BUDGET DE L’ÉTAT ET DES OPÉRATEURS
->Données générales sur les finances publiques
Pour l’année 2021, le déficit public s’élève à 6,5 % du PIB et la dette à 112,9 % du PIB
Dans deux notes publiées en date du 29 mars 2022, l’INSEE indique que le déficit public pour 2021 s’établit à 160,9 Md€, soit 6,5 % du produit intérieur brut (PIB), après 8,9 % en 2020 et 3,1 % en 2019. Portées par le rebond économique, les recettes progressent de 101,8 Md€, soit une hausse de +8,4 %.
Exprimée en pourcentage du PIB, la dette brute des administrations publiques au sens de Maastricht atteint 112,9 % à fin 2021, en diminution par rapport à 2020 (114,6 % à fin 2020), soit une dette qui s’établit à 2 813,1 Md€. Sur ce point, l’INSEE précise que la diminution de la dette des administrations publiques résulte principalement de celle des administrations de sécurité sociale qui diminue de 25,3 Md€. La dette des organismes divers d’administrations centrales et celle de l’État diminuent plus modérément à hauteur de 2,3 Md€, principalement portées par le désendettement de SNCF Réseau (-3,7 Md€). À l’inverse, l’ÉPIC BPI et France Compétences s’endettent par emprunt bancaire (respectivement +0,8 Md€ et +0,6 Md€). La contribution de l’État à la dette publique diminue légèrement au quatrième trimestre (-1,8 Md€). En revanche, la dette des administrations publiques locales s’accroît (+9,2 Md€). Par exemple, le dynamisme de l’endettement de la Société du Grand Paris se poursuit (+4,7 Md€), accompagné de celui des communes (+2,1 Md€) ou encore des régions (+1,0 Md€).
Rapport de la Cour des comptes sur la préparation et la mise en œuvre du plan de relance
La crise sanitaire de 2020 a entrainé une contraction du PIB français de 8 %. En complément des mesures de soutien, le gouvernement a mis en place à l’automne 2020 un plan de relance d’un montant de 100 Md€ (dont 39,4 Md€ pris en charge par l’Union européenne), dans le but de retrouver rapidement le niveau d’activité économique d’avant-crise et de contribuer à la transformation de l’économie. Réalisé à la demande de la commission des finances du Sénat, le rapport publié 9 mars 2022 a examiné la préparation, le contenu et la mise en œuvre de ce plan.
En raison du grand nombre de mesures annoncées au bénéfice de nombreux secteurs économiques, la Cour relève qu’il est difficile d’apprécier le plan dans son ensemble, d’autant qu’aucune information complète et actualisée n’est accessible. Elle souligne à cet égard la nécessité d’un suivi attentif pour rendre compte du respect des exigences ou de l’atteinte des cibles qui conditionnent le versement des financements de l’Union européenne.
Le choix du recours à une mission budgétaire nouvelle pour regrouper une large partie des crédits budgétaires a conduit à une certaine complexité du fait de nombreuses délégations de gestion des crédits ; la Cour estime que ce mode de gestion a permis de distinguer les crédits de relance au sein du budget de l’État. Aussi, de nombreuses actions de communication ont été engagées pour faire connaître le plan, dont la Cour note qu’elles ont conduit à mobiliser des moyens financiers particulièrement importants comparés à d’autres plans de communication menés par le Gouvernement, dont la justification apparaît incertaine.
Si l’objectif du Gouvernement d’un engagement du Plan à hauteur de 70 % à la fin 2021 a été atteint, le reste devant l’être d’ici fin 2022, la consommation des crédits de paiement devrait logiquement être plus lente et la poursuite des décaissements devrait s’étaler au moins jusqu’en 2026. Pour la Cour, la poursuite de la mise en œuvre du plan au-delà de 2021 soulève plusieurs questions, notamment celles d’une plus forte sélectivité, de l’évaluation de l’efficacité des mesures mises en œuvre, et de la prolongation éventuelle de certaines mesures dans le cadre de la prochaine loi de programmation des finances publiques, que la Cour des comptes appelle de ses vœux.
Les dépenses par politique publique en 2020
Dans un document publié le 2 mars 2022 sur le site internet de FIPECO, François ECALLE analyse les données d’Eurostat sur la ventilation des dépenses publiques par « fonction » en 2020 dans les pays de l’Union européenne. Cette analyse permet de comparer le coût des politiques publiques, en pourcentage du PIB, en France et dans les autres pays européens mais aussi de voir à quelles politiques les dépenses publiques ont été affectées en priorité selon les pays.
Il a notamment pu être relevé que les dépenses publiques de la France représentaient 61,6 % du PIB en 2020 contre des moyennes comprises entre 53 et 54 % du PIB dans la zone euro et l’Union européenne (50,8 % du PIB en Allemagne par exemple).
Quant à la répartition des dépenses par politique publique en pourcentage du total des dépenses publiques, il est fait le constat que la part de la protection sociale dans le total des dépenses publiques en 2020 n’était pas très différente en France (58,8 %) de celle observée dans la zone euro (57,4 %) ou dans l’Union européenne (56,4 %).
Autre exemple, la part des dépenses affectées à la sécurité intérieure et à la justice (2,9 %) est plus faible en France que dans les autres pays européens (3,4 %).
Finalement, la France a donné une priorité plus grande que les autres pays aux retraites, au logement, au chômage, à la lutte contre l’exclusion et à la Défense. Cette priorisation, par rapport à celle des autres pays, s’est faite notamment au détriment de la santé, de l’enseignement, de la sécurité intérieure et des fonctions support.
COMPTABILITÉ PUBLIQUE
->Responsabilité des gestionnaires publics
Ordonnance du 23 mars 2022 relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics
L’ordonnance n° 2022-408 publiée le 23 mars 2022 prise en application de la loi du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, crée un régime juridictionnel unifié de responsabilité des gestionnaires publics et des gestionnaires des organismes relevant du code de la Sécurité sociale, qui entrera en application le 1er janvier 2023.
Les précédentes éditions de ces Repères ont déjà eu plusieurs occasions d’analyser la portée de cette réforme.
Pour l’essentiel, le nouveau régime vise à sanctionner plus efficacement les gestionnaires publics qui, par une infraction aux règles d’exécution des recettes et des dépenses ou à la gestion des biens publics, ont commis une faute grave ayant causé un préjudice financier significatif.
La juridiction unifiée en charge de la répression de ces fautes en première instance sera la chambre du contentieux de la Cour des comptes, comprenant des membres de la Cour et des magistrats des chambres régionales et territoriales des comptes. De plus, une Cour d’appel financière sera instituée. Le Conseil d’État demeurera la juridiction de cassation.
Les différents régimes de responsabilité financière existants sont abrogés, et la CDBF supprimée.
FINANCES LOCALES
Cour des comptes, La préparation et la mise en œuvre du plan de relance, Communication à la commission des finances du Sénat, mars 2022
La Cour des comptes livre dans cette version une analyse plus poussée de la mise en œuvre du plan de relance. Le secteur local occupe une place importante en raison du fait qu’environ un dixième des dépenses est consacré aux collectivités territoriales. La Cour rappelle que l’expression « plan de relance » englobe différents aspects avec notamment la compensation des pertes de ressources ou encore la mise en œuvre de montants supplémentaires dans le cadre de la DSIL et de la DETR. Le plan de relance se matérialise également dans le cadre de la réhabilitation des friches. D’un point de vue de science administrative, il apparaît que le préfet occupe une place centrale dans la mise en œuvre de ces dispositifs.
Le plan de relance s’illustre aussi par les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) avec l’échelon intercommunal, et les accords locaux de relance déclinés en accords régionaux de relance. La Cour fait le constat d’un foisonnement de dispositifs manquant parfois de coordination. Au final, les juges financiers formulent les recommandations suivantes : « 2. pour la mission budgétaire Plan de relance, ne plus ouvrir d’autorisations d’engagement au-delà de fin 2022 ; prévoir sa suppression le plus tôt possible après cette date (direction du budget) ; 3. mettre en place rapidement un dispositif de suivi des crédits du plan de relance décaissés par les opérateurs pour chaque programme budgétaire de la mission Plan de relance (direction du budget) ; 4. afin de mesurer la territorialisation du plan de relance, publier au premier semestre 2022 un bilan d’ensemble du déploiement territorial des mesures(SGPR) ».
Note de J.-R. Cazeneuve « Bilan – 5 ans d’action en faveur des finances des collectivités territoriales »
Dans cette dernière note du quinquennat, le bilan financier des collectivités se révèle assez positif, contrairement aux trajectoires financières de l’État et de la sécurité sociale. Cette tendance découle, en premier lieu, des recettes de fonctionnement, qui sont relativement dynamiques entre 2017 et 2021. Elles ont connu une dynamique de 5,6 % (+11.4 Md€). Au final, l’épargne brute « a progressé de 29,7 Md€ en 2017 à 36,6 Md€ en 2021 ». Malgré tout, tous les indicateurs ne sont pas au vert. Ainsi, l’endettement a légèrement augmenté, passant de 150,1 Md€ en 2017 à 157,1 Md€ en 2021. En revanche, la trésorerie des collectivités a continué d’augmenter, celle-ci est passée entre 2017 et 2021 de 41,5 Md€ à 56,6 Md€, soit une hausse de 36,4 %.
Décision du Conseil constitutionnel sur l’absence de compensation de la suppression de la taxe d’habitation pour les syndicats de communes
Le Conseil constitutionnel occupe un rôle fondamental dans la réforme de la taxe d’habitation. Après la censure du dispositif initial, les juges apportent cette fois une nouvelle pierre à l’édifice avec cette décision du 17 mars 2022 concernant les syndicats de communes (cf. précisions et commentaires dans la rubrique Fiscalité Locale).
BIS, DGCL, Stabilité du nombre de communes et d’EPCI à fiscalité propre en 2021 et ralentissement de la baisse du nombre de syndicats, N° 163 – mars 2022
Dans cette note, la DGCL actualise les données chiffrées sur le nombre d’EPCI en France. Loin d’être anodine cette analyse annuelle permet de suivre les effets des réformes engagées en matière de réformes territoriales. Au 1er janvier 2022, il y a en France 1 254 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, soit un de plus qu’en 2021, regroupant quasiment toute la population française. La stabilité du nombre d’EPCI se ressent également concernant le nombre de communes qui lui aussi n’évolue guère, démontrant ainsi l’essoufflement du dispositif de création de communes nouvelles. Cette note permet également de dresser le profil des habitants au regard de la structure à laquelle ils appartiennent. Ainsi, un tiers de la population réside dans une métropole ou dans une communauté urbaine, un tiers au sein des 992 communautés de communes et un dernier tiers au sein des 227 communautés
d’agglomération.
Cette note revient également sur la baisse du nombre de syndicats de communes. Il s’agit de l’un des objectifs de la réforme territoriale. Sur ce point, la réduction ralentit fortement. Après une baisse de -7 % en 2017 et 2018, la baisse en 2021 n’est que de -2 %.
Instruction relative au contrôle de légalité en matière de taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), 15 mars 2022
La vie de la TEOM n’est pas un long fleuve tranquille. Pour mémoire, la décision n° 413895 du 24 octobre 2018, Société l’immobilière groupe casino c/ Ministre, indique que lorsque le taux fixé révèle une disproportion manifeste du produit par rapport au coût, le juge peut accorder une décharge des cotisations. Cette décision a déclenché une multitude de recours contentieux, nécessitant l’intervention du législateur avec l’article 23 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019. La présente instruction rappelle au contrôle de légalité l’importance du contrôle mais également la nécessité de prévenir avec les collectivités tout contentieux. Ce risque devient d’autant plus réel que l’ARD pourrait être mobilisée, c’est-à-dire une action collective déposée par une association ou un syndicat professionnel.
FINANCES SOCIALES
La position des candidats à l’élection présidentielle en matière de protection sociale et de santé
Après avoir été longtemps absents du débat présidentiel, les thèmes de la protection sociale reviennent en force, avec les questions des retraites et du pouvoir d’achat (voir infra). La Fédération de la Mutualité française a analysé l’essentiel des programmes de 8 candidats (Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Marine le Pen, Valérie Pécresse, Fabien Roussel, Christiane Taubira, Eric Zemmour), cette analyse étant accompagnée d’un sondage sur les attentes des citoyens qui mettent de loin en avant la disponibilité des soins. Un « Grand oral » a été organisé le 1er mars avec 4 candidats (Yannick Jadot, Anne Hidalgo, Fabien Roussel et Valérie Pécresse). Dans sa lettre aux Français du 4 mars, le candidat Macron pose un préalable, « la reconquête productive par le travail » qui seule permettra de « préserver et même améliorer ce modèle social auquel nous tenons tant et qui a fait ses preuves ». Quelques priorités sont évoquées, qui ont été largement développées dans la conférence de presse du 17 mars : la lutte contre les inégalités, le grand âge à domicile, l’inclusion pour les personnes en situation de handicap, la mise sous conditionnalité du RSA, le versement des minimas sociaux « à la source » et, en matière de santé, l’accent sur la prévention et le recul des déserts médicaux. S’agissant des moyens pour y parvenir, il évoque la nécessité de travailler plus (voir infra), de baisser les impôts pesant sur le travail et la production et l’investissement dans l’innovation.
Le lancement des premiers « contrats engagement jeune »
A l’occasion de la signature des premiers « contrats d’engagement jeunes » le Premier Ministre a rappelé le 1er mars à Rosny-sous-Bois la finalité de ce dispositif (qui a été présenté dans les Repères de novembre 2021) et qui vise à insérer des jeunes de 18 à 25 ans au chômage ou sans formation, en grande précarité, dans le cadre d’un accompagnement de 12 mois et assorti d’une allocation allant jusqu’à 500 € mensuels.
Le report de l’âge de départ à la retraite devient un thème majeur de la campagne présidentielle
Dans sa conférence de presse du 17 mars, le candidat Macron a confirmé sa proposition de porter à 65 ans l’âge légal de départ en retraite sur une période de 9 ans (soit en 2032). Ce serait l’enterrement définitif du projet de réforme systémique qui s’est interrompu en mars 2020 avec le début de la pandémie. Subsisteraient la suppression des « grands » régimes spéciaux (RATP, industries gazières et électriques…), la possibilité de départs anticipés pour carrières longues, usure professionnelle ou handicap), la fixation à 1100 € (soit 85 % du SMIC) pour le minimum de pension, le futur projet devant en tout état de cause faire l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux. Chacun des 11 autres candidats a pris position sur l’enjeu capital du départ en retraite, soit en faveur d’un report à 65 ou 64 ans (Pécresse, Zemmour), soit en faveur d’un statu quo à 62 ans (Hidalgo, Jadot), soit pour un retour à 60 ans (Le Pen-sous réserve d’une durée minimale de 40 ans de cotisations, Mélenchon, Roussel). L’institut Montaigne a chiffré les effets financiers des différents programmes en matière de retraite, qui vont d’un montant annuel d’économies de 16,2Md€ (Pécresse) à un coût annuel de 87,7 Md€ (Roussel), mais la validité de ces estimations a été contestée par plusieurs candidats.
Le pouvoir d’achat, nouvel incontournable de la campagne présidentielle
Déjà ravivée par la reprise mondiale de l’inflation au cours de l’année 2021, la problématique du pouvoir d’achat a pris une dimension considérable avec la guerre en Ukraine, qui va entrainer une tension extrême sur les prix de l’énergie – et notamment du gaz – et de l’alimentation. De nombreuses mesures ont déjà été prises au cours de l’année dernière par le gouvernement : gel des tarifs réglementés du gaz, limitation à 4 % de la hausse du tarif réglementé de l’électricité au 1er février 2022, chèque énergie, indemnité inflation… Tous les candidats ont insisté sur l’urgence de nouvelles mesures à cet effet, les plus radicales visant un gel pur et simple des tarifs de l’énergie ou une baisse importante de la TVA sur les produits énergétiques ; un « policy brief » de l’OFCE du 17 mars fait un bilan de l’évolution du pouvoir d’achat durant le quinquennat qui s’achève. L’étude rappelle qu’au cours des 30 dernières années, le pouvoir d’achat moyen par unité de consommation a crû de 0,95 % par an en moyenne (soit un gain réel moyen de 300 €), mais avec une évolution qui n’a pas été linéaire sur la période : faibles de 1990 à 1997, les gains de pouvoir d’achat ont été élevés de 1997 à 2007, puis négatifs de 2008 à 2014. Depuis 2015, le pouvoir d’achat a crû à nouveau de 1 % par an, du fait notamment de la reprise de l’emploi. Pour ce qui concerne le quinquennat d’Emmanuel Macron, le gain de pouvoir d’achat a été de 0,9 % par an, se décomposant en 0,5 % de gain des revenus primaires et 0,4 % de gains liés à la redistribution et aux mesures sociales et fiscales, ce qui est plus que pour les quinquennats précédents. Si l’on considère l’effet de ces mesures par niveau de revenu, ce sont les ménages les moins aisés (c’est-à-dire du premier décile de la distribution) qui auraient enregistré la progression de pouvoir d’achat – en pourcentage – la plus importante, mais les ménages les plus aisés auraient également connu une forte progression du fait des mesures concernant la fiscalité du capital, constatation qui recouvre celle d’autres études mentionnées dans les Repères. Pour ce qui concerne les conséquences de l’inflation en 2021, l’étude estime qu’environ 60% des ménages auraient subi une perte de pouvoir d’achat, mais que pour un tiers au moins, ces pertes auraient efficacement été compensées par les mesures de soutien prises par le gouvernement.
Les effets de l’élargissement du champ de la prime d’activité intervenu en 2019
Une note de la DREES analyse l’impact de la forte augmentation du bonus individuel de la prime d’activité opérée en janvier 2019 en réponse à la crise des Gilets jaunes. Pour augmenter le revenu individuel des travailleurs modestes, le gouvernement avait décidé de majorer de 100 € le revenu disponible mensuel des travailleurs rémunérés au SMIC, en revalorisant le bonus individuel maximal de la prime d’activité. Cette réforme a eu plusieurs conséquences : 1) d’augmenter de 37 % le nombre de bénéficiaires de la prime d’activité, celle-ci bénéficiant à fin 2019 à 4,3 millions de foyers (8,6 millions de personnes) pour une dépense de 9,4 Md€ à cette date ; 2) un gain moyen de 70 € par mois par salarié a été enregistré ; 3) une baisse du taux de pauvreté de 0,6 points, plus imputable à l’effet de l’augmentation de la prime elle-même qu’à la diminution du taux de non-recours. C’est donc à un changement en profondeur du modèle de cette prime qu’a conduit la réforme de janvier 2019.
La publication des lois relatives aux lois de financement de la Sécurité sociale.
Les lois organique et ordinaire modifiant le cadre des lois de financement de la Sécurité sociale ont été promulguées le 14 mars. Ces textes, qui sont issus de l’initiative parlementaire, visent à améliorer l’information du Parlement sur l’ensemble des branches de la SS. Un article liminaire devra présenter la trajectoire financière de l’ensemble des ASSO, y compris l’assurance chômage et les régimes complémentaires de retraite. Les PLFSS devront intégrer la dette des hôpitaux et des établissements de santé, et les mesures d’exonération de charges au-delà de 3 ans ne pourront être votées que dans le cadre des PLFSS. Les annexes seront enrichies, d’une part avec l’analyse des écarts par rapport aux prévisions des lois de programmation des finances publiques, d’autre part avec des informations sur les modalités de construction de l’ONDAM. Une loi d’approbation des comptes de la SS, sur le modèle des lois de règlement de l’État est instituée. Enfin, la date de dépôt du PLFSS sera alignée sur celle du projet de loi de finances, soit le premier mardi d’octobre (au lieu du 15 octobre actuellement).
La forte augmentation en 2021 des redressements en matière de travail dissimulé
L’ACOSS a publié son bilan 2021 au titre de la lutte contre le travail dissimulé. Le montant des redressements s’est élevé à 790 M€, soit une progression de 30 % par rapport à l’année 2020, durant laquelle les contrôles avaient certes été fortement affectés par la crise sanitaire, mais ce qui dépasse largement le meilleur résultat obtenu jusque-là, en 2019, avec 708 M€. L’ACOSS fait valoir que ces progrès sont largement dus à la performance des outils de ciblage, en particulier le data mining.
Le déficit 2021 de la Sécurité sociale moins élevé que prévu
L’arrêté au 15 mars des comptes 2021 du régime général de la SS et du FSV établit le déficit à -24,4 Md€, contre -33,5 Md€ prévus par la LFSS pour 2022 (voir Repères de décembre), ce qui traduit une amélioration de 14,3 Md€ par rapport au solde de 2020 . Cette amélioration est due à la très forte reprise de l’activité intervenue l’an passé, qui a permis une forte croissance de l’assiette des recettes assises sur la masse salariale du secteur privé (+8,9 %) ainsi qu’un bon rendement des impôts et taxes affectés à la SS. L’essentiel du déficit est imputable à l’assurance maladie (-26,1 Md€), l’assurance vieillesse et le FSV enregistrant une perte de -2,6 Md€, tous les autres régimes étant en excédent.
Une étude très critique de l’OFCE sur les réformes de l’assurance chômage
Une étude de l’OFCE de mars 2022 revient sur les deux réformes qui ont été mises en œuvre dans le domaine de l’assurance chômage, qui était une des grandes ambitions du projet présidentiel de 2017. La première réforme est qualifiée par l’auteur de l’étude « d’institutionnelle » ; c’est celle qui, en 2018, a supprimé les cotisations d’assurance chômage des salariés pour les remplacer par un financement par la CSG, changeant ainsi très profondément la structure du financement de l’UNEDIC ; cette réforme s’est accompagnée de l’instauration de protections sociales – assez limitées à vrai dire – en faveur des indépendants et des démissionnaires. La seconde réforme, dite « paramétrique », est celle qui vient d’entrer en vigueur, et qui a conduit à durcir les règles d’éligibilité aux indemnisations, à modifier la définition du salaire de référence, à rendre dégressifs les montants des allocations supérieures à 2600€ par mois et à taxer les contrats courts; cette seconde réforme a été beaucoup longue à aboutir, après le rejet par le gouvernement du projet initial des partenaires sociaux et elle est fortement critiquée par l’auteur, qui y voit une recherche d’économies à court terme et une reprise en main de l’assurance chômage par l’État plus qu’un instrument d’amélioration du marché du travail.
Un rapport sur le service public territorial de l’autonomie
Dominique Libault a remis le 17 mars son rapport sur le service territorial de l’autonomie qui lui avait été demandé par le ministre des solidarités et de la santé. Mettant l’accent sur la dispersion des acteurs qui interviennent au plan local dans le domaine de l’autonomie (ex. services de l’État, ARS, caisses de SS, collectivités locales), le rapport formule 21 recommandations qui pourraient constituer les fondements d’un futur « service territorial de l’autonomie », et notamment la création d’un guichet unique pour les personnes âgées en perte d’autonomie et les personnes en situation de handicap et d’un bouquet de services large et lisible. Ces propositions devront prendre place dans la convention d’objectifs et de gestion signée entre la CNSA et l’État pour les 5 ans à venir.
FISCALITÉ ET PROCÉDURES FISCALES
->Politique fiscale
La proposition de loi en faveur de la justice fiscale et de la souveraineté industrielle
Plusieurs députés, dont les députés E. Cariou, C. Pires-Beaune, C. Rouaux, J.-P Dufrègne de la commission des finances à l’Assemblée nationale, ont déposé une proposition de loi visant à ramener plus d’équité dans la fiscalité française (proposition de loi n°5096, A.N., février 2022). Parmi les mesures proposées, le texte envisage de relever la part fiscale du prélèvement forfaitaire unique (PFU) sur les revenus du capital (40 % pour les dividendes et les cessions de valeurs mobilières au delà de 1 M€) ; de supprimer l’abattement de 40 % sur les dividendes ; de réformer l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) en y intégrant les liquidités et les contrats d’assurance vie investis en unités de compte, c’est à dire en actions d’entreprises ; d’aligner la taxation des successions et de l’assurance vie ; de modifier le calcul de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) en mettant fin à la familialisation de l’assiette et en augmentant les taux ; de réguler le « régime des sociétés mère fille ».
La réponse ministérielle à une question écrite sur les sommes versées aux aviseurs fiscaux
Suite au rapport d’information de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur les aviseurs fiscaux (v. Repères, nov. 2021) concluant que l’extension du dispositif d’indemnisation des aviseurs fiscaux adoptée en 2019 produisait des résultats très prometteurs mais qu’il était encore trop tôt pour en écrire l’épilogue, il a été décidé, en loi de finances pour 2022, de poursuivre pour deux années l’expérimentation jusqu’au 31 décembre 2023 (art. L. 10-0 AC du LPF) de l’indemnisation des aviseurs qui signalent à l’administration fiscale des manquements d’un enjeu supérieur à 100.000 €. Interrogé par le député Grau sur le montant total des indemnités versées à des aviseurs fiscaux au cours des exercices 2020 et 2021, le Gouvernement vient de préciser qu’elles s’élevaient à 801.500 € pour ces deux années (JOAN, 1er mars 2022, question n° 43444).
->Contrôle fiscal
L’évasion fiscale : récentes évolutions de la liste européenne des paradis fiscaux
A deux reprises dans l’année, depuis 2017, afin de promouvoir la bonne gouvernance mondiale en matière fiscale, le Conseil de l’UE révise sa liste des États non coopératifs et dresse un état des lieux afin d’informer les États membres sur les États tiers de l’UE qui se livrent à des pratiques fiscales abusives. En octobre 2021, le Conseil de l’UE avait décidé de retirer Anguilla, la Dominique et les Seychelles de la liste. En février, il a décidé de maintenir sur la liste les États suivants : les Samoa américaines, les Fidji, Guam, les Palaos, le Panama, le Samoa, Trinité et Tobago, les Îles Vierges américaines et le Vanuatu.
->Impôt sur le revenu
La légalité de l’encadrement des frais des intermédiaires dans le cadre du dispositif « Pinel »
En 2020, le Conseil Constitutionnel avait déjà considéré que l’encadrement des frais et commissions des intermédiaires pratiqué dans le cadre de montages financiers visant à acquérir un logement ouvrant droit à la réduction d’impôt sur le revenu dite « Pinel », instauré par l’article 68 de la loi de finances pour 2018 (art. 199-X novovicies, CGI) était constitutionnel (Cons. const., 15 oct. 2020, décis. n° 2020-861 QPC, Fédération nationale de l’immobilier et autres – v. Repères, 2020). Le plafond prévu par le législateur a été précisé par le décret n° 2019-1426 du 20 décembre 2019 (10 % du prix d’acquisition du logement augmenté du prix des travaux). Le Conseil d’État vient de rejeter un recours pour excès de pouvoir déposé en annulation dudit décret (CE, 9e et 10e ch. r., 2 mars 2022, Fédération nationale de l’immobilier et autres, Req. n° 438805).
La suppression de la « redevance audiovisuelle » : quid de l’indépendance des médias publics ?
Emmanuel Macron s’est engagé à supprimer la contribution à l’audiovisuel public (art. 1605-III du CGI – CAP de 138 € en France Métropolitaine ; 88 € en outre-mer – tarifs de la CAP non indexés en 2022 sur l’inflation) en cas de réélection dans un souci de cohérence avec la disparition programmée de la taxe d’habitation sur les résidences principales en 2023. Cela représente un enjeu financier de 3,7 Mds€ (dont 65% est affecté au financement de France Télévisions, 15,9 % à Radio-France, 7,5 % à Arte, 7 % à France Média Monde, 2,4 % à l’INA, 2,1 % à TV5 Monde). Le débat est invariablement le même depuis quelques années : c’est celui de l’assiette de la CAP, dans un contexte de la réduction continue du nombre de foyers fiscaux l’acquittant (22,8 M de foyers en 2022). En effet, le taux d’équipement en téléviseurs des foyers français ne cesse de diminuer (98 % en 2012 ; 92 % en 2020) alors que le nombre d’écrans (téléviseurs, smartphones, tablettes, ordinateurs) par foyer ne cesse de progresser (5,3 en 2007 à 6,5 en 2020). Les pistes de réflexion sont connues depuis longtemps : un élargissement de l’assiette à tous les foyers ; une taxe sur certains objets connectés ou sur les abonnements à des services multimédias ; une dotation budgétaire. Le Gouvernement s’était engagé lors de l’examen de la loi de finances pour 2019 à présenter au Parlement un rapport relatif à la réforme du dispositif avant le 1er juin 2019 (art. 279 L. n° 2018-1317 du 28 déc. 2018 de finances pour 2019). Ce document n’était toujours pas publié lors du débat budgétaire en loi de finances pour 2022. Le Gouvernement a annoncé la présentation d’un projet en avril 2022, à l’issue d’une consultation menée par l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale des affaires culturelles (IGAC). Jusqu’alors le ministère de la culture n’était pas favorable à une dotation budgétaire en estimant qu’une ressource affectée, à l’image de CAP, constituait une meilleure garantie d’indépendance. Cette annonce pose donc la question de l’avenir du service public audiovisuel et au-delà celui de l’indépendance des médias publics (cf. coup de rabot budgétaire, contractualisation financière).
Vers une extension du dispositif de déduction aux contribuables qui hébergent des Ukrainiens au sein de leur foyer fiscal ?
Le législateur a prévu un mécanisme de déduction (art. 156-II-2° ter du CGI) du revenu global d’une somme représentative des avantages en nature que les contribuables consentent, en l’absence d’obligation alimentaire, aux personnes âgées de plus de 75 ans qui vivent sous leur toit et dont le revenu imposable n’excède pas un certain plafond de ressources. Un député vient de poser une question écrite au Gouvernement sur les aides fiscales qui pourraient être mises en place pour dédommager les Français qui accueillent des réfugiés ukrainiens (JOAN 22 mars 2022, question n° 44915).
->Dépenses fiscales
Plafond de la franchise des impôts commerciaux pour les organismes sans but lucratif
Le législateur (art. 206-1bis du CGI) a instauré au profit des organismes sans but lucratif (associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les associations régies par la loi locale dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, les syndicats, les fondations reconnues d’utilité publique, les fondations d’entreprise, les fonds de dotation et les congrégations), pour les bénéfices réalisés dans le cadre de leurs activités lucratives accessoires, une exonération d’impôt sur les sociétés dans la limite d’un plafond. Leurs activités lucratives accessoires doivent pour cela réunir trois conditions : leur gestion doit être désintéressée ; les activités non lucratives doivent rester significativement prépondérantes ; le montant de leurs recettes d’exploitation ne doit pas excéder 60.000 €. Le seuil de la franchise d’IS et de TVA dont bénéficient les organismes sans but lucratif au titre de leurs recettes d’exploitation provenant de leurs activités lucratives accessoires, est indexé, chaque année, sur la prévision de l’indice des prix à la consommation, hors tabac, retenue dans le projet de loi de finances de l’année. Pour 2022, ce seuil est porté à 73.518 €.
->Procédure fiscale
Le Conseil constitutionnel valide les perquisitions fiscales informatiques
Le législateur a ajouté aux documents détenus sur le lieu de la visite, les documents accessibles ou disponibles depuis ce lieu (art. L. 16B du LPF – art. 11 L. n°2012-1510 du 29 déc. 2012). Il s’agissait de répondre aux problèmes auxquels était confrontée l’administration fiscale lorsque le lieu où se déroule la visite n’est pas celui où sont stockées les informations recherchées (par exemple, en cas de serveurs de stockage de données à distance). Estimant que ces dispositions méconnaissent le droit au respect de la vie privée et du principe de l’inviolabilité du domicile des contribuables ont demandé à la Cour de Cassation de transmettre au Conseil Constitutionnel une QPC portant sur cette extension du champ des documents susceptibles d’être saisis. Le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions contestées étaient conformes à la Constitution (Cons. const., 11 mars 2022, décis. n° 2021-980 QPC, Société H. et autres) car le législateur a procédé à une conciliation équilibrée entre l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale et le droit au respect de la vie privée.
Le rebond des résultats des contrôles de l’administration fiscale en 2021
Les contrôles fiscaux ont généré près de 10,7 Mds€ de recettes pour l’État en 2021, après une année 2020 compliquée en raison de la crise sanitaire qui avait conduit l’administration fiscale à interrompre les contrôles fiscaux pendant plusieurs mois (cf. rapport annuel de la Cour des comptes, v. Repères, février 2022). Les contrôles fiscaux effectués en matière de successions et de donations ont généré 1,5 Mds€. L’administration s’appuie plus que jamais sur le traitement automatique des données (45 % des contrôles ont ainsi été déclenchés à partir de fichiers produits par extractions de données dans les bases de l’administration fiscale). L’administration fiscale s’appuie sur l’expérimentation de la collecte et l’exploitation des données des contribuables sur les réseaux sociaux. L’utilisation de l’intelligence artificielle pour lutter contre la fraude aux impôts directs locaux s’intensifie. En 2021, l’administration fiscale s’est alliée à Google pour repérer les biens (ex. piscines, vérandas, courts de tennis) qui n’auraient pas été déclarés. Par ailleurs, la levée du « verrou de Bercy » décidée par le législateur (L. n° 2018-898 du 23 oct. 2018) qui a imposé la transmission au Parquet de tous les dossiers pour lesquels les impôts éludés dépassent 100.000 € poserait des difficultés car les magistrats se retrouvent face à un afflux d’affaires. Pour y remédier, la DGFIP doit davantage aiguiller les procureurs. Selon l’administration fiscale, 1200 dossiers ont été automatiquement transmis au Parquet en 2021, pour un montant de droits de 540 M€, soit une augmentation de 25 % par rapport à 2019. Par ailleurs, concernant la « relation de confiance » entre l’administration fiscale et les entreprises instaurée en 2019 par la loi ESSOC (L. n° 2018-727 du 10 août 2018), 800 PME sont entrées dans le programme d’accompagnement personnalisé contre seulement 118 à la fin de l’année 2019.
->Fiscalité locale
Le Conseil constitutionnel oblige le Gouvernement à revoir la compensation de la TH
Dans une récente décision rendue (Cons. const., 17 mars 2022, décis. n° 2021-982 QPC, Commune de la Trinité), le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles certaines dispositions relatives aux modalités de compensation de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales pour certaines communes membres d’un syndicat de communes (art. 16-IV de la L. n° 2019-1479 du 28 déc. 2019 de finances pour 2020), estimant que le législateur a méconnu, par les dispositions contestées, le principe d’égalité devant les charges publiques résultant de l’article 13 de la Déclaration des droits de 1789. Selon certains observateurs, le Conseil constitutionnel aurait été assez sévère avec l’État. Toutefois, l’absence de prise en compte du taux additionnel syndical de taxe d’habitation de 2017 dans le calcul de la compensation versée aux communes au titre de leur participation à un syndicat à contributions fiscalisées porte atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques.
Taxe foncière et déclaration d’abandon de la propriété à la commune : quelle constitutionnalité ?
Le Conseil Constitutionnel vient d’être saisi d’une QPC relative à l’article 1401 du CGI qui rend redevable de la taxe foncière la commune suite à la déclaration d’abandon de terres opérée à son profit par un propriétaire. Affaire à suivre. (CE, 3e ch., 18 mars 2022, Commune de Nice, Req. n° 454827).
->Impôt sur les sociétés
L’acte anormal de gestion : le Conseil d’État vient de mettre une limite à son application
C’est généralement l’arme de destruction massive de l’administration fiscale et la chimère du chef d’entreprise : l’acte anormal de gestion. Cette notion prétorienne permet à l’administration fiscale d’infliger des redressements à l’impôt sur les sociétés au motif qu’une entreprise aurait réduit sa base imposable au mépris de toute rationalité économique puisque constitue un acte anormal de gestion « l’acte par lequel une entreprise décide de s’appauvrir à des fins étrangères à son intérêt » (CE, Ass., 21 déc. 2018, Société Croë Suisse, Req. n° 402006). Cet outil, aux mains de l’administration fiscale, est au cœur d’une décision importante rendue par le Conseil d’État dernièrement (CE, 8e et 3e ch. réunies, 11 mars 2022, SARL Alone et Co, Req. n° 453016) qui semble changer la donne. Selon l’administration fiscale, le prix fixé lors de la promesse de cession était anormalement bas et il s’agissait selon elle (de même que selon le TA de Rennes et la CAA de Nantes) d’une « libéralité » accordée au cadre dirigeant. Mais selon le Conseil d’État, il n’y a pas d’acte anormal de gestion car la société n’a pas agi contre son intérêt. Le mécanisme d’intéressement était bien un instrument de motivation du directeur commercial, dont dépend la performance de l’entreprise, ce que les juges du fond n’ont pas admis. Or il est fréquent d’observer une application maximaliste par l’administration fiscale de la notion d’acte anormal de gestion, qui est un vecteur de rendement des contrôles fiscaux. En posant une limite à son application, le Conseil d’État semble venir au chevet des entrepreneurs dans le cadre des contentieux fiscaux.
MANAGEMENT PUBLIC
->Administration centrale
Projet de loi de programmation de l’Intérieur (2022-2027)
L’avis du Conseil d’État sur le projet de loi de programmation de l’Intérieur a été rendu le 10 mars 2022. Ce long texte de 28 pages est la réponse de la haute juridiction à sa saisine le 11 février 2022 d’un projet de loi « d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOPMI) et portant diverses dispositions en matière pénale et sur la sécurité intérieure ». L’avis relève plusieurs aspects importants (liste non exhaustive) : la coexistence, au sein du même projet de loi, de dispositions programmatiques et de dispositions normatives qui ne se heurte toutefois à « aucun obstacle constitutionnel » ; l’examen de ce projet de loi s’effectue à la veille d’échéances politiques majeures (« calendrier pour le moins inhabituel »), plus particulièrement pour des dispositions de programmation budgétaire « très volontaristes » qui s’inscrivent dans le cadre de la prochaine législature ; la structure du projet de loi et les intitulés (titres et chapitres) reposent sur un découpage artificiel et des formulations parfois sans rapport avec l’objet des articles, ce qui nuit à sa lisibilité ; la programmation budgétaire contenue dans le projet de loi n’a qu’un caractère indicatif, seul le législateur financier (Parlement) étant compétent pour déterminer les charges financières de l’État dans le cadre de la loi de finances annuelle ; l’articulation entre la loi de programmation et la prochaine loi de programmation des finances publiques ne peut pas être explicitée ; le projet de loi a été soumis à l’avis préalable de l’ensemble des instances dont la consultation est obligatoire.
->Relations avec les usagers
Traitement automatisé de données à caractère personnel (santé)
La création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « plateforme numérique du service d’accès aux soins » a été formalisée par la parution du décret du 21 mars 2022. Il s’agit de fournir aux acteurs orientant des patients vers une prise en charge ambulatoire les coordonnées et les plages de disponibilité des professionnels de santé qui proposent des créneaux horaires pour des soins non programmés.
Le décret définit : les finalités du traitement automatisé ; les catégories de données à caractère personnel qui y sont enregistrées ; les personnes qui ont accès à ces données ; la durée de conservation des données ; les droits reconnus aux personnes concernées et les modalités d’exercice de ces droits au titre du règlement 2016/679 du 27 avril 2016 (RGPD).
->Fonction publique
Composition du comité de pilotage stratégique de l’encadrement supérieur de l’État
L’arrêté relatif à la composition du comité de pilotage stratégique de l’encadrement supérieur de l’État est paru au Journal officiel le 23 mars 2022. Présidé par le délégué interministériel à l’encadrement supérieur de l’État, le comité comprend : les secrétaires généraux de chaque ministère ou leurs représentants ; le directeur général de l’administration et de la fonction publique ou son représentant ; le directeur interministériel de la transformation publique ou son représentant ; le directeur du budget ou son représentant ; le directeur de l’Institut national du service public ou son représentant ; le directeur des services administratifs et financiers du Premier ministre ou son représentant.
->Ressources documentaires
Lutte contre le terrorisme
Le décret n° 2022-396 du 18 mars 2022 relatif aux conditions d’exercice des fonctions d’assistant spécialisé en matière de lutte contre le terrorisme est paru au Journal officiel le 20 mars 2022. Le texte détermine les matières du diplôme requises pour exercer les fonctions d’assistant spécialisé auprès des juridictions et des magistrats compétents en matière d’actes de terrorisme (ou auprès du ministère public pour la prévention des actes de terrorisme). On retiendra que ce diplôme valide une formation dans l’une au moins des matières suivantes : droit pénal et procédure pénale ; criminologie ; histoire ; sociologie ; psychologie ; anthropologie ; sécurité et défense ; géopolitique ; sciences politiques ; langue étrangère ; informatique et cyber technologies.
EUROPE
->Politique européenne
Aide à l’Ukraine et sanctions contre la Russie
Dès le 21 février 2022, le Conseil a adopté une opération d’assistance macrofinancière d’urgence d’un montant de 1,2 Md€ sous la forme de prêts destinés à favoriser la stabilité en Ukraine qui avait été proposée le 1er février. Cette mesure avait pour objectif de fournir une aide rapide dans une situation de crise aiguë et de renforcer la résilience de l’Ukraine. Puis, à la suite de l’invasion russe, le Conseil a adopté le 25 février 2022 des sanctions individuelles et économiques de grande ampleur, qui ont été à plusieurs reprises étendues.
->Budget européen
Premier rapport sur l’application du plan de relance
Le 1er mars 2022, la Commission européenne a publié son premier rapport annuel sur la facilité pour la reprise et la résilience. Elle y précise que la mise en œuvre se passe bien. La Commission a fourni une évaluation positive de 22 plans. Jusqu’à présent, le montant alloué à ces plans s’élève à 445 Mds€ (291 Mds sous forme de subventions et 154 Mds sous forme de prêts). À la suite de l’approbation de ces 22 plans par le Conseil, la Commission a rapidement versé 56,6 Mds€ de préfinancements aux 21 États membres qui en avaient fait la demande.
La Commission publie ses orientations sur la conditionnalité des fonds
Le 2 mars 2022, la Commission européenne a publié ses lignes directrices sur le régime général de conditionnalité, qui vise à protéger le budget de l’UE contre les violations des principes de l’État de droit. Outre le détail desdites violations qui seront prises en compte, elle précise ainsi la nécessité que les mesures de suspension des versements européens proposées soient proportionnées, appropriées et nécessaires pour remédier aux situations en cause.
->Euro
La Banque centrale européenne réduit sa politique de soutien monétaire
Le 10 mars 2022, après d’intenses discussions dans un contexte d’inflation et de guerre en Ukraine qui pèse sur la croissance, la Banque centrale européenne a décidé de progressivement mettre fin à sa politique d’achat d’actifs sur les marchés financiers qui avait débuté en 2014 : d’environ 60 Mds€ par mois actuellement, elle passerait à 40 Mds en avril, 30 Mds en mai et 20 Mds en juin pour se terminer complètement au troisième trimestre. Quant au taux d’intérêt, négatif depuis 2014, et à -0,5 % depuis septembre 2019, sa hausse est prévue pour plus tard.
->Fiscalité
Accord au Conseil sur le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières
Le 15 mars 2022, le Conseil est parvenu à un accord sur le règlement établissant le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF). Il s’agit de l’un des éléments clés du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » de l’Union européenne en visant les importations de produits à plus haute intensité de carbone. Il est en lien avec une proposition sur les ressources propres déposée par la Commission l’été 2021.
INTERNATIONAL
->Monnaies
Face à l’inflation la Réserve fédérale relève ses taux d’intérêt
Comme prévu depuis décembre, la Réserve fédérale américaine (Fed) a relevé le 16 mars quasiment à l’unanimité ses taux directeurs à court terme de 0,25 point de pourcentage pour les porter entre 0,25 % et 0,50 %, néanmoins trop tardivement selon certains analystes. Cette accélération du resserrement de la politique monétaire vise à calmer l’inflation que l’institution voit atteindre son pic en avril à 7,25 %. D’abord attentive aux conséquences de la pandémie et aux risques de chômage, elle n’a pas réagi immédiatement aux alertes relatives à l’inflation, qui, sur 12 mois atteint 7,9 %. Désormais, les milieux financiers s’attendent à de nouvelles hausses dès cette année. D’autres majorations de ce taux sont attendues d’ici la fin de l’année par Wall Street. Les prévisions du comité monétaire de la Fed indiquent un taux entre 1,75 et 2 % à cette échéance.