un constat nuancé de la situation financière en 2023 avec une année plus difficile que les deux années précédentes. De façon classique, l’analyse commence par l’étude de l’épargne brute, qui recule globalement de -9 % avec une problématique particulière pour les départements (-40 %). L’impact de la hausse des dépenses de fonctionnement explique en grande partie ce constat. L’inflation continue à produire ses effets négatifs avec des hausses réelles : +4,9 % pour les communes et +7,7 % pour les EPCI à fiscalité propre, +6,4 % et +4,9 % pour les départements et les régions. Les achats et charges externes progressent particulièrement avec une hausse de +9,6 %, après +8,8 % en 2022 et +5,6 % en 2021. Les dépenses d’investissement continuent à augmenter mais de façon moindre si on déduit l’effet prix. Paradoxalement, les collectivités ont moins recouru à l’emprunt avec une baisse de -2,9 %, soit un volume emprunté de 16,1 Md€ en 2022.

->Contrôle des budgets

Décret du 16 juillet 2024 sur la mise en place d’annexes budgétaires

Le décret du Premier ministre du 16 juillet 2024 est pris en application de l’article 191 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 qui instaure l’obligation de réaliser, pour les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux de plus de 3 500 habitants, une nouvelle annexe à leur compte administratif ou leur compte financier unique intitulé « Impact du budget pour la transition écologique » à compter de l’exercice 2024. Ce décret a été pris après l’avis du Conseil national d’évaluation des normes du 4 juillet 2024 et de l’avis du comité des finances locales du 9 juillet 2024. Ce décret fournit un certain nombre d’informations comptables. Il rappelle également que les objectifs de transition écologique s’inscrivent dans la logique du droit de l’Union européenne avec 6 axes : axe 1° « atténuation du changement climatique » ; axe 2° « adaptation au changement climatique et prévention des risques naturels » ; axe 3° « gestion des ressources en eau » ; axe 4° « transition vers une économie circulaire, gestion des déchets, prévention des risques technologiques » ; axe 5° « prévention et contrôle des pollutions de l’air et des sols » ; axe 6° « préservation de la biodiversité et protection des espaces naturels, agricoles et sylvicoles ». L’extension de l’analyse environnementale des dépenses d’investissement à compter de 2027 devra être confirmée par le bilan de la mise en œuvre de l’état annexé prévu par le III de l’article 191 de la loi de finances initiales pour 2024 et sera conditionnée à la mise à disposition des éléments de méthodologie associés.

->Dépense publique locale

Financement de la transition : quelles marges de manœuvre pour les collectivités locales ?

L’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), dans une note de juillet 2024, fait le point sur l’état des investissements publics pour transition écologique. L’Institut constate de façon globale que les investissements climatiques des collectivités territoriales ont progressé. Mais ces dépenses sont toujours insuffisantes par rapport aux objectifs. Ainsi, les dépenses des collectivités locales devraient avoisiner les 30 Md€ en 2030, soit 18 à 23 Md€ de plus qu’en 2023. Conserver le dispositif des Certificats d’économies d’énergie (CEE) tel qu’il existe aujourd’hui donnerait une mobilisation stable de leur part à près de 5 Md€.

FINANCES SOCIALES
->Situation des comptes sociaux

Rapport très alarmant de la Cour des Comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques

Après la fin du temps de réserve qu’elle s’était imposée pendant la période électorale, la Cour des comptes a publié son rapport 2024 sur la situation et les perspectives des finances publiques. Elle y fait un double constat : l’année 2023 a été très mauvaise en matière de finances publiques, puisque le déficit au sens de Maastricht s’est élevé à 5,5 % du PIB, en dérapage de 0,6 points de PIB par rapport aux prévisions, alors même que l’environnement économique se normalisait ; la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 adoptée en décembre 2023 est caduque, ce qui a obligé le Gouvernement à communiquer, en avril dernier, à la Commission européenne, un nouveau scénario dans le cadre du pacte de stabilité dont les objectifs, au demeurant peu ambitieux en terme de réduction du déficit et de stabilisation de la dette, vont néanmoins demander des efforts de rigueur sans précédent. S’agissant spécifiquement des finances sociales, pour les exercices passés jusqu’à 2023, la Cour prend en compte les données avalisées par la dernière Commission des Comptes de la Sécurité sociale (v. Repères, mai 2024) et elle pointe le fait que les baisses d’impôt et de cotisations sociales depuis six ans ont complètement modifié la structure des recettes des différentes administrations publiques : ainsi la part de la TVA dans les recettes de l’État a-t-elle fortement diminué au profit des collectivités locales et des administrations de Sécurité sociale ; elle souligne également que les objectifs de dépenses de la Sécurité sociale, en particulier de l’ONDAM, n’ont pas été tenus malgré la sortie de la crise sanitaire. Pour 2024, la Cour des comptes fait état de risques très importants qui fragilisent déjà la nouvelle trajectoire : ainsi, dans le domaine de la santé, la réalisation de 3,5 Md€ d’économies pour limiter la croissance de l’ONDAM à 3,2 % en 2024 n’est pas acquise alors même qu’à mi-année les soins de ville enregistrent à nouveau un dérapage alarmant (voir infra le 2e avis du Comité d’alerte de l’ONDAM) ; il s’ensuit que la dégradation anticipée de 0,3 points de PIB du déficit des administrations de Sécurité sociale pourrait compromettre l’objectif de réduction à 5,1 % du PIB du déficit global en 2024. Enfin, pour les années suivantes (2025 à 2027), au-delà des incertitudes sur les hypothèses macroéconomiques, la Cour des comptes ne manque pas de relever que l’effort d’économie de 50 Md€ à réaliser d’ici 2027 n’est pas documenté, les seules économies dont les montants ont été précisés sont celles procurées par la réforme des retraites (3,5 Md€) et de l’Assurance chômage (4,2 Md€ en 2027).

->Politiques d’allègement des charges et coût du travail

Retard pour la réforme des cotisations sociales des indépendants

Comme pour la réforme de l’Assurance chômage, le projet de refonte des cotisations sociales des indépendants et des professions libérales va faire les frais de la dissolution. Partant de la constatation que, à revenus équivalents par rapport à ceux des salariés, les indépendants payent plus de taxes (CSG et CRDS) mais acquièrent moins de droits à pension, un projet de décret devait modifier l’assiette de leurs cotisations et prélèvements sociaux : les indépendants auraient vu leurs cotisations de CSG et de CRDS baisser, mais, en contrepartie, leurs cotisations maladie et surtout vieillesse augmenter pour améliorer leurs droits à la retraite. Longtemps différée en raison des effets de transferts qu’elle risquait d’induire au sein des indépendants, la réforme, qui aurait dû s’appliquer au 1er janvier 2025, risque de ne pas voir le jour de sitôt, au grand désarroi de l’Union des entreprises de proximité (UP2) qui la soutenait.

Les freins à la progression salariale selon le Haut conseil pour le financement de la protection sociale

Un document de travail du Haut conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS) réalisé à partir d’une enquête auprès des chefs d’entreprise met en lumière l’impact potentiel des dispositifs socio-fiscaux mis en place autour du SMIC dans le cadre des allègements de charges. Le « coin socio-fiscal » est constitué par l’écart entre le coût du travail supporté par l’employeur et le revenu disponible net d’impôt après transferts (prime d’activité, APL, etc…) perçu par le salarié ; ainsi, pour une personne seule, cet écart augmente graduellement de 15 % au niveau du SMIC à 53% au niveau de 3 SMIC et constitue de ce fait un frein à la progression salariale et au redéploiement des grilles de salaires, car une revalorisation salariale requiert un supplément de valeur ajoutée disproportionné par rapport au bénéfice qu’en retire le salarié ; cela peut ainsi contribuer à alimenter le phénomène de « trappe à bas salaires » bien que la réalité de celui-ci soit fasse l’objet de discussions entre les économistes. L’enquête révèle que parmi les entreprises qui rencontrent des freins à la progression des salaires au voisinage du SMIC, la hausse du coût du travail du fait de la diminution des allègements généraux de cotisations sociales constitue l’obstacle majeur à des revalorisations pour 43 % d’entre elles. Un tiers de ces entreprises concernées considère que la « Prime de partage de la valeur » (ex « prime Macron » représente une bonne solution pour contourner ce frein. Toutefois, l’enquête révèle que les dispositifs socio-fiscaux autour du SMIC ne sont pas les seuls responsables du frein à la progression salariale, mais qu’il faut prendre également en compte les difficultés à relever les prix (forte concurrence, prix administrés, pression qu’exerce la RSE sur les prix et les salaires, exigences de la qualité de vie au travail ou organisation de la production dans les entreprises).

->Politique de l’emploi et de la formation

Coup de frein sur le compte-personnel de la formation

Selon un rapport de la DARES, les entrées en formation dans le cadre du CPF se sont élevées à 1.335.900 en 2023, soit une baisse de 28 % par rapport à 2022, avec un repli plus marqué chez les utilisateurs ayant un niveau inférieur au Bac (-38 %). Cette diminution fait suite à plusieurs modifications importantes intervenues à la fin 2022 : renforcement de la sécurité pour l’inscription en ligne, déréférencement de certaines formations, contrôle accru sur les organismes de formation qui doivent être certifiés « qualipi ». C’est le domaine des transports qui continue à rassembler le plus d’entrées, la préparation au permis de conduire représentant à elle seule près du quart des utilisations du CPF. La baisse affecte particulièrement les formations portant sur le développement des capacités d’orientation, d’insertion ou de réinsertion sociale ou professionnelle, avec une chute des formations à la création d’entreprise. Environ 10% des formations CPF sont en partie financées par les personnes, en raison de l’insuffisance de leurs droits.

Les dépenses en faveur de l’emploi et du marché du travail depuis 2017

La DARES a présenté l’évolution des dépenses en faveur de l’emploi et du marché du travail entre 2017 et 2022. En 2022, elles s’élevaient à 178,7 Md€, en diminution de -7,7 % par rapport à 2021, principalement du fait du recul des dépenses en faveur du soutien au revenu (activité partielle) en raison de la sortie de la crise sanitaire. Les dépenses d’incitation à l’embauche (allègements de cotisations, aides sectorielles et géographiques, contrats aidés) représentent le poste le plus important (87,7 Md€) ; viennent ensuite les aides de soutien au revenu (allocations chômage, activité partielle, préretraites) avec 45,6 Md€, les dépenses de formation avec 27,7 Md€, et enfin les primes d’incitation à l’activité (prime d’activité, aide à la création d’entreprise) avec 24,4 Md€. Les dépenses d’accompagnement des personnes (budget de France Travail et des missions locales) représentent un montant de 6,5 Md€.

->Dépenses de santé/Hôpital/Assurance maladie

Rapport charges et produits de l’Assurance maladie pour 2025

Alors que le déficit de l’Assurance maladie reste à un niveau particulièrement alarmant (-11,4 Md€ pour 2024 selon le dernier rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale, v. Repères, mai 2024), la CNAM a présenté ses propositions d’économies pour l’exercice à venir dans son rapport intitulé « Charges et produits pour 2025 », qui doivent servir de cadre pour l’élaboration du projet de LFSS pour 2025. Celles-ci s’élèvent à 1,56 Md€ (contre 1,3 Md€ en 2024), mais dans un contexte de très grande incertitude sur les orientations de la politique de santé et de dépenses sociales du futur gouvernement. Ne proposant pas de remise en cause de la prise en charge à 100 % des affections de longue durée, ni de limitation contraignante des indemnisations d’arrêt de maladie comme évoqué très sérieusement au cours de ces derniers mois, la CNAM s’en tient prudemment à la prise en compte des effets escomptés de la récente convention avec les professions médicales signée le 4 juin dernier (v. Repères, mai 2024). Une économie de 425 M€ est ainsi attendue de l’utilisation accrue de médicaments biosimilaires, ainsi qu’une réduction de 2 % des prescriptions d’arrêts de travail, et sera mis en œuvre une maîtrise accrue des remboursements de transports sanitaires qui ont augmenté de 9% sur un an, grâce au co-transport et à l’utilisation de plateformes de commandes par les hôpitaux. La lutte contre la fraude devrait, de son côté, rapporter 420 M€.

Rapport d’observations définitives sur l’intérim médical dans les hôpitaux publics

La Cour des comptes a publié un rapport d’observations définitives sur le recours à des médecins intérimaires à l’hôpital public, sujet consubstantiel au problème des difficultés à l’accès aux soins. Les dépenses d’intérim médical se sont élevées à 147 M€ en 2022 (2 % des dépenses de personnel hospitalier), en croissance de 25 % par rapport à 2017, s’ajoutant aux dépenses d’heures supplémentaires effectuées par les personnels hospitaliers titulaires, elles-mêmes en forte progression (402 M€ en 2017, soit 5 % de la dépense de personnel). Le nombre de praticiens contractuels a ainsi augmenté de 41 % pendant la période, surtout dans les petits établissements où il peut aller jusqu’à un tiers de l’effectif et dans les départements ruraux, pour pallier l’insuffisance de temps médical disponible et assurer la permanence des soins, et avec une prépondérance dans les spécialités les plus sensibles (médecine d’urgence, anesthésie-réanimation). Cette évolution s’inscrit au demeurant dans le cadre d’un choix d’exercice qui se développe chez de nombreux médecins qui optent pour la pluriactivité. La Cour relève une inflation des rémunérations pratiquées (ainsi jusqu’à 2700€ pour une vacation de 24h en Aquitaine), souvent en dehors du cadre réglementaire. Il s’ensuit plusieurs conséquences : une aggravation du coût financier pour les hôpitaux, d’autant plus importante que l’établissement est petit et dispose d’un faible pouvoir de négociation ; une fragilisation du statut de praticien hospitalier qui devient moins attractif du fait des conditions obtenues par les non permanents ; un affaiblissement du travail en équipe et de la qualité des soins. La Cour souligne les mesures d’encadrement décidées par les pouvoirs publics, à la fois en plafonnant les rémunérations et en améliorant le statut de praticien hospitalier notamment dans le cadre de la loi du 26 avril 2021, mais elle pointe le retard pris à leur application généralisée. Devant la persistance des difficultés, elle rappelle les mesures à mettre en œuvre pour mieux réguler l’emploi médical : mieux organiser l’offre hospitalière (implantation et maintien des établissements), renforcer la territorialisation de cette offre (politique des groupements hospitaliers de territoires), améliorer la connaissance des emplois et des établissements les plus vulnérables. A cette fin, elle présente six recommandations.

La mise en garde du comité d’alerte de l’ODAM sur le dérapage des soins de ville en 2024

Déjà alarmiste dans son premier avis de 2024 (v. Repères, avril 2024), le comité d’alerte de l’ONDAM a rendu le 26 juillet son deuxième avis qui est inquiétant sur l’évolution des dépenses 2024 du sous objectif « soins de ville ». Le dérapage des soins de ville serait de 1,5 points par rapport à l’objectif (progression des dépenses brutes de 4,2%) prévu pour ce sous objectif par la LFSS pour 2024, soit un surcoût de dépenses d’1 Md€. Ce surcoût est imputable à tous les postes : transports sanitaires, honoraires médicaux, actes de biologie, indemnités journalières, médicaments… Ce déficit paraît très difficilement devoir être couvert par la mobilisation des mises en réserve de financements destinés aux établissements de santé, du fait de la situation difficile d’un grand nombre d’hôpitaux, dont le déficit cumulé pour 2023 – bien que non encore exactement connu – pourrait s’élever à 2 Md€.

->Retraites

Avis du Comité de suivi des retraites

Le 11e avis du Comité de suivi des retraites prend en compte les changements de méthode et d’hypothèses que le Conseil d’orientation des retraites a adoptées et ses dernières prévisions qui anticipent un déficit persistant des régimes de retraite, jusqu’à l’horizon 2070 (v. Repères, juin 2024). Une part importante de l’avis est consacrée aux « nouvelles voies d’ajustement ». Il commence par examiner diverses pistes de mobilisation des ressources: soit l’utilisation des réserves du Fonds de réserve des retraites ou de l’AGIRC-ARRCO (220 Md€) dont la finalité est plutôt de constituer un amortisseur de chocs, soit le relèvement du plafond de Sécurité sociale, ce qui rééquilibrerait la situation des régimes de base par rapport aux régimes complémentaire ; il se montre très réservé sur l’augmentation des cotisations, qui pourrait avoir un effet négatif sur l’emploi, ainsi que sur un recours accru aux impôts et taxes affectées, qui se ferait au détriment du financement d’autres politiques publiques. En ce qui concerne l’âge de la retraite, il fait valoir que les résistances à un nouveau report de l’âge légal tiennent aux limites des gains d’espérance de vie à venir, et particulièrement d’espérance de vie en bonne santé, ainsi qu’aux risques accrus de chômage des seniors ; pour autant, il se montre assez favorable à l’objectif d’un rapport stable entre espérance de vie et âge de la retraite. S’agissant du montant de la pension, qui pose la question du niveau de vie relatif des retraités par rapport aux actifs, sont à prendre en considération le niveau de la pension de liquidation et la règle d’évolution de celle-ci après la liquidation, de même que la grande sensibilité de l’équilibre des régimes de retraite à la croissance économique ; le Comité préconiserait un principe d’indexation des droits permettant de les faire évoluer de façon plus progressive et mieux contrôlée, plutôt que le recours à des sous-indexations discrétionnaires comme cela a été pratiqué il y a quelques années, sans écarter la piste d’une hausse de la fiscalité ou de la CSG sur les pensions.

->Famille

Bilan de l’aide sociale à l’enfance en 2022

La DRESS a présenté son rapport 2024 sur l’aide sociale à l’enfance. En 2022, les départements, en charge de cette politique publique via deux moyens principaux d’intervention – les interventions à domicile sous forme d’aides diverses et les mesures d’accueil en dehors du milieu familial – y ont consacré 9,9 Md€, dont 80 % ont été utilisés pour les mesures d’accueil. Le coût de cette politique a augmenté 61% en euros constants entre 1998 et 2022, en même temps que le nombre de jeunes en ASE était multiplié par 1,6 ce qui traduit une augmentation de la proportion de jeunes dans cette situation par rapport à la population globale (22,9 pour mille des jeunes de moins de 21 ans), une part importante de cette progression étant due à celle des mineurs non accompagnés dans le cadre des flux migratoires. L’étude comporte des statistiques sur la répartition géographique des mesures, sur la distribution des différents types de mesures et sur l’origine (judiciaire ou non) des décisions d’action éducative.

->Assurance-chômage

Augmentation de la cotisation AGS

Comme déjà annoncé dans ces colonnes (v. Repères, mai 2024), après un relèvement de 0,15 % à 0,20 % du taux de cotisation employeur au 1er janvier 2024, l’Association de garantie des salaires (AGS) a décidé de porter celui-ci à 0,25 % à partir du 1er juillet. Cette augmentation est rendue nécessaire par l’augmentation continue des défaillances d’entreprises (+19 % au premier trimestre 2024 par rapport à la même période de l’année précédente, ce qui va au-delà d’un simple rattrapage par rapport à la période de la Covid-19). Cette hausse de 0,5 % ne sera pas compensée, comme l’espéraient les organisations patronales, par une baisse équivalente de la cotisation chômage, faute d’accord sur la convention UNEDIC.

Prolongation temporaire des règles de l’Assurance chômage

À défaut d’accord conventionnel qui puisse être avalisé par le Gouvernement, les règles actuellement en vigueur pour l’Assurance chômage, qui devenaient caduques au 30 juin 2024, ont été prolongées à deux reprises, et en dernier lieu jusqu’au 31 octobre 2024 par décret (v. Décret n° 2024-853 du 30 juillet 2024, JORF, 31 juillet 2024). Ce décret de « jointure » comporte de nouvelles dispositions sur le bonus-malus des contrats courts, mais n’intègre plus le durcissement des modalités d’indemnisation, qui avait été abandonné par le Premier Ministre après le premier tour des élections législatives (v. Repères, juin 2024). Par ailleurs, les syndicats ont fait savoir qu’ils s’opposeraient à une reprise de l’accord de novembre 2023 pourtant accepté par la CFDT, FO et la CFTC et qu’il fallait repartir des nouvelles bases contenues dans le programme du Nouveau Front populaire.

->Lutte contre la pauvreté/Revenu universel

L’INSEE publie les nouveaux chiffres de la pauvreté

L’INSEE a publié deux études sur la situation de la pauvreté en France en 2022-2023. La première fait état d’un nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté monétaire en 2022 (calculé à 60 % du revenu médian lequel s’est établi à 2028€ mensuel) de 9,1 millions, correspondant à un taux de pauvreté après redistribution de 14,4 %, resté quasi stable par rapport à l’année précédente. Ce résultat s’inscrit dans un contexte d’inflation élevée (+5,2 % en moyenne annuelle en 2022), mais les effets de celui-ci ont été fortement atténués par les mesures en faveur du pouvoir d’achat : indemnité inflation fin 2021, revalorisation anticipée des retraites et de plusieurs prestations sociales (allocations familiales, minima sociaux, prime d’activité…) en août 2022, hausse du plafond d’exonération d’impôt des heures supplémentaires, prime exceptionnelle de rentrée pour les titulaires de minima sociaux et de la prime d’activité en septembre 2022, majoration du versement du chèque énergie en décembre ; l’étude décrit la situation relative des différentes catégories (chômeurs, retraités, familles monoparentales…). Une seconde étude analyse la situation des personnes « en état de privation matérielle et sociale » ; celle-ci se caractérise notamment par les privations en matière de chauffage, d’alimentation équilibrée ou l’existence d’impayés de loyers. La part de la population dans cette situation de privation matérielle et sociale se stabilise à 13,6 %, plus élevée dans les territoires urbains que dans les territoires ruraux.

Expérimentation de la solidarité à la source dans plusieurs départements

Avant les élections, le Gouvernement a autorisé l’expérimentation dans cinq départements de procédures allégées pour obtenir la prime d’activité et le RSA. La démarche de « solidarité à la source » – engagement présidentiel de la campagne de 2022, dont la méthode est inspirée de celle du pré remplissage des déclarations d’impôt, doit en outre permettre de limiter les fraudes et les erreurs de versement liées à la prise en compte du montant net de ressources pour le calcul des aides. Selon les informations parues dans « Les Échos », cette expérimentation devrait être généralisée à tous les départements en mars 2025.

FISCALITÉ ET PROCÉDURES FISCALES
->Politique fiscale

Nouveau dépôt du projet de loi d’approbation des comptes de l’année 2023

Le projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2023, présenté en conseil des ministres au printemps dernier (v. Repères, avril 2024), n’a pas pu être examiné par le Parlement en raison de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024. Or, en application de l’article 41 de la LOLF, l’ouverture des débats sur le projet de loi de finances pour 2025 est subordonnée au vote préalable l’Assemblée nationale, en première lecture, sur le projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de 2023. En conséquence, pour tenir les délais nécessaires à l’examen du projet de loi de finances pour 2025, le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, a présenté, à nouveau, le 16 juillet 2024, ce même projet en des termes strictement identiques. Les écarts constatés entre les prévisions et l’exécution pour 2023 s’expliquent principalement par des recettes fiscales moindres qu’anticipé, avec une évolution atypique des prélèvements obligatoires, très en deçà de la croissance du produit intérieur brut.

La Cour des comptes confirme le manque de dynamisme des recettes fiscales en 2023

Sortie de sa réserve liée aux échéances électorales, la Cour des comptes est dernièrement revenue (La situation et les perspectives des finances publiques, juillet 2024), sur le niveau des recettes des administrations publiques en 2023 (1 435,3 Md€ net des crédits d’impôt) et, au sein de celles-ci, des prélèvements obligatoires (1 218,4 Md€), qui ont augmenté à un rythme beaucoup plus faible (+2,0 %) que celui du PIB en valeur (+6,3 %). Cette évolution très faible des recettes publiques s’explique en premier lieu par une augmentation spontanée, c’est-à-dire à législation inchangée, très limitée des impôts mais aussi par des mesures de baisse d’impôts. Les prélèvements obligatoires ont enregistré en 2023 une croissance spontanée de 31 Md€, soit 2,6 %. L’élasticité des prélèvements obligatoires au PIB s’est ainsi élevée à 0,4, son plus bas niveau depuis dix ans. La croissance spontanée des recettes de TVA (6 Md€, soit +3,0 %) est faible en raison du niveau élevé des demandes de remboursements de crédits de TVA en 2023. Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) chutent de 22 %, dans un contexte marqué par le recul des transactions immobilières, tandis que la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) accuse une baisse spontanée de 2,4 % en raison de la diminution de la consommation de carburants. La dynamique spontanée de l’impôt sur le revenu à législation constante, limitée à +1,2 %, est amputée fortement par l’indexation de son barème sur l’inflation, pour un coût estimé à 6,2 Md€ en 2023. C’est surtout l’impôt sur les sociétés qui subit une baisse spontanée de près d’un sixième de son rendement (-15,9 %). Celle-ci s’explique par la faible progression du résultat fiscal des sociétés en 2022 (+4 %) et par un cinquième acompte versé par les grandes entreprises fin 2023 en nette diminution par rapport à 2022 du fait d’anticipations de bénéfice 2023 moins favorables. Finalement, seules les taxes foncières (+5,2 %), du fait de l’indexation des bases sur l’inflation, et les droits sur les donations et les successions (+14,1 %) connaissent une forte augmentation spontanée en 2023.

Les effets de cette faible augmentation spontanée de la plupart des prélèvements ont été amplifiés par des mesures de baisses d’impôts à hauteur de 10,7 Md€ en 2023. Les mesures qui dégradent de façon pérenne le déficit public (-6,7 Md€) sont principalement la baisse des anciens impôts locaux, avec l’achèvement de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales (-2,5 Md€) et la poursuite de la réduction de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), transférée à l’État en 2023 (-4,2 Md€). La contribution temporaire de solidarité des producteurs d’hydrocarbures et la contribution sur la rente infra-marginale des électriciens (CRIM), dont le produit s’est révélé très décevant (v. infra), n’ont pas contrebalancé ce déséquilibre. Seules les hausses des taux des taxes foncières décidées par les collectivités territoriales (+1,8 Md€) constituent les principales mesures de hausses fiscales en 2023.

La Banque de France vient en soutien du choix du « bouclier énergétique »

Dans une note publiée le 15 juillet, la Banque de France estime que le bouclier tarifaire mis en œuvre à partir de 2022 a contribué à limiter l’inflation (-2,2 %) et à soutenir la croissance (+0,3 %) par rapport à un scénario sans aucune mesure publique de compensation du choc sur les prix de l’énergie lié à la guerre en Ukraine. Les hausses des prix de l’énergie observées après l’invasion russe de l’Ukraine ont été « d’une ampleur comparable aux chocs pétroliers des années 1970 », rappelle la Banque de France. Selon celle-ci, le bouclier aurait permis de compenser 80 % des pertes de pouvoir d’achat des ménages et 60 % de la baisse des taux de marge des entreprises, sans pour autant engendrer de rebond marqué de l’inflation à sa sortie. Toutefois, son coût pour les finances publiques n’est pas neutre. En comptant le gel des tarifs réglementés du gaz et de l’électricité mais aussi les remises à la pompe, ce coût s’élève désormais à 72 Md€ cumulés depuis 2022, soit environ 2,6 % du PIB français. Selon cette même note, si la France avait dépensé 72 Md€ sous forme de versements aux ménages, cela aurait abouti à un « effet similaire », sur le revenu réel de ces derniers, mais en atténuant deux fois moins la baisse du taux de marge des entreprises. Toutefois, les dépenses du « bouclier énergétique » ont été pour beaucoup captées par les producteurs d’énergie, sans que la contribution sur la rente infra-marginale des producteurs d’électricité (CRIM) ne vienne contrebalancer cet état de fait. La Banque de France souligne que le coût budgétaire de ce « bouclier énergétique » était financièrement insoutenable durablement pour la France.

Vers des baisses ou des hausses d’impôts à l’avenir ?

Après sept ans de stabilité fiscale et ses premiers effets, et après cinquante ans de déficits publics et ses effets connus, la France débat actuellement de ces dogmes. La crainte des hausses d’impôts et des baisses de dépenses publiques suscitent à juste titre de l’inquiétude économique et sociale. Afin de contenir le déficit public à court terme, afin de le stabiliser pour l’année 2024 à 5,1 % du PIB, le ministre des finances a expliqué qu’il avait suggéré au Gouvernement de venir prélever 3 Md€ de recettes supplémentaires par deux mesures fiscales rétroactives. Il assure désormais que les modalités en sont actées. L’une concerne la taxation de la production d’électricité et l’autre les rachats d’actions (v. Repères, avril 2024). Avec un Gouvernement démissionnaire chargé de gérer les affaires courantes, l’inscription de telles mesures en loi de finances pour 2025 semble compromise. Il appartiendra au prochain Gouvernement de reprendre ou non ces projets. À plus long terme, une note du Conseil d’analyse économique, rendue publique en juillet (v. note d’A. Auclert, T. Philippon et X. Ragot), précise que pour garder la maîtrise de sa dette publique, la France doit économiser à moyen terme 112 Md€. La trajectoire optimale d’un tel effort financier doit s’étaler sur sept à douze ans, en privilégiant une baisse des dépenses publiques sans exclure une hausse des impôts ou une absence de revalorisation des prestations sociales. En effet, les rédacteurs de cette note prônent donc, à moyen terme, un excédent primaire de 1 % du PIB. En partant du niveau actuel, il faudrait donc économiser 4 points de PIB, ce qui serait largement inédit sous la Ve République. Dans cette note, ont été listées quelques mesures qui pourraient être prises à court terme : recentrer les aides à l’apprentissage (-4 Md€), supprimer les exonérations de cotisations sociales au-dessus de 2,5 SMIC (-2 Md€), réduire le crédit d’impôt recherche dans les grandes entreprises (-2,5 Md€) ou encore supprimer les dispositifs d’exonérations sur les droits de succession (-9 Md€). Comme ces mesures ne seraient pas suffisantes au vu de l’ampleur de l’ajustement nécessaire, la note du CAE estime que des mesures temporaires devraient également être prises, telles que des hausses temporaires de contributions ou une sous-indexation généralisée des dépenses et des tranches d’imposition. Un gel du point d’indice des fonctionnaires, des prestations sociales et du barème de l’impôt sur le revenu génèrerait environ 20 Md€ de recettes pour les comptes publics selon la note. Au vu du poids des prélèvements obligatoires en France, du caractère inefficient de certaines dépenses publiques et des ajustements économiques réussis à l’étranger (au Portugal, en Grèce, etc.), il serait souhaitable de privilégier les baisses de dépenses aux hausses d’impôts selon cette note. Encore faudrait-il un Gouvernement pour véhiculer ce message économique et financier et une majorité politique au Parlement pour le consentir…

->Impôt sur le revenu

Immobilier et tourisme : la « niche fiscale Airbnb » suite et fin devant le Conseil d’État ?

Déjà évoquée dans nos colonnes (v. Repères, mars 2024), la problématique liée à la « niche fiscale Airbnb » soulevée par les dispositions de la loi de finances pour 2024 vient d’être tranchée par le Conseil d’État (CE, 8 juillet 2024, Association pour un tourisme professionnel et a., Req. n° 492382 – v. E. Coulon, « Niche fiscale Airbnb : il y a encore du nouveau ! », Club des juristes, 8 juillet 2024). Rappelons que par une disposition adoptée par le Parlement en loi de finances pour 2024, en son article 45, et pour laquelle le Gouvernement a manqué de vigilance selon de nombreux observateurs, le législateur a souhaité modifier le régime d’imposition des revenus des locations meublées touristiques. Par un commentaire au BOFIP publié en février 2024, l’Administration fiscale a limité l’application d’un texte législatif par sa doctrine administrative. Le Conseil d’État a constaté son illégalité en ce que cette actualité limite l’application de la nouvelle version de l’article 50-0 du CGI. La décision n’aura toutefois pas de conséquences pour les contribuables cette année car elle est postérieure à la phase déclaratoire à l’impôt sur le revenu.

Quant à l’avenir, il semble bien incertain pour les contribuables concernés. Une proposition de loi visant à réguler les locations meublées et à raboter la niche fiscale afférente est défendue par la députée Le Meur depuis le printemps 2023, dont elle entend relancer les travaux (v. A.N., doc. parl., proposition n° 1176, 28 avril 2023). La même députée vient aussi de remettre un rapport au Premier ministre prônant d’aller beaucoup plus loin dans la remise à plat des avantages fiscaux des loueurs de logements meublés. Elle propose d’aller beaucoup plus loin, et de supprimer l’amortissement du bien (qui serait réservé aux seuls loueurs professionnels de logements meublés). Consciente du bouleversement, elle recommande toutefois d’étaler la mise en œuvre de la réforme sur trois à cinq ans avec un régime transitoire. En parallèle, les bailleurs non professionnels de logements meublés basculeraient sur le régime fiscal de la location nue. Ils déclareraient alors des revenus fonciers – et non plus des bénéfices industriels et commerciaux – et pourraient choisir entre le régime réel et un régime simplifié. Dans ce dernier cas, réservé aux propriétaires encaissant moins de 30 000 € par an, un abattement serait appliqué aux revenus locatifs, avec un taux compris entre 30 et 50 %. Si ce rapport comporte de nombreuses informations statistiques intéressantes transmises par la Direction de la législation fiscale (DLF), plusieurs contre-vérités aboutissent logiquement à une réforme en partie absurde ou incomplète. A suivre…

->Impôt sur les sociétés

La CRIM passée au crible par la Cour des comptes

Après l’avoir clouée au pilori en début d’année (C. comptes, Les mesures exceptionnelles de lutte contre la hausse des prix de l’énergie ; v. Repères, mars 2024), la Cour des comptes revient à l’assaut de la contribution sur la rente infra-marginale des producteurs d’électricité (CRIM). Selon les magistrats financiers, elle était prévue en hausse de 9,7 Md€ par rapport à 2022 en loi de finances initiale pour 2023, montant ramené à 1,9 Md€ dans la loi de programmation des finances publiques, pour un produit finalement constaté en baisse de 0,1 Md€. Les projets de loi de programmation des finances publiques et de loi de finances de fin de gestion (LFG), encore en discussion au Parlement début décembre 2023, auraient pu faire l’objet d’une ultime actualisation par amendement du Gouvernement ou du Parlement, une fois connu le deuxième acompte de la CRIM, mais cela n’a pas été le cas. Les versements cumulés au titre des deux premiers acomptes qui représentaient au minimum 70 % de la totalité de l’impôt dû en 2023, compte tenu de ses règles de liquidation, s’élevaient à 241 M€ fin octobre 2023… Un déni du Gouvernement ou une négligence du Parlement ?

MANAGEMENT PUBLIC
->Fonction Publique d’État

La recherche de 5 Md€ d’économies d’ici la fin de l’année par le ministère des finances

Pourtant en sursis, le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a annoncé le 11 juillet une nouvelle réduction de 5 Md€ des dépenses ministérielles pour l’année 2024, en plus des 10 Md€ de crédits déjà annulés en début d’année (v. Repères, février 2024). Cette mesure vise à maintenir l’objectif de réduction du déficit public à 5,1 % du PIB en 2024, et sous la barre des 3 % du PIB d’ici 2027. Un courrier de notification a été adressé aux ministères pour fixer ces nouveaux plafonds de dépenses, incluant un gel des crédits au-delà de ces plafonds. Par ailleurs, 2 Md€ d’efforts sont demandés aux collectivités territoriales. L’Inspection générale des finances (IGF) a signalé une « accélération atypique » des dépenses, malgré les précédentes annulations, avec une hausse de 3,4% des dépenses à fin mai 2024 par rapport à l’année précédente. Cette augmentation est principalement due au plan « France 2030 », à la hausse des dépenses militaires et à la revalorisation des salaires des enseignants.

L’emploi public en hausse avec une part croissante de contractuels

Une note publiée par l’INSEE (« L’emploi dans la fonction publique en 2022 », Note de l’INSEE n°2003, 10 juillet 2024) montre qu’en 2022, la fonction publique a enregistré une hausse globale des effectifs de 0,3 %, atteignant 5,71 millions d’agents, soit 16 600 de plus qu’en 2021. Cette augmentation est marquée par une baisse du nombre de fonctionnaires (-0,3 %) et une augmentation significative des contractuels (+2,6 %). Les contractuels représentent désormais 22 % des agents publics, contre 17 % en 2011, illustrant une tendance croissante au sein de la fonction publique. L’emploi dans la fonction publique d’État a augmenté de 0,6 %, principalement dans les secteurs de l’éducation et de la recherche, tandis que l’emploi dans la fonction publique territoriale est resté stable après une nette hausse en 2021. Dans la fonction publique hospitalière, la croissance des effectifs a ralenti à 0,1 %, après des augmentations plus importantes dues à la crise sanitaire. En 2022, les fonctionnaires constituaient 65,5% de la fonction publique, tandis que les contractuels continuaient de gagner du terrain, renforçant leur présence dans les effectifs publics.

->Fonction publique hospitalière

Le lancement de « Mon empreinte carbone » par l’ANAP

Un nouvel outil, appelé « Mon empreinte carbone » a été lancé pour aider les établissements publics de santé en France à mesurer leurs émissions de gaz à effet de serre. Développé par l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), cet outil s’inscrit dans le cadre de la planification écologique du système de santé. Sa méthodologie se base sur une approche monétaire, convertissant les dépenses en euros des établissements en émissions de CO2, permettant ainsi une estimation automatique sans saisie de données. L’outil couvre huit postes d’émissions, comme les produits pharmaceutiques, l’énergie, et le transport, et offre une visualisation instantanée des sources principales d’émissions, facilitant la priorisation des actions de décarbonation. Bien qu’il soit innovant et représente une première en France, l’outil reste indicatif et ne remplace pas un bilan complet des gaz à effet de serre, qui reste obligatoire. Des améliorations futures sont déjà prévues pour renforcer sa précision et son utilité.

Le défaut de critères environnementaux retenus dans le « Ségur de l’investissement »

L’inspection générale des Affaires sociales (IGAS) a publié un rapport critique sur le plan « Ségur de l’investissement » en matière de performance énergétique des établissements de santé. Lancé en 2021 avec un budget de 9 Md€ pour moderniser les infrastructures, le plan n’avait pas initialement prévu d’objectifs environnementaux. La mission révèle que, malgré un engagement local croissant pour l’écoresponsabilité, le manque d’indicateurs et de cadre de pilotage limite les résultats. Le rapport recommande d’instaurer des indicateurs de performance environnementale pour les projets financés par le Ségur, et de créer un référentiel commun pour mieux évaluer les enjeux écologiques. Il suggère également des audits patrimoniaux et énergétiques pour les projets importants et un état des lieux du parc immobilier de santé à partir de 2025, en vue d’élaborer un plan de rénovation énergétique à long terme. Enfin, il propose de renforcer le réseau des conseillers en transition écologique pour promouvoir des actions de sobriété énergétique immédiates.

->Fonction publique territoriale

Les obligations des collectivités locales sur la publication d’un « budget vert »

Le décret imposant aux collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants de produire un « budget vert » a été publié, conformément à la loi de finances pour 2024 (v. Repères, nov. 2023). Ce budget vert, intitulé « Impact du budget pour la transition écologique », doit être annexé aux comptes administratifs ou financiers uniques des collectivités. À partir de 2024, celles-ci devront évaluer l’impact de leurs dépenses sur l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre. Cette analyse s’étendra progressivement à d’autres objectifs environnementaux, comme la biodiversité en 2025 et l’ensemble des six objectifs de la taxonomie européenne d’ici 2027. La méthodologie pour cette évaluation reste à définir. Une instance réunissant la DGFIP, la DGCL, des associations d’élus et des experts sera constituée pour établir un cadre commun. Il est envisagé que le secrétariat général à la planification écologique (SGPE) y participe pour assurer la cohérence avec les objectifs nationaux. Le budget vert se concentrera sur les investissements et servira de reporting plutôt que de véritable outil de budgétisation verte, cette dernière étant une démarche plus large qui influence les décisions budgétaires dès leur conception. Le déploiement progressif de cette initiative vise à standardiser l’approche des collectivités en matière de financement de la transition écologique.

Et l’association des collectivités locales à l’effort de redressement des finances publiques ?

La Cour des comptes, dans son dernier rapport sur les finances locales (v. « Les finances publiques locales 2024 », 22 juillet 2024), souligne l’incertitude de la contribution des collectivités territoriales au redressement des finances publiques, en raison du manque d’outils adéquats pour encadrer et piloter leurs dépenses. Bien que la loi de programmation des finances publiques 2023-2027 fixe des objectifs ambitieux, comme la réduction des dépenses de fonctionnement, aucun mécanisme efficace n’a été mis en place pour atteindre ces objectifs. En 2023, les finances des collectivités se sont détériorées, avec une baisse de l’épargne brute et un besoin de financement accru. La Cour identifie l’inflation, l’augmentation des dépenses de fonctionnement, et la baisse des recettes fiscales comme principales causes de cette dégradation. Elle préconise un renforcement des efforts de maîtrise des dépenses, mais déplore l’absence de dispositifs pour le faire. Un levier potentiel serait l’encadrement des concours financiers de l’État, qui représente une part significative des recettes des collectivités. Cependant, cette option est délicate, comme le montre l’expérience passée de la réduction de la dotation globale de fonctionnement (DGF), qui avait freiné à la fois les dépenses de fonctionnement et d’investissement des collectivités territoriales.

->Transitions

La publication d’un premier référentiel ministériel sur « l’IA frugale »

Le ministère de la transition écologique a publié le premier référentiel sur « l’IA frugale », destiné à harmoniser la mesure de l’impact environnemental des systèmes d’intelligence artificielle (« Référentiel général pour l’IA frugale », Ministère de la Transition écologique, EcoLab, AFNOR, juin 2024). Ce référentiel, élaboré en collaboration avec des acteurs publics et privés, vise à standardiser les définitions et les méthodes de mesure pour évaluer de manière cohérente les impacts environnementaux de l’IA. Il propose 31 bonnes pratiques pour optimiser la gouvernance, la gestion des données, et la performance des modèles d’IA, tout en incitant à évaluer la nécessité réelle de recourir à l’IA par rapport à des alternatives moins consommatrices en ressources. Le référentiel dépasse la seule consommation énergétique, en prenant en compte des impacts plus larges, tels que l’épuisement des ressources naturelles et les émissions de particules fines. Bien qu’il ne soit pas contraignant, ce référentiel représente une première étape vers une éventuelle normalisation et certification à l’échelle européenne, permettant de s’assurer que les solutions d’IA sont développées de manière écoresponsable.

Un bilan de l’introduction des clauses socio-environnementales dans les achats publics

La direction des achats de l’État a commandé une étude à un doctorant d’Avignon-Université pour connaître l’impact de l’introduction des clauses sociales et environnementales dans les achats publics. Le rapport, publié le 5 juillet 2024 (« Développement durable et accès des PME aux marchés publics », rapport à la direction des achats de l’État, Adrien Deschamps, 5 juillet 2024), examine l’impact des nouvelles politiques d’achats publics durables sur les marchés, notamment en matière de compatibilité entre objectifs économiques et environnementaux. Contrairement à certaines idées reçues, le rapport suggère que les clauses environnementales pourraient favoriser l’accès des PME aux marchés publics. Il montre qu’environ 43 % des contrats avec des clauses environnementales sont attribués à des PME, contre 38 % sans ces clauses. Ce phénomène s’explique par la flexibilité des PME dans leur processus de production. Toutefois, une distinction est faite entre clauses et critères environnementaux : les premières, obligatoires, semblent avantageuses pour les PME, tandis que les seconds, bien qu’encourageant leur participation, réduisent leurs chances de succès en raison d’un manque de clarté. Le rapport recommande donc d’améliorer la transparence des critères pour mieux soutenir les PME. Malgré ces avancées, l’application des clauses environnementales reste insuffisante, et il reste encore beaucoup à faire pour que les objectifs de durabilité soient pleinement intégrés dans la commande publique.

Pour une meilleure intégration de la crise climatique dans la programmation budgétaire

Dans son rapport du mois de juillet (« La situation et les perspectives des finances publiques », 15 juillet 2024), la Cour des comptes critique la séparation actuelle entre les lois de programmation climatique et des finances publiques, ce qui limite l’efficacité des actions écologiques. La Cour recommande d’harmoniser les subventions, la réglementation et la fiscalité carbone, jugée cruciale pour financer la transition à moindre coût. Elle souligne aussi l’absence de lien clair entre la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la programmation budgétaire. La future Stratégie de financement pour la transition énergétique (SFPTE), attendue à l’automne, devrait clarifier la répartition des efforts entre les acteurs publics et aligner les politiques climatiques et budgétaires pour éviter un impact minime.

FISCALITE EUROPÉENNE ET INTERNATIONAL
->Fiscalité européenne

La Commission européenne publie son rapport annuel sur la fiscalité

Le 3 juillet, la Commission européenne a publié son rapport annuel sur la fiscalité au sein de l’Union européenne (en anglais). Outre les chapitres habituels comme celui portant sur les récentes réformes fiscales dans les différents États membres, un chapitre (4) met en évidence le rôle de l’instrument fiscal pour améliorer la compétitivité économique.

Taxation renforcée des voitures électriques chinoises

Depuis le 4 juillet, comme annoncée en juin dernier, dans un rapport où elle avait provisoirement conclu que la chaîne de valeur des véhicules électriques à batterie en Chine bénéficiait de subventions déloyales, des taux de douane plus élevés sont imposés par la Commission européenne aux véhicules chinois. À la place des droits de 10 %, la Commission applique désormais un prélèvement fixe de 37,6 % aux entreprises qui n’ont pas coopéré (c’est le cas de MG, une marque détenue par SAIC). Ce taux est de 19,9 % pour les véhicules appartenant à Geely (Volvo et Smart) et 17,4 % pour ceux du géant BYD. Les constructeurs chinois qui ont coopéré à l’enquête mais n’ont pas encore été échantillonnés sont soumis à une taxe moyenne de 20,8 %.

Convention-cadre des Nations unies sur la coopération en matière fiscale

Le 16 juillet, le Conseil ECOFIN a approuvé la position de l’Union européenne et de ses États membres pour la deuxième session de fond du comité spécial chargé de définir un mandat pour l’élaboration d’une convention-cadre des Nations unies sur la coopération internationale en matière fiscale.

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Aurélien BAUDU (Fiscalité et procédure fiscale – Coordination)

Fabrice BIN (Fiscalité européenne et International)

Florent GAULLIER-CAMUS (Budget de l’État et opérateurs – Comptabilité publique)

Léonard GOURBIER (Management public)

Matthieu HOUSER (Finances locales)

Aymeric POTTEAU (Finances publiques européennes)

Yves TERRASSE (Finances sociales)