repere_2024

REPÈRES (OCTOBRE 2024) – REVUE-GFP N°6 – 2024

BUDGET DE L’ÉTAT ET DES OPÉRATEURS
->Données générales sur les finances publiques

En octobre 2024, les prix à la consommation augmentent de 1,2 % sur un an

Dans une note publiée le 31 octobre 2024, l’INSEE précise que sur un an, selon l’estimation provisoire réalisée en fin de mois, les prix à la consommation augmenteraient de 1,2 % en octobre 2024. Cette stabilité de l’inflation par rapport au mois précédent résulterait d’un ralentissement des prix des services et d’une nouvelle baisse de ceux de l’énergie.

Troisième trimestre 2024 : le PIB accélère légèrement (+0,4 %)

Dans une note publiée le 30 octobre 2024, l’INSEE indique que le PIB progresse légèrement au troisième trimestre : de +0,4 %, après +0,2 % au deuxième trimestre. Cette hausse du PIB est en particulier liée aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris.

La demande intérieure retrouve un peu d’allant sous l’effet du rebond de la consommation des ménages (+0,5 % après +0,0 % au trimestre précédent). La contribution du commerce extérieur à la croissance demeure elle aussi légèrement positive au troisième trimestre (+0,1 % après +0,2 % au deuxième trimestre), les importations se repliant plus fortement (-0,7 % après +0,1 %) que les exportations (-0,5 % après +0,5 %).

->Procédure budgétaire

Le dépôt du projet de loi de finances pour 2025 à l’Assemblée nationale

Le projet de loi de finances pour 2025 a été enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2024. Ce texte s’inscrit dans une stratégie pluriannuelle de redressement des comptes publics, afin de ramener le déficit public à 5 % du PIB dès 2025, avec un objectif de retour sous les 3 % à l’horizon 2029, au lieu de 2027 comme initialement prévu dans la loi de programmation des finances publiques du 18 décembre 2023 (v. Repères, déc. 2023).

Le projet de loi de finances pour 2025 repose sur un effort budgétaire considérable, à hauteur de 60 Md€ d’économies. Les mesures de consolidation porteront prioritairement sur la dépense, qui représente près de 57 % du PIB en France contre moins de 50% en moyenne dans l’ensemble des États de l’Union européenne en 2024. Sur les 60 Md€ d’économies à réaliser, les deux tiers (soit environ 40 Md€) seront portés par des mesures de réduction de la dépense publique. Cet effort en dépense devrait être partagé entre l’État, ses opérateurs, les collectivités territoriales et les administrations de Sécurité sociale.

En parallèle, les mesures de recettes représentent environ un tiers de l’effort total de consolidation des comptes publics, soit environ 20 Md€. Dans le cadre du partage de l’effort, une participation au redressement collectif sera demandée aux plus grandes entreprises (plus de 1 Md€ de chiffre d’affaires annuel, soit quelques centaines d’entreprises sur 4,5 M d’entreprises au total) et aux plus hauts revenus (plus de 500 000 € de revenu fiscal de référence par an pour un couple, soit moins de 0,3 % des ménages imposables). Ces mesures devraient être ciblées, exceptionnelles et temporaires. La discussion en séance publique a débuté le lundi 21 octobre 2024. Les débats sur la première partie du PLF n’ayant pu s’achever dans les délais prévus initialement par le Gouvernement, ils reprendront début novembre. Et lors du conseil des ministres du 23 octobre 2024, le Premier ministre a été autorisé à faire éventuellement usage de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution.

->Budgets des pouvoirs publics

Les investissements de la Direction des services de navigation aérienne (DSNA)

Dans un rapport publié le 9 octobre 2024, la Cour des comptes a examiné les investissements de la DSNA. Prestataire national du contrôle aérien au sens des règlements européens, la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), au sein de la direction générale de l’aviation civile (DGAC), a assuré en 2022 le contrôle de 2,92 M de vols traversant l’espace aérien français, soit près du tiers des vols européens. Si le premier objectif est de garantir leur sécurité, la capacité, l’efficacité et la fiabilité de ce contrôle représentent des enjeux importants pour les acteurs économiques concernés.

Les redevances que versent les compagnies aériennes pour couvrir les coûts de ce contrôle sont la principale recette du budget annexe du contrôle et de l’exploitation aériens (BACEA). Comme pour les autres prestataires européens, le tarif de ces redevances et les performances de la DSNA sont encadrés et suivis par la Commission européenne, qui veille à ce que les compagnies aériennes disposent, au moindre coût, des capacités de contrôle adaptées à la réalité du trafic.

Or, le prestataire français, jadis en pointe de la performance, se situe désormais en queue du peloton européen. En 2022, la DSNA a été le deuxième prestataire européen le plus générateur de minutes de retard liées au contrôle aérien, ce qui situe la performance de la France loin derrière celle des États contrôlant un nombre de vols équivalent. Par ailleurs, le contrôle aérien français est le seul au sein de l’Union européenne à recourir encore à des bandelettes papier, sur des systèmes qui remontent pour certains aux années 1980. Cette situation va de pair avec l’obsolescence de nombreux matériels (logiciels, matériels, infrastructures) dont le maintien en conditions opérationnelles laisse à désirer. Enfin, plus qu’ailleurs en Europe, le contrôle aérien français se caractérise à la fois par l’extrême éparpillement de ses implantations (5 centres en route, 30 approches, 80 tours de contrôle) et par la complexité et la disparité de systèmes informatiques souvent issus de développement internes. Ce constat constitue une menace pour l’équilibre du budget annexe, en raison des pénalités encourues et surtout du risque de perte de recettes si une partie du trafic aérien devait contourner à terme l’espace aérien français faute de capacités de contrôle. Cette situation a justifié le lancement dès le début des années 2010 d’importants projets de modernisation.

Et pour la Cour des comptes, dans l’ensemble, la DSNA n’a pas su maîtriser ces grands projets dont les délais ont été maintes fois repoussés, dont les coûts prévisionnels ont explosé – ceux des trois principaux dépassant désormais 2 Md€ – et qui, plus de dix ans après leur lancement et malgré des dépenses élevées, n’ont encore eu que peu d’impact sur les performances du contrôle aérien. Cet échec résulte avant tout de déficiences en matière d’organisation : implication insuffisante du management aux niveaux les plus élevés, cloisonnement entre les concepteurs et les utilisateurs au sein de la DSNA, gouvernance des projets insuffisante, absence de véritable pilotage économique et financier.

La Cour des comptes constate que depuis 2018, et pour replacer les grands projets d’investissement sur une trajectoire favorable, la DSNA a décidé et mis en œuvre des mesures vigoureuses qui touchent à la réorganisation de ses services, à la gestion des projets, à la stratégie d’évolution et aux principes de gestion des systèmes techniques ainsi qu’aux relations avec les industriels. La Cour des comptes considère que ces réformes doivent se poursuivre, s’approfondir et se consolider pour aboutir aux objectifs souhaités mais qu’il est encore trop tôt pour apprécier leurs effets concrets.

->Budget des opérateurs

Le rachat par l’État de la Société française Donges-Metz

Dans un rapport publié le 31 octobre 2024, la Cour des comptes a examiné les conditions du rachat de la Société française Donges-Metz pour donner une suite à un signalement anonyme reçu sur sa plateforme de signalement. L’État avait choisi de racheter pour 33 M€, entre fin 2021 et début 2022, les actions de la Société française Donges-Metz (SFDM), en charge de l’exploitation de l’oléoduc Donges-Melun-Metz (DMM) et de ses installations, communément appelé « Système DMM ». Dans son rapport, la Cour estime que le rachat par l’État de la SFDM apparaît comme la solution la plus pragmatique, garantissant la poursuite de l’exploitation après l’échéance de la convention. Selon elle, cette opération s’est déroulée de manière régulière. Cependant, si ce rachat préserve, à court terme, les intérêts de l’État, il n’en demeure pas moins que le fait pour ce dernier d’être propriétaire d’un outil industriel de ce type est singulier, les autres réseaux de transport d’hydrocarbures appartenant à des sociétés privées qui en assurent l’exploitation et l’entretien, le secteur étant libéralisé depuis 1992. En qualité de propriétaire gestionnaire, l’État risque de devoir faire face à des investissements importants pour prendre en compte les impératifs de la transition énergétique. Deux options se dessinent aujourd’hui : la revente de la société ou son maintien dans le giron de l’État. Dans l’hypothèse d’une vente, les obstacles qui étaient apparus lors de l’appel d’offre sont toujours d’actualité (position de l’Autorité de la concurrence et réticences des investisseurs), et ils devront être surmontés. La Cour des comptes recommande donc que l’État clarifie sa stratégie concernant le devenir de la société, entre une cession totale à un opérateur privé, ou le maintien de la situation actuelle, avec ses avantages et ses risques.

COMPTABILITÉ PUBLIQUE
->Responsabilité des gestionnaires publics

Véronique Hamayon, nouvelle Procureure générale près la Cour des comptes

C’est finalement Véronique Hamayon, présidente de la 6e chambre de la Cour des comptes depuis le 5 septembre 2022, qui a été nommée Procureure générale près la Cour des comptes lors du conseil des ministres qui s’est tenu le 10 octobre 2024. Elle succède à Louis Gautier, qui occupait cette fonction depuis le 17 septembre 2022 (v. Repères, sept. 2024) et qui avait déclaré au Journal Le Monde : « notre mission est la première digue de l’État de droit » (Le Monde, 27 sept. 2024), ce qui lui avait permis de revenir sur ses deux années de mandat et sur le rôle et les limites de l’instance.

La Chambre du contentieux de la Cour rend deux nouveaux arrêts en octobre 2024

Les 7 et 10 octobre 2024, la chambre du contentieux a rendu public deux nouveaux arrêts : Commune de Sainte-Eulalie-en-Born (Landes) et Commune de Felleries (Nord).

Par le premier arrêt « Commune de Sainte-Eulalie-en-Born (Landes) », les magistrats financiers ont sanctionné l’ancienne secrétaire de mairie – directrice générale des services de la commune pour n’avoir pas transmis à l’assureur plusieurs déclarations de sinistre dans les délais prescrits, entraînant selon la Cour un préjudice financier significatif évalué à 44 770,31 €. Ce préjudice a été caractérisé comme significatif au regard du budget de fonctionnement de la commune, d’environ 1,5 M€. Selon la Cour, par ces infractions répétées aux règles d’exécution des recettes, la directrice générale des services avait commis une faute grave entraînant un préjudice financier significatif. Tenant compte des circonstances de l’espèce et de la situation de l’intéressée, la Cour des comptes a condamné l’unique personne renvoyée à une amende de 1000 €.

Par l’autre arrêt « Commune de Felleries (Nord) », le Parquet avait renvoyé le maire, quatre membres du conseil municipal et une secrétaire de mairie pour des faits susceptibles de constituer une gestion de fait (art. L. 131-15 du CJF). La Cour des comptes a considéré que les faits d’encaissement de recettes par deux associations sans titre légal pour manier les sommes en cause étaient constitutifs de gestion de fait. Ces irrégularités ont été imputées au maire et à deux adjointes, qui avaient donné instruction aux deux associations d’effectuer les opérations litigieuses, ainsi qu’au président et à la trésorière de la seconde association, ces derniers, par ailleurs conseillers municipaux, s’étant prêtés à ce dispositif. Eu égard aux circonstances de l’espèce et, en particulier, de la bonne foi et de la contribution active de certaines des personnes renvoyées à la cessation des irrégularités et de leur degré respectif d’implication dans le maniement des fonds publics, la Cour a prononcé une amende de 3000 € à l’encontre du maire, 2000 € à l’encontre de la première adjointe, 1000 € à l’encontre de l’adjointe déléguée au musée, 1000 € à l’encontre de la trésorière de l’association « Comité des fêtes de Felleries » et membre du conseil municipal, ainsi qu’une dispense de peine pour le président de l’association « Comité des fêtes de Felleries » et conseiller municipal. A noter que dans ses réquisitions orales, le Procureur général a écarté des poursuites la secrétaire de mairie, et il n’y avait donc plus lieu pour la formation de jugement de la Cour des comptes de statuer sur sa responsabilité.

FINANCES LOCALES

->Données générales sur les finances locales

Projet de loi de finances pour 2025 et collectivités territoriales

Le contexte budgétaire de l’État impacte bien évidemment l’ensemble des secteurs administratifs et les collectivités territoriales n’échappent pas à une réduction de nombreuses mesures en 2025. Le projet de loi de finances pour 2025 réduit de nombreux dispositifs. En termes de ressources, la baisse sera de l’ordre de 5 Md€, avec la création d’un fonds de précaution, un gel de la TVA et la baisse du FCTVA. Sur ce dernier point, les dépenses de fonctionnement éligibles ne le seront plus et le taux de remboursement passera de 16,4 % à 14,85 %. D’autres mesures impacteront bien évidemment les collectivités territoriales comme la réduction du Fond vert passant de 2,5 Md€ à un 1 Md€. Les départements sont en revanche aidés concernant leurs politiques sociales, avec une aide financière de 100 M€ pour soutenir les dépenses en mobilité des aides à domicile et la branche autonomie (personnes âgées et personnes en situation de handicap) sera revalorisée de 2,4 Md€.

->Transferts de l’État

Rapport de la Cour des comptes sur la réforme de la DGF

La Cour des comptes, dans un rapport rendu public le 9 octobre 2024, s’est livrée à un nouvel examen du principal concours financier de l’État aux collectivités territoriales (27,2 Md€ en 2024). Notons que régulièrement des projets de réforme sont émis par diverses instances. L’une des critiques principales est connue il s’agit de la « fossilisation » de certaines parts liée à d’anciennes réformes et donc des sommes d’argent qui n’évoluent pas. Sans entrer dans les nombreuses propositions, la Cour des comptes préconise d’utiliser pour l’ensemble des composantes des critères plus dynamiques (comme le revenu), continuer la réforme du potentiel fiscal en intégrant dans son calcul les fractions d’impôts nationaux (taxe sur les conventions d’assurance, taxes sur les énergies) et recentrer la DGF. En termes de fonctionnement, les juges préconisent également d’attribuer « la DGF aux seules intercommunalités pour leur compte et celui des communes qui en sont membres, en faisant masse pour chaque intercommunalité de son potentiel fiscal et de celui des communes ».

La Cour formule au total 12 recommandations pour rendre les dotations de péréquation plus efficaces. Toutefois, la Cour souligne que les disparités dans la répartition de la DGF, qu’il s’agisse des écarts entre collectivités favorisées et défavorisées, ou même entre collectivités présentant des caractéristiques similaires, ne peuvent être corrigées dans le cadre de l’architecture actuelle de la DGF. Ainsi, la Cour propose une treizième recommandation : mener une réforme systémique de la DGF à coût constant pour les finances publiques. La nouvelle DGF comporterait deux volets : une dotation forfaitaire et un complément sélectif péréquateur. Ces deux volets seraient distribués aux collectivités territoriales en fonction de données entièrement contemporaines, telles que la population, les ressources, les charges et la centralité.

->Dépense publique locale

Cap sur les enjeux financiers des polices municipales

L’observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) continue son travail d’analyse et d’évaluation des politiques publiques locales. En matière de police municipale ou intercommunale, en 2022, 11 % des communes étaient dotées d’un tel service public mais ce taux monte à 82 % dans les communes de plus de 3 500 habitants. En termes de dépenses totales, cela représente 2,2 Md€ en 2023 avec un niveau médian de dépenses de fonctionnement de 36,5 € par habitant en 2023. Les dépenses d’investissement sont quant à elles beaucoup plus faibles de l’ordre de 155 M€.

Cap sur l’ampleur des investissements locaux actuels

L’examen des investissements locaux constitue une question constante de l’étude des politiques publiques locales. Il est tout à fait normal que l’OFGL revienne régulièrement sur cette question. Dans ce nouveau rapport, l’OFGL effectue des comparaisons sur plusieurs cycles. D’un point de vue technique, il convient d’utiliser un coefficient déflateur, ce qui aboutit au résultat suivant : « pour réaliser l’équivalent de ce qui était fait avec 1 euro de 1995, il faut débourser actuellement environ 1,7 euro ». Sur le mandat actuel, la tendance est bien plus élevée que lors de la précédente mandature avec une hausse de +6 %. Ainsi, sur le mandat actuel (2020-2025) l’augmentation en termes de volume d’investissement sera comprise entre 24 et 28 Md€, soit 4 à 5 Md€ de plus par an que le cycle précédent.

FINANCES SOCIALES

->Situation des comptes sociaux et orientations générales de politique sociale

La déclaration de politique générale et les annonces dans le domaine social

Le Premier Ministre Michel Barnier a prononcé le 1er octobre la déclaration de politique générale de son gouvernement. Les annonces sont restées assez générales à travers cinq grands axes prioritaires, notamment dans le domaine social où il s’en est tenu largement à la poursuite des chantiers engagés. Il s’est déclaré prêt à une reprise du dialogue social sur deux sujets majeurs pour la maîtrise des finances sociales : l’emploi des seniors et l’assurance chômage dont le projet gouvernemental de réforme avait été abandonné par le précédent Premier Ministre fin juin (v. Repères, juin 2024) ; la réforme des retraites mise en œuvre par la loi du 15 avril 2023, à propos de laquelle il a souligné qu’il était impératif de préserver l’équilibre durable du système par répartition mais que des questions comme les retraites progressives, l’usure professionnelle et l’égalité entre les femmes et les hommes face à la retraite « méritaient mieux qu’une fin de non-recevoir ». Les autres thèmes abordés devront être précisés dans les projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale pour 2025. S’agissant des salaires, le SMIC sera revalorisé de 2 % au 1er novembre 2024, les branches professionnelles dont les minima salariaux sont inférieurs au SMIC sont priées d’engager des négociations rapidement, le dispositif d’allègement des charges qui freine la hausse des salaires au niveau du SMIC sera revu et la politique d’intéressement-participation sera relancée; concernant l’emploi et de la formation professionnelle, le RSA, dont la réforme a été engagée avec succès ne doit pas être seulement un filet de sécurité et les aides à l’emploi et à l’apprentissage seront réexaminées; dans le domaine de la santé, le Premier Ministre a confirmé l’augmentation du recrutement de médecins (« programme Hippocrate »), et un recours accru aux internes et aux médecins étrangers dans les territoires en déshérence, ainsi qu’aux médecins retraités grâce à un cumul favorable des rémunérations et des retraites ; il a rappelé la nécessité de désengorger les urgences grâce l’accélération de l’accès aux soins, la libération du temps médical pour les médecins, l’élargissement des compétences pour les infirmiers (loi « infirmières, infirmiers »), kinésithérapeutes et pharmaciens, et fait de la santé mentale une cause nationale. Une mention a été également faite de la politique familiale et des familles monoparentales. Michel Barnier s’est enfin prononcé pour la création d’une « allocation sociale unique » qui regrouperait toutes les allocations sociales sauf l’AAH, mais dont le montant devra toujours rester inférieur au SMIC pour encourager le travail.

Rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale et poursuite du dérapage

La Commission des comptes de la Sécurité sociale a rendu son deuxième rapport annuel sur les exercices 2024-2025. Pour l’année 2024, la Commission prévoit à présent un déficit des régimes obligatoires de base et du FSV de -18,5 Md€ ce qui est supérieur à la prévision de mai dernier qui était déjà de -16,6 Md€ et, a fortiori, à celle de la LFSS pour 2024 de -10,6 Md€ (v. Repères, mai 2024). Cela est observé, malgré le fait que les mesures nouvelles en recettes prévues pour la LFSS pour 2024 étaient bien plus significatives que pour la LFSS pour 2023 (soit +3,7 Md€), en particulier du fait de la réaffectation de 0,15 points de CSG de la CADES à la CNSA et de l’imposition de certaines indemnités et compléments de rémunérations. Comme les années précédentes, le déficit de la Sécurité sociale est essentiellement porté par la branche Maladie (-14,7 Md€ soit un dérapage de 3,4 Md€ par rapport à l’exercice précédent) et par la branche Vieillesse (-6,5 Md€). Sont en revanche en excédent : le FSV (+0,8 Md€), les Accidents du travail /maladies professionnelles (+0,7 Md€), la Famille (+0,3 Md€) et l’Autonomie (+0,9 Md€). L’aggravation du déficit par rapport à la prévision est pour l’essentiel imputable aux moins-values de recettes de 7,2 Md€ portant à la fois sur les cotisations sociales du fait d’une surestimation de la croissance de la masse salariale et sur les recettes fiscales affectées, spécialement de la TVA, en raison de la moindre croissance du PIB (+1,1 % réalisés en 2024 contre +1,4 % prévus) ; s’y ajoutent la progression supérieure des dépenses, et en particulier de l’ONDAM, et l’effet de l’indexation des prestations notamment des retraites.

Pour l’année 2025, avant toute prise en compte des mesures nouvelles du PLFSS pour 2025 (v. infra.), le déficit tendanciel global des ROB et du FSV poursuivrait son dérapage à -28,6 Md€. L’impasse prévisionnelle de la branche Maladie s’aggraverait encore à -18,7 Md€, celle de la Vieillesse à -11,1 Md€ ; la Famille se ramènerait à l’équilibre (-0,1 Md€) ; seraient encore en excédent la branche AT-MP (0,5 Md€), l’Autonomie (0,2 Md€) et le FSV (0,8 Md€). Cette aggravation proviendrait d’un découplage entre, d’une part, l’évolution des recettes de cotisations (+2,5 %) et de la CSG du fait du ralentissement de la progression de la masse salariale et de l’inflation et, d’autre part, de celle des dépenses (+3,8 %), en raison de la poursuite de la croissance de l’ONDAM ( 3,7 % en tendanciel) et du poids des pensions de retraite qui portent les conséquences des revalorisations opérées les années précédentes et profitent encore peu des effets de la réforme de 2023. La fiabilité de ces prévisions repose très largement sur celle du taux de croissance du PIB (les hypothèses économiques associées au PLF et au PLFSS pour 2025 prévoient une progression de +1,1 % comme pour l’année 2024) ; mais, dans son avis du 8 octobre dernier, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a estimé que « le scénario macroéconomique pour 2025 est dans l’ensemble fragile ». Il estime en effet que la croissance pourrait être fortement affectée par « l’orientation restrictive du scénario de finances publiques, qui se traduit notamment par un repli de la demande publique et des mesures de hausse des prélèvements obligatoires atteignant un point de PIB », et il pointe également une prévision trop optimiste de la progression de la masse salariale sur laquelle sont assises les cotisations sociales en raison de la baisse très sensible de l’inflation. Ce danger est souligné par de nombreux économistes, l’OFCE évoquant même un impact déflationniste du budget qui limiterait la progression du PIB à +0,8 %.

->Lois de financement de la Sécurité sociale

La présentation du PLFSS pour 2025

Le conseil des ministres du 10 octobre a délibéré sur le PLFSS pour 2025. S’agissant de l’exercice en cours, le déficit de la LFSS pour 2024 a été réévalué à -18 Md€, suivant en cela les prévisions de la Commission des comptes de la Sécurité sociale (v. supra). Le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV prévu pour 2025 serait de -16 Md€, à savoir -13,4 Md€ pour la Maladie, -3,1 Md€ pour la Vieillesse, -0,4 Md€ pour l’Autonomie, 0 Md€ pour la Famille, +0,2 Md€ pour les Accidents du travail et + 0,7 Md€ pour le FSV. Le projet de texte traduit donc une inflexion volontariste par rapport aux prévisions tendancielles de la Commission des comptes de la Sécurité sociale. Pour autant le Gouvernement a assuré que les engagements antérieurs seraient respectés : la réforme des retraites de 2023, pour laquelle le Premier ministre s’est déclaré ouvert à des aménagements mais sans remettre en cause le cadre financier global, les engagements conventionnels pris avec les professionnels de santé dans le cadre de l’accord de mai dernier (v. Repères, juin 2024), la réforme du service de la petite enfance et du complément de mode de garde, les efforts en termes de recrutement et d’investissement pour le grand âge et le handicap… Pour limiter la progression de la dépense sociale et amorcer le redressement à partir de 2025, le Gouvernement va mettre en œuvre, branche par branche, un certain nombre des pistes – mais inégalement documentées – qui ont été proposés dans les rapports de la Cour des comptes et les revues de dépenses des Inspections générales, qui ont déjà été analysées (v. Repères, sept. 2024). Les mesures les plus importantes portent sur les retraites (5,9 Md€ au total), avec le décalage de six mois de l’indexation sur l’inflation des pensions (à l’exception du minimum vieillesse – ASPA – et de l’allocation veuvage, qui resteront revalorisées au 1er janvier 2025) – ce qui dégagera 3,6 Md€ d’économies ; s’y ajoute l’effet du relèvement de 4 points du taux de cotisation des employeurs territoriaux et hospitaliers à la CNRACL (2,3 Md€ en 2025 suivis d’une autre tranche en 2026) pour faire face à la situation catastrophique de ce régime (v. Repères, sept. 2024) ; l’OFCE a chiffré à 300 € la perte annuelle de revenu qui s’ensuivrait pour les retraités ayant un niveau de vie proche du niveau médian. Il est prévu, en second lieu, un freinage des dépenses de santé (3,8 Md€ d’économie escomptés), puisque la progression de l’ONDAM devrait être ramenée à 2,8 % en 2025 (+3,2 % prévus en 2024) ; plusieurs leviers seront actionnés à cet effet : une augmentation du ticket modérateur (avec un report corrélatif probable sur les complémentaires santé) pour 1,1 Md€, une baisse du plafond des indemnités journalières d’arrêts de travail (0,6 Md€), un effort en prix et volume sur les médicaments et produits de santé (1,4 Md€) et l’optimisation des achats des hôpitaux (0,7 Md€). L’une des mesures les plus commentées est le reprofilage des allègements généraux de cotisations sociales, dans le sens des conclusions du rapport Bozio-Wamser (v. Repères, sept. 2024) : la réduction de 2 points des exonérations de cotisations sociales au niveau du SMIC en 2025 devrait alléger la compensation de l’État de 4 Md€, elle sera suivie d’une deuxième étape de réduction des exonérations de 2 points entre 1 et 1,3 SMIC en 2025 (mais assortie parallèlement d’un renforcement de celles-ci entre 1,3 et 1,8 SMIC) ; une fiche actualisée du site FIPECO fait l’historique de cette politique d’allègement des charges et résume les principales analyses qui ont pu être faites de ses effets. Au total, en prenant en compte la suppression de niches sociales (0,7 Md€) et les économies demandées aux partenaires sociaux dans le cadre de la reprise de la négociation sur l’Assurance chômage (0,4 Md€ ; v. infra), l’effort demandé sur la dépense sociale stricto sensu devrait être d’environ 15 Md€. Des économies sont par ailleurs prévues dans le PLF pour 2025 dans le domaine de l’emploi (2,9 Md€) et des arrêts de travail des fonctionnaires. Comme pour le PLF pour 2025, le début des discussions à l’Assemblée nationale a été chaotique, le Gouvernement ayant été battu en commission notamment sur sa mesure phare concernant la réforme des allègements de cotisations sociales.

Le PLF pour 2025 et le « stop » aux arrêts de travail dans la fonction publique

Le plan d’économie contenu dans le PLF pour 2025 porte sur 20 Md€. À ce stade, seuls 15 Md€ correspondant aux lettres plafonds adressées en août dernier par le Gouvernement Attal avaient été documentés. Le Gouvernement vient de préciser le contenu des 5 Md€ restant. La mesure la plus commentée a concerné le durcissement du régime des arrêts de travail dans la fonction publique (montant de l’économie attendue : 1,2 Md€ sur le budget de l’État). Le Gouvernement envisage d’aligner les règles applicables aux fonctionnaires sur celles des salariés du privé en portant le délai de carence de 1 à 3 jours et en réduisant à 90% le taux d’indemnisation, sauf dans des situations spécifiques (affections de longue durée). Parallèlement, il envisage, dans le cadre du PLFSS pour 2025 de rendre « d’ordre public » le délai de carence dans le secteur privé, ce qui rendrait impossible la compensation par les employeurs de la perte de salaire subie par les salariés.

->Dette sociale

Rapport de l’Assemblée nationale sur le financement de la dette sociale

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a rendu un rapport d’information sur la gestion de la dette sociale présenté par les députés Stéphanie Rist (Renaissance) et Hadrien Clouet (LFI). Après avoir précisé le périmètre de la dette sociale (dette des régimes obligatoires de base de Sécurité sociale repris par la CADES et dette portée par l’ACOSS, mais sans inclure la dette de l’Assurance chômage, des régimes complémentaires et des hôpitaux), les rapporteurs font un historique des modalités de traitement des déficits et de la dette des régimes de Sécurité sociale, en passant par son « cantonnement » avec la création de la CADES en 1996 et la prolongation de la durée de vie de celle-ci, la dernière par la loi organique du 7 août 2020. Mais ils estiment que quatre ans après le dernier programme de reprise de dettes de 136 Md€ par la CADES, et la prolongation de la durée de celle-ci jusqu’au 31 décembre 2033, la dégradation continue des comptes sociaux, qui s’est poursuivie après la crise sanitaire, va contraindre l’ACOSS à porter une dette qui en 2027 pourrait s’élever, selon le HCFiPS, à entre 70 et 90 Md€, alors même que cet organisme n’est pas outillé pour porter de tels montants de déficits. Deux scénarios seraient alors envisageables : soit mettre un frein à la croissance de la dette sociale en tarissant les déficits des régimes sociaux qui en sont à la source, par une augmentation des ressources ceux-ci, la CSG et les cotisations sociales ; soit prévoir une réduction des dépenses des régimes sociaux portant principalement sur les dépenses d’Assurance maladie, avec une baisse drastique du taux d’évolution de l’ONDAM. En tout état de cause se poserait la question d’une reprise par la CADES des déficits n’entrant pas dans le champ des lois ordinaires et organiques du 7 août 2020 (soit environ 35 Md€) à assortir d’une augmentation de ses ressources ou d’une prolongation de sa durée de vie. Les rapporteurs évoquent enfin d’autres pistes qui permettraient de consolider sur le plan institutionnel les modalités de traitement de la dette sociale.

Politique d’allègement des charges et du coût du travail

Vers quelle augmentation du SMIC pour relever le revenu disponible d’un salarié ?

La DRESS a publié une analyse de la problématique du « coin socio-fiscal », c’est-à-dire l’écart qui apparaît entre le salaire majoré des cotisations sociales patronales payé par l’employeur et le revenu disponible du salarié, problématique qui est au cœur de la mise en cause de la politique des allègements généraux de cotisations sociales et à laquelle le Gouvernement veut commencer à s’attaquer dans le PLFSS pour 2025 (cf. supra). L’analyse des variations de cet écart est intéressante pour apprécier de combien le revenu disponible augmente réellement lorsqu’on accroît le salaire brut d’un salarié payé au SMIC : il dépend d’un grand nombre de paramètres, en premier lieu de l’effet de la diminution des allègements généraux de cotisations sociales dont bénéficie l’employeur entre 1 et 1,6 SMIC, mais aussi de la situation personnelle du salarié (célibataire ou chargé de famille) ainsi que de son éligibilité à plusieurs prestations sociales (RSA, prime d’activité, aides au logement) qui diminuent lorsque le salaire augmente, et aussi de sa position au regard du barème de l’impôt sur le revenu. À titre d’illustration, l’étude montre que pour relever de 100 € le revenu disponible, le coût du travail (salaires + cotisations patronales) devrait augmenter de 442 €.

->Dépenses de santé/Hôpital/Assurance-maladie

Rapport de la mission d’information et de contrôle de la Sécurité sociale du Sénat sur les enjeux de la branche Accidents du travail/maladies professionnelles

La Mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale de la commission des affaires sociales du Sénat a rendu un rapport sur la situation de la branche Accidents du travail/Maladies professionnelles de la Sécurité sociale. Cette branche est excédentaire depuis 2013 (sauf en 2020), l’excédent prévu pour 2024 étant de 0,7 Md€ ; depuis 2016 les excédents cumulés atteindraient un montant de 7,1 Md€ ; il n’est pas dans la vocation d’une branche de la Sécurité sociale de dégager durablement des excédents, ce qui l’expose à un risque de dévoiement vers d’autres secteurs, notamment de la branche Maladie dont on connaît la situation très déficitaire. La mission fait plusieurs recommandations. En premier lieu rééquilibrer certaines prestations : les prestations en nature et d’incapacité temporaire sont plus favorables dans le régime des Accidents du travail que dans le régime de droit commun de l’Assurance maladie ; en revanche, la réparation des incapacités permanentes est insuffisante, le salarié ne bénéficiant pas de la réparation intégrale en contrepartie du fait qu’il n’a pas à faire la preuve de la faute de l’employeur ; mais cela occasionne une perte de revenu sensible pour la victime, ce qui conduit la Commission à préconiser une réévaluation substantielle des versements en capital et des rentes. Les rapporteurs soulignent par ailleurs la faiblesse des moyens affectés par la branche à la prévention (3,2 % du total de ses dépenses contre 7 % en Allemagne) alors même que la sinistralité stagne depuis 20 ans. La Commission propose enfin une révision de la tarification des cotisations, qui varie en fonction de la sinistralité de la branche et de l’entreprise, et d’augmenter celle-ci dans des secteurs sous-tarifés comme celui des professions de santé et des ESMS

Observations de la Cour des Comptes sur le Comité économique des produits de santé (CEPS)

Le Comité économique des produits de santé est l’organisme qui négocie les tarifs des produits de santé avec les industriels, et de ce fait joue un rôle déterminant dans la fixation des prix publics des médicaments par le gouvernement et, par là-même, dans le pilotage de l’ONDAM. Dans ses observations définitives, la Cour relève que la régulation économique et financière effectuée par le CEPS a permis que les dépenses de produits de santé évoluent deux fois moins vite que l’ensemble des dépenses de santé entre 2011 et 2021, bien que les dépenses de médicaments stricto sensu au sein de celles-ci aient beaucoup augmenté du fait de l’arrivée de thérapies innovantes très coûteuses. Mais la structure de cet organisme est fragile au regard de l’augmentation de sa charge de travail et de l’insuffisance de sa capacité d’expertise face à la complexité des dossiers. Par ailleurs, le système d’information, dont la gestion est éclatée entre plusieurs acteurs (notamment la CNAM) apparaît inadapté et insuffisamment sécurisé. Si l’organisation interne du CEPS est à améliorer, en particulier par l’adoption d’un nouveau règlement intérieur, l’accent doit être mis sur la réduction des délais de décision de prise en charge des médicaments, qui sont trop longs et sont responsables d’un temps d’accès au marché supérieur en France à celui constaté dans les autres pays européens notamment pour les anti-cancéreux. Enfin la mission et le cadre d’action du CEPS doivent être mieux encadrés au regard de l’objectif de souveraineté sanitaire et industrielle et de celui de maîtrise de l’inflation, qui sont aujourd’hui prégnants par rapport aux objectifs purement financiers. La Cour conclut par la nécessité de renforcer le « positionnement institutionnel » du CEPS et d’augmenter ses moyens en particulier qualitativement.

La suppression des lits d’hôpitaux se poursuit

L’enquête annuelle de la DREES sur la capacité d’accueil hospitalière fait apparaître qu’en 2023 le nombre de lits en état d’accueillir des patients en hospitalisation complète continue de diminuer de 1,3 % (après -1,8 % en 2022 et -1,4 % en 2021), comme c’est le cas pour les lits de réanimation, mais la capacité d’accueil de ceux-ci reste supérieure à celle de 2019. En revanche les capacités d’accueil en hospitalisation partielle et à domicile continuent d’augmenter.

->Retraites

Revalorisation des retraites complémentaires

Lors de sa réunion du 15 octobre, le conseil d’administration de l’AGIRC-ARRCO a décidé d’une augmentation de 1,6 % au 1er novembre 2024 des retraites complémentaires, conformément à l’accord interprofessionnel pour la période 2023-2026 du 5 octobre 2023.

Augmentation de l’âge de départ en retraite après les réformes de 2010 et 2023

Selon l’enquête annuelle de la DREES sur « les retraités et les retraites en 2024 », l’âge conjoncturel de départ en retraite à fin 2022 s’élève 62 ans et 8 mois pour les retraités de droit direct. Il a augmenté de 2 ans et 2 mois depuis 2010 du fait de la réforme de cette année-là, mais il progresse plus lentement depuis 2016. Pour l’avenir, la DREES estime que la réforme de 2023 aura des effets plus limités que celle de 2010, avec un recul de seulement 6 mois de l’âge moyen de départ effectif. Cela est dû au fait que la réforme de 2023 a laissé inchangé à 67 ans l’âge d’annulation de la décote, alors qu’en 2010 il avait été porté de 65 à 67 ans.

Le coût de l’abrogation de la réforme des retraites, échec de la première tentative

La Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse a procédé à une simulation de ce que coûterait une abrogation des deux réformes paramétriques (le report de l’âge légal de départ à 64 ans et l’accélération de la durée d’assurance requise pour l’obtention du taux plein), poussée à la fois par le NFP et par le RN. Selon les chiffrages rapportés par « les Échos », un abandon de la réforme aggraverait le déficit de l’Assurance vieillesse de 3,4 Md€ en 2025 et de près de 16 Md€ en 2032, ce qui compte tenu du déficit tendanciel déjà prévu conduirait à un déficit potentiel de 32 Md€ dans 8 ans. Plusieurs initiatives parlementaires à ce sujet sont en cours. La première, celle que le RN prévoyait de faire débattre par le truchement de sa « niche parlementaire » le 31 octobre a échoué. Sa proposition, qui prévoyait de ramener l’âge légal de 64 à 62 ans avec 42 annuités de cotisation, avait été vidée de sa substance en commission et, en séance publique, s’est vue opposer l’article 40 de la Constitution. La prochaine proposition d’abolition de la réforme devrait intervenir en novembre à l’instigation du NFP.

->Assurance chômage

La nouvelle lettre de cadrage du Gouvernement pour la réforme de l’Assurance chômage

Comme annoncé par le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet a écrit aux partenaires sociaux pour les inviter à reprendre les négociations sur la convention d’Assurance chômage sur la base de l’accord auquel ils étaient parvenus à la fin de l’année dernière mais qui n’avait pas obtenu l’accord du Gouvernement Attal. L’une des questions restant en suspens est celle de l’emploi des seniors, qui prend une acuité particulière avec le report de l’âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans. Le Gouvernement, qui s’est déclaré par ailleurs ouvert à la retraite progressive dans le cadre des aménagements qui pourraient être apportés à la réforme des retraites d’avril 2023, a fixé aux partenaires sociaux l’objectif de dégager 400 M€ d’économies sur l‘indemnisation du chômage pour financer ces mesures, ce qui est très en retrait par rapport à l’exigence de trouver 3,5 Md€ qu’avait imposée le précédent Gouvernement dans sa lettre de cadrage d’août 2023. Les partenaires sociaux ont jusqu’au 31 octobre pour finaliser leurs discussions, un nouveau décret de « jointure » devant permettre au régime d’Assurance chômage de continuer à fonctionner jusqu’à la fin de l’année.

Coup d’arrêt au redressement financier de l’UNEDIC.

L’UNEDIC vient de revoir en baisse ses prévisions de résultat pour 2024 ; alors que dans ses prévisions de juin (v. Repères, juin 2024) le régime de l’Assurance chômage prévoyait encore un excédent de 0,9 Md€ pour 2024, celui-ci ne serait plus que de 0,3 Md€ ; il remonterait sur les exercices suivants, mais serait moindre que ce qui était initialement escompté, de 9,4 Md€ en 2027 contre 13 Md€ prévus. La faute en incombe, selon l’UNEDIC, à la dégradation du marché de l’emploi attendue jusqu’à 2026 et aux prélèvements opérés par l’État pour le financement des politiques de l’emploi. Il devrait s’ensuivre un désendettement de l’organisme moins rapide que prévu, sa dette s’élevant à 44,3 Md€ fin 2027, contre 31,3 Md€ s’il n’y avait pas eu les prélèvements de l’État.

->Solidarités/Lutte contre la pauvreté/Revenu universel

Minima sociaux et prestations sociales en 2024

La DREES a publié son enquête annuelle sur les minima sociaux et les prestations sociales qui porte sur la situation à fin 2022. À cette date, 4,34 M de personnes étaient allocataires d’un minimum social, soit une légère progression par rapport à 2021. Les dépenses liées au versement des minima sociaux s’élevaient à 30,6 Md€, soit 1,2 % du PIB. Globalement les minima sociaux et autres prestations sociales non contributives (allocations familiales, aides au logement, prime d’activité) ont permis de maintenir à 14,5 % le pourcentage de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté.

FISCALITÉ ET PROCÉDURES FISCALES
->Politique fiscale

La déclaration de politique générale et les annonces dans le domaine fiscal

Le Premier Ministre Michel Barnier a prononcé à l’Assemblée nationale, le 1er octobre, la déclaration de politique générale de son gouvernement. Les annonces sont restées assez floues. « Après la réduction de la dépense publique et l’amélioration de son efficacité, le troisième remède est d’ordre fiscal » a-t-il souligné. En matière fiscale, on retrouve les marottes habituelles et ce ne sera pas le « grand soir » tant attendu sur certains bancs de l’Assemblée nationale. Après avoir rappelé que les impôts en France sont parmi les plus élevés du monde, il a indiqué que les baisses d’impôts décidées depuis 2017 et les mesures prises pendant la crise de la Covid-19 ont aidé beaucoup de ménages et de nombreuses entreprises en redonnant de l’oxygène dans une situation inédite et grave. « Mais la situation des comptes publics demande aujourd’hui un effort ciblé, limité dans le temps et partagé dans une exigence de justice fiscale. Ce partage de l’effort nous conduira à demander une participation au redressement collectif aux grandes et très grandes entreprises qui réalisent des profits importants » a-t-il précisé. Le Premier ministre souhaite introduire davantage de justice fiscale sans remettre en cause la compétitivité de la France car il n’y a ni partage ni redistribution possible s’il n’existe pas en amont de l’activité et de la production de richesses. Cette exigence conduira également le Gouvernement à demander une contribution exceptionnelle aux contribuables les plus fortunés afin d’éviter les stratégies de défiscalisation des plus gros contribuables. Enfin, le Premier ministre souhaite lutter contre la fraude fiscale et la fraude sociale. Le Premier ministre a acté le report à 2029 d’un retour du déficit effectif en dessous de 3 % du PIB, soit plus de dix ans après la dernière année (2018) pour laquelle les finances publiques françaises étaient conformes aux règles européennes imposant des « finances publiques saines ». La marche visée par le Gouvernement en 2025 (5 % de déficit public effectif) suppose un effort de plus de 40 Md€, dont un tiers de hausses d’impôts. Mais les mesures pour y parvenir n’ont pas été détaillées lors de la déclaration prononcée devant les députés. On observe une posologie analogue à ce qui était proposé comme remède par l’économiste Jean Pisani-Ferry dans une interview au journal « Les Échos » fin août (v. Repères, août 2024). En revanche, le Premier ministre n’a pas donné la liste précise des composants fiscaux de sa solution thérapeutique. Ce ne serait finalement que parce qu’il est contraint par la situation alarmante des comptes publics qu’il tournerait temporairement le dos à la politique de l’offre au risque de contrarier les députés de son propre camp sans réellement satisfaire pleinement ses pourfendeurs.

L’avis du Haut conseil des finances publiques sur l’évaluation des recettes fiscales

C’est dans l’urgence et dans un contexte largement inédit depuis l’entrée en vigueur de la LOLF que le Gouvernement a envoyé les grandes lignes de son projet de loi de finances pour 2025 au Haut Conseil des finances publiques (HCFP), celui-ci ayant été invité à se prononcer dans des délais excessivement courts. Il a été saisi par le Gouvernement, le 9 octobre 2024, pour rendre son avis le lendemain. Toutefois, dès le 2 octobre, certains éléments lui ont été adressés par le Gouvernement. Le Haut Conseil estime que les prévisions de croissance (+1,1 %), de masse salariale (2,9 % dans les branches marchandes non agricoles) et d’inflation (+2,1 %) du Gouvernement pour 2024 sont réalistes. Il considère que la prévision de recettes, et de solde public pour 2024 est encore affectée « d’une incertitude non négligeable, mais cohérente avec les informations comptables et budgétaires disponibles et avec le scénario macroéconomique ». En revanche, il estime que le scénario macroéconomique pour 2025 est dans l’ensemble fragile. La prévision de croissance pour 2025 (+1,1 %) apparaît en premier lieu un peu élevée compte tenu des mesures de hausse des prélèvements obligatoires atteignant un point de PIB. Pour compenser cet impact restrictif, la prévision de croissance pour 2025 retient des hypothèses favorables sur le commerce mondial (ce qui est discutable au regard de la guerre en Ukraine, de la situation au Proche-Orient, et de l’incertitude liée aux élections américaines), l’investissement des entreprises et la baisse du taux d’épargne des ménages, qui correspondraient à une nette accélération de l’activité sans ajustement fiscal. En dépit du soutien que peut apporter la baisse des taux d’intérêt (v. Repères, juillet 2024) une telle option apparaît donc bien optimiste de nouveau. S’agissant plus particulièrement du réalisme des prévisions de recettes sur lesquelles reposent le projet de loi de finances pour 2025, le HCFP relève que, malgré ses demandes, l’information qui lui a été communiquée par le Gouvernement n’est pas suffisante pour apprécier les mesures de hausse des prélèvements obligatoires. La prévision de croissance spontanée des recettes est jugée cohérente avec le scénario macroéconomique. Au total, l’effort repose à 70 % sur des hausses de prélèvements obligatoires (30 Md€, soit un point de PIB) et à seulement 30 % sur les dépenses (12 Md€, soit 0,4 point de PIB). Ces proportions diffèrent de celles retenues par le Gouvernement qui, sur la base de modes de calcul différents, estime que l’effort de consolidation budgétaire s’élève à 60 Md€, se décomposant en 40 Md€ de réduction de dépenses et 20 Md€ de hausse de prélèvements obligatoires. Le HCFP n’est pas en mesure d’apprécier la pertinence de cette estimation. La hausse des prélèvements obligatoires de 20 Md€ ne tient pas compte de certaines mesures figurant dans le projet de loi de finances pour 2025 (une partie de l’augmentation de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité par exemple).

Le rejet de la 1ère partie du PLF pour 2025 par les députés en commission des finances

À l’Assemblée nationale, le 19 octobre, les députés ont rejeté, en commission des finances, la première partie du projet de loi de finances pour 2025, contenant le volet « recettes » présenté par le Gouvernement. Le ministre des finances a appelé les députés « à revenir à l’esprit de responsabilité » à cette occasion. Sur les 41 articles examinés, environ une dizaine d’articles a été supprimée. Puis, les députés ont rejeté ce texte qui intervient après que le texte ait été largement réécrit avec notamment l’adoption de près de 200 amendements qui modifient profondément l’équilibre financier du texte initial. Les hausses de taxe sur l’électricité ou le gel des ressources des collectivités territoriales font partie des mesures emblématiques du texte qui ont été rejetées. Selon le ministre, « des alliances de circonstances ont conduit à l’adoption de dizaines d’amendements pour imposer toujours plus les contribuables ». Les membres de la commission des finances de l’Assemblée nationale ont notamment accru la fiscalité sur les super profits, les super dividendes, renforcé la taxe sur les rachats d’action, doublé la contribution exceptionnelle des grandes entreprises de transport maritime ou réduit le périmètre du crédit impôt recherche. En revanche, les députés ont rejeté l’alourdissement du malus automobile proposé par le Gouvernement et la possibilité donnée au Gouvernement d’augmenter les taxes sur l’électricité. La gauche a voté pour cette version modifiée du texte initial. Tous les autres groupes parlementaires, le RN et ses alliés, le camp présidentiel et les centristes de Liot ont voté contre cette version du texte en raison d’une augmentation excessive de la charge fiscale par rapport au texte initial, d’environ 60 Md€ selon le rapporteur général du budget, le député De Courson. Certains députés ont dénoncé un « carnaval fiscal » qui ferait immédiatement basculer l’économie française dans la récession et dans la crise. Avec des alliances à géométrie variable, l’équation politique est complexe à résoudre. Les députés doivent ensuite débattre dans l’hémicycle sur le projet de loi initial du Gouvernement.

Un débat décousu sur la 1ère partie du PLF pour 2025 à l’Assemblée nationale

Après une semaine d’examen en séance publique à l’Assemblée nationale, les députés ne sont pas parvenus à terminer, à la fin du mois d’octobre, l’examen de la première partie du projet de loi de finances et les 1 500 amendements restants à débattre pour le volet « recettes » de la première partie du projet de loi de finances pour 2025. Les débats relatifs à la première partie vont donc déborder sur le mois de novembre. Les textes constitutionnels et organiques prévoient que l’Assemblée nationale dispose de quarante jours pour examiner l’ensemble du projet de loi de finances. Si ce n’est pas le cas, c’est le texte du Gouvernement qui est envoyé au Sénat, qui a, de son côté, quinze jours pour légiférer. En attendant, le texte gouvernemental initial a été complètement dénaturé par les députés. Ces derniers ont par exemple rejeté la surtaxe sur les grandes entreprises, après que celle-ci ait été largement alourdie par la gauche. Les députés ont également supprimé un article prévoyant d’alourdir le « malus » pour les voitures essence et diesel. La hausse de la taxation sur l’électricité a même été abrogée par les députés. Très mobilisée dans l’hémicycle, la gauche est parvenue à faire voter un impôt sur le patrimoine des milliardaires, à créer une contribution exceptionnelle sur les dividendes des entreprises du CAC 40, et à rendre pérenne la contribution exceptionnelle demandée aux entreprises de fret maritime, et à plafonner à 500 M€ la niche fiscale dont bénéficie ce secteur. Ces modifications ne sont toutefois que temporaires. La majorité sénatoriale aura tout loisir à son tour, lors de la navette parlementaire, de remanier le projet de loi de finances pour 2025 dans un sens distinct.

Quelle fiscalité pour le financement de l’audiovisuel public (suite) ?

Le projet de loi de finances pour 2025 prend acte de la suppression de la contribution de l’audiovisuel public, et de l’expiration prochaine de la solution temporaire qui s’en est suivie : le financement de l’audiovisuel public via l’affectation d’une fraction de la TVA. C’est donc la pérennisation de son mode de financement qui est en débat depuis le printemps, afin d’écarter le risque que sa budgétisation pure et simple, actée dans le PLF pour 2025, ne devienne la norme (v. Repères, mai 2024). Pour certains observateurs, la budgétisation modifie profondément la relation entre le Gouvernement et le média concerné. En cas de budgétisation, le Gouvernement prend le pouvoir sur l’audiovisuel comme pour n’importe quelle politique publique. Fin octobre 2024, le Sénat a adopté à la quasi-unanimité une proposition de loi organique visant à maintenir le système de financement de l’audiovisuel public mis en place depuis la suppression de la contribution à l’audiovisuel public en loi de finances rectificative pour 2022. Si le texte ne satisfait pas pleinement les parlementaires de gauche, ils reconnaissent son mérite d’éviter une budgétisation en 2025. La loi organique du 28 décembre 2021, ayant modifié la LOLF, prévoit, en effet, qu’au-delà de 2025 une affectation d’imposition de toutes natures ne peut être maintenue que si celle-ci est en lien avec la mission de service public qu’elle vient financer. C’est dans ce contexte que s’inscrit la proposition de loi organique qui vise à modifier la LOLF pour maintenir le mode de financement de l’audiovisuel public par affectation d’un montant déterminé d’une imposition de toute nature, et donc d’un montant de TVA reversé annuellement. Sans modification rapide de la LOLF, le financement de l’audiovisuel public serait assuré par le budget général de l’État et non plus par une ressource fiscale affectée. Le texte initial prévoyait un mode de financement particulier pour Arte France avec la mise en place d’un prélèvement sur recettes. Cette disposition a toutefois été supprimée par les sénateurs. Les députés doivent à présent examiner la proposition de loi organique.

->Impôt sur le revenu

Les mesures fiscales présentées dans le PLF pour 2025 pour les particuliers

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 a été déposé à l’Assemblée nationale le 10 octobre 2024. La présentation des principales mesures fiscales proposées dans le projet de loi initial présenté par le Gouvernement, en cours d’examen au Parlement, se fait ici sous réserve que les modalités définitives ne soient connues qu’après promulgation du texte, s’il a lieu fin décembre 2024. S’agissant des mesures concernant les particuliers, on retrouve d’abord l’indexation du barème de l’impôt sur l’inflation (art. 2 du PLF initial). Les tranches du barème de l’impôt sur le revenu (IR), ainsi que les seuils et limites qui lui sont associés, augmentent de 2 %, soit l’évolution des prix hors tabac de 2024 par rapport à 2023. Ensuite, mesure phare du texte, on retrouve l’instauration d’une contribution différentielle sur les hauts revenus (art. 3 du PLF initial). Cette contribution vise à assurer une imposition minimale de 20 % des plus hauts revenus (plus de 250.000 €, le double pour un couple), avec une décote pour atténuer les effets de seuil.

Immobilier et tourisme : la « niche fiscale Airbnb » suite et fin devant le Parlement ?

Déjà évoquée dans ces colonnes (v. Repères, juillet 2024), les parlementaires ont trouvé un accord sur de nouvelles limites à apporter à la « niche fiscale Airnbnb  ». Les députés et les sénateurs réunis en commission mixte paritaire à la fin du mois d’octobre ont trouvé un accord sur la proposition de loi transpartisane renforçant la régulation des meublés de tourisme. Le texte a été adopté par 12 des 14 membres de la CMP. Seuls les deux députés RN ont voté contre.

Le texte des députés Le Meur (Renaissance) et Echaniz (PS) avait été adopté en janvier 2024 à l’Assemblée nationale, avant d’être adopté au Sénat le 21 mai dernier. Le texte faisait partie des dispositions législatives en attente depuis la dissolution de l’Assemblée nationale. Les débats ont notamment été difficiles sur le volet fiscal du texte. La niche fiscale dite « Airbnb » devrait être sérieusement rabotée, et de nouveaux outils seront à la disposition des maires pour éviter que les locations de courte durée n’assèchent le marché immobilier local. Le texte prévoit donc un alignement de la fiscalité des locations de courte durée avec celles de longue durée. Le propriétaire d’un logement de meublé de tourisme non classé bénéficiera désormais d’un abattement de 30 %, dans la limite de 15 000 € de chiffre d’affaires par an (contre 23 000 € dans la version adoptée par le Sénat en mai). Les meublés de tourisme classés conservent une particularité : l’abattement sera de 50 %, avec un plafond fixé à 77 700 €. Le texte donne la possibilité aux conseils municipaux d’abaisser le nombre maximal de jours de locations touristiques des résidences principales dans la limite de 90 jours pour éviter les abus. Précisons que tout cela peut être remis en cause dans le projet de loi de finances pour 2025. N’oublions pas non plus que la problématique du logement n’est pas que fiscale…

->Fiscalité environnementale

Les mesures fiscales présentées dans le PLF pour 2025 pour les particuliers

Sous les mêmes réserves qu’indiquées précédemment, on retrouve un durcissement de certaines mesures à destination des particuliers. Tout d’abord, l’adaptation des tarifs d’accise sur l’électricité (art. 4 du PLF initial). Cette disposition du projet de loi adapte les tarifs normaux d’accise en sortie de bouclier tarifaire afin de garantir au consommateur une baisse de 9 % du tarif réglementé au 1er février 2025. Un arrêté déterminera le montant de l’accise. On retrouve ensuite un renforcement du malus sur les véhicules polluants (art. 8 et art. 9 du PLF initial). Le « malus CO2 » et le « malus masse » sont durcis et la réfaction est aménagée pour mieux tenir compte de la perte de valeur des véhicules d’occasion. Le « malus CO2  » est renforcé progressivement, pour atteindre en 2027 une taxation dès 99g/CO2/km et un tarif maximum de 90 000 €. Le « malus masse » s’applique dès 1 500 kg et l’abattement pour les véhicules non-rechargeables est revu. La réfaction du malus est adaptée et sera plus importante pour les véhicules récents. Un malus rétroactif s’appliquera en 2026 pour les véhicules n’ayant pas été soumis à malus à la première immatriculation. Enfin, on note des taux réduits de TVA sur les opérations liées au chauffage (art. 10 du PLF initial). Le taux réduit de 5,5 % est étendu aux réseaux de chaleur à énergies renouvelables. Les chaudières à énergies fossiles sont exclues des taux réduits, sauf pour l’entretien et la réparation des matériels existants.

Gazole non routier agricole : la mesure contenue dans le PLF pour 2025

Déjà évoquée dans ces colonnes (v. Repères, janv. 2024), le projet de loi de finances pour 2025 maintient le tarif d’accise applicable au gazole utilisé pour les travaux agricoles et forestiers à son niveau de 2023 : il annule la hausse progressive prévue par la loi de finances pour 2024 (art. 94 L. n° 2023 1322 du 29 déc. 2023 de finances pour 2024). En effet, cette disposition prévoyait une hausse progressive du tarif réduit d’accise applicable au gazole consommé pour les besoins des travaux agricoles et forestiers de 2,85 c€/L/an à compter du 1er janvier 2024. Ce tarif réduit devait ainsi passer de 3,86 c€/L à 23,86 c€/L en 2030. Conformément à la présentation des mesures d’urgence en faveur des exploitants agricoles le 26 janvier 2024 par le Gouvernement Attal, l’entrée en vigueur de cette mesure est rétroactive et ne remet pas en cause les mesures prévues par la loi de finances pour 2024 pour accompagner le secteur agricole dans la transition énergétique. Cette mesure complète les aides d’urgence à la trésorerie des agriculteurs relatives au gazole agricole instaurées au cours du premier semestre 2024 : à savoir la mise en place d’une avance de 50 % du remboursement dû au titre des consommations de GNR effectuées en 2024, versée en février 2024 ; et l’application du tarif réduit d’accise à l’achat (au lieu d’attendre le remboursement l’année suivante) à compter du 1er juillet 2024.

->Impôt sur les sociétés

Les mesures fiscales présentées dans le PLF pour 2025 pour les entreprises

Sous les mêmes réserves qu’indiquées précédemment, on retrouve, conformément aux annonces du Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale (v. supra) une contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises (art. 11 et 12 du PLF initial). Elle concerne les entreprises dont le chiffres d’affaires dépasse 1 Md€. Son taux est fixé à 20,6 % pour le premier exercice clos en 2025 et à 10,3 % pour le suivant. Ces taux sont doublés au-delà de 3 Md€ de chiffre d’affaires. Les grandes entreprises de transport maritime relèvent d’un dispositif adapté. On note un report de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE – art. 15 du PLF initial). Prévue pour 2027, la suppression définitive de la CVAE est reportée. Les taux d’imposition sont maintenus pour les années 2025 à 2027 à leur niveau de 2024, soit 0,28 % au maximum. Ce taux sera abaissé à 0,19 % en 2028, puis 0,09 % en 2029. La CVAE sera totalement supprimée en 2030. Par ailleurs, on retrouve la mise en place d’une taxe sur le rachat de titres par les grandes entreprises (art. 26). Cet article instaure une taxe sur les réductions de capital par annulation d’actions rachetées par les plus grandes entreprises, réalisant un chiffre d’affaires individuel ou consolidé de plus d’1 Md€ (v. Repères, avril 2024). Enfin, plusieurs mesures fiscales sont présentées en faveur du secteur agricole, avec notamment une incitation à la transmission des exploitations au profit de jeunes agriculteurs (art. 19 du PLF initial), par un renforcement des dispositifs d’exonération ou d’abattement sur la plus-value professionnelle en cas de cession au profit des jeunes agriculteurs. Ensuite, le texte aménage les déductions pour épargne de précaution et pour augmentation des stocks de vaches laitières et allaitantes ; il passe l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des terres agricoles de 20 % à 30 % (art. 18 du PLF initial). Le texte maintient le tarif d’accise applicable au gazole utilisé pour les travaux agricoles et forestiers à son niveau de 2023 (art. 20 du PLF initial, v. supra).

->Procédures fiscales

La Cour des comptes rend un rapport sur la Direction nationale des enquêtes fiscales

Un rapport de la Cour des comptes, rendu public au mois d’octobre 2024, porte sur la direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP). Dotée de 380 agents, cette administration fiscale est en charge de la collecte du renseignement sur l’ensemble de la fraude fiscale, de la détection des schémas de fraude intentionnelle les plus sophistiqués, notamment à l’international, et des relations avec l’autorité judiciaire dans une perspective répressive. Elle dispose pour ce faire de moyens humains, juridiques, voire technologiques qui ont été renforcés au cours des douze dernières années suite à l’affaire Cahuzac : elle analyse quantité d’informations venues du réseau territorial du contrôle fiscal, d’autres administrations (les douanes, Tracfin, les services d’enquête judiciaire, les tribunaux, les administrations fiscales étrangères, etc.), et parfois de dénonciations par le biais des aviseurs fiscaux. Elle seule est autorisée à réaliser des saisies dans les locaux des personnes soupçonnées de fraude fiscale. Bien qu’elle se soit adaptée, sur la dernière décennie, aux mutations économiques (émergence du commerce électronique et des crypto monnaies, etc.) et à la montée en puissance de l’autorité judiciaire et à celle du renseignement, la performance de son activité de recherche reste difficile à mesurer selon la Cour des comptes. Au terme de son contrôle, la Cour formule sept recommandations pour consolider la position de la DNEF à la pointe de la détection de la fraude fiscale la plus grave, réaffuter ses outils et ses expertises, et étendre son réseau de coopérations, tant au sein de la DGFiP qu’auprès des acteurs ministériels et interministériels. Dans sa réponse aux observations de la Cour, la directrice de la DGFIP prend acte de l’appréciation positive portée par la Cour des comptes sur le travail réalisé par la DNEF, dont elle reconnaît la qualité et l’utilité. La Cour souligne également la pertinence de sa stratégie sur le long terme et l’excellence des coopérations qu’elle entretient avec ses nombreux partenaires tant au sein de la DGFIP qu’à l’extérieur de celle-ci, notamment avec le ministère de la Justice. La DGFIP partage également le point de vue de la Cour des comptes selon lequel cette direction, de par sa singularité, son positionnement, ses missions et ses enjeux doit continuer à s’adapter, ainsi qu’à adapter ses outils, à l’évolution de la fraude et plus largement de son environnement.

MANAGEMENT PUBLIC

->Fonction Publique d’État

Un rapport du Sénat alerte sur la dégradation de l’immobilier de l’ATE

La commission des finances du Sénat a publié un rapport d’information sur l’état du patrimoine immobilier de l’administration territoriale de l’État (v. « Immobilier de l’administration territoriale de l’État », Sénat, 24 sept. 2024, rapport de Mme Florence Blatrix Contat). La rapporteure spéciale des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », a présenté les conclusions de ses travaux de contrôle sur l’immobilier de l’administration territoriale de l’État (ATE). Elle alerte sur la dégradation du parc immobilier de l’ATE qui couvre plus de 3 M de m² répartis en 2 871 bâtiments. En 2023, la location de 320 000 m² à des bailleurs privés a coûté 91,32 M€, soit 27 % des dépenses immobilières de l’ATE, dépassant de 2,4 fois les investissements. Elle note que le manque de moyens limite les travaux d’entretien, avec 16% des bâtiments jugés non conformes. Les objectifs d’efficacité énergétique (réduction de 40% de la consommation énergétique d’ici 2030) semblent inatteignables sans un investissement massif. Le parc souffre également de sous-densité, avec une surface par agent dépassant souvent les 40 m². Face à ces défis, une foncière interministérielle, prévue pour 2025 (v. Repères, mars 2024), pourrait améliorer la gestion du parc, en centralisant les financements et en intégrant les coûts de maintenance et de transition énergétique dans les loyers, pour encourager une meilleure rationalisation des espaces.

Fonction publique : une prime pour compenser la hausse du SMIC

Pour faire face à la revalorisation de 2 % du SMIC au 1er novembre, le Gouvernement a opté pour une « indemnité différentielle » de 0,06 € par mois pour les agents publics dont le salaire est inférieur au nouveau montant du SMIC, désormais fixé à 1 801,80 € brut. Ce choix, annoncé par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), permet d’ajuster temporairement les salaires les plus bas sans modifier les grilles indiciaires. Les syndicats souhaitaient une augmentation de l’indice minimum de traitement. Ils appellent à une révision plus large des grilles salariales pour assurer une progression durable des rémunérations et dénoncent cette prime comme une solution « provisoire ».

De nouvelles suppressions de postes à prévoir au ministère des finances

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de nouvelles réductions d’effectifs dans les ministères, avec une diminution de 529 équivalents temps plein (ETP) pour les ministères économiques et financiers. La direction générale des finances publiques (DGFIP) est la plus touchée avec une perte de 550 postes, portant à plus de 30 000 les suppressions de postes depuis 2008, soit une réduction de 25 % des effectifs initiaux. En 2025, le plafond d’emplois de la DGFIP atteindra 92.562, contre environ 125 500 en 2008. D’autres directions sont également concernées par ces diminutions : la DGCCRF et la DGE perdront chacune 5 postes, tandis que la douane (DGDDI) bénéficiera de 50 nouveaux postes, Tracfin de 10 et l’AIFE de 7, les effectifs de l’INSEE restant stables. Les syndicats dénoncent ces suppressions. Solidaires Finances déplore une « diète forcée » qui accentue la pression sur les missions de la DGFIP et dégrade les conditions de travail, tandis que la CGT Finances publiques critique une « austérité à tous les étages » et souligne le non-respect des engagements de pause en 2025 annoncés par le cadre d’objectifs de la DGFIP.

->Fonction Publique Hospitalière

L’ANAP lance son pack « Achats Durables » à destination des établissements de santé

L’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé (ANAP) renforce son engagement en matière de durabilité avec un nouveau programme d’accompagnement pour encourager les achats durables. Trois ans après la création de son pôle « Développement durable », l’ANAP a lancé en octobre 2024 un pack « Achats Durables » comprenant un ensemble d’outils pour soutenir les établissements sanitaires et médico-sociaux dans la mise en œuvre de schémas de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (SAPSER). En plus de guides méthodologiques, l’ANAP propose des sessions de formation et des retours d’expérience sur les achats d’occasion. Pour répondre aux préoccupations financières des établissements, l’agence a recensé près de 100 subventions disponibles. Le pack prévoit aussi une masterclass « Achats Durables » pour échanger sur les solutions innovantes permettant de réduire à la fois les dépenses et l’empreinte carbone.

->Fonction Publique Territoriale

La Cour des comptes appelle à une réforme systémique de la DGF

Dans un rapport publié le 9 octobre 2024 (« La dotation Globale de Fonctionnement », Cour des Comptes, 9 oct. 2024), la Cour des comptes appelle à une réforme systémique de la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF). Depuis 2021, la TVA a dépassé la DGF en tant que principal concours financier de l’État (avec 54,9 Md€ affectés aux collectivités en 2024). Cependant, la DGF reste essentielle pour certaines collectivités et représente encore une masse financière significative (bien qu’elle ne soit pas indexée sur l’inflation et diminue en euros constants). La DGF est composée de 18 dotations principales, dont les dotations forfaitaires et de compensation (18,2 Md€ en 2023) et les dotations de péréquation (9 Md€). Ces dernières, visant à réduire les inégalités entre collectivités, représentent désormais 44,8 % des montants pour les communes, mais seulement 18,7 % pour les départements. Dans son rapport, la Cour note que des inégalités subsistent : certaines collectivités aux moyens financiers élevés continuent de percevoir des dotations plus importantes. Face à cela, les magistrats proposent une réforme profonde, introduisant une dotation forfaitaire « cible » basée sur les ressources des collectivités et un complément de péréquation prenant en compte leurs charges. Cette réforme viserait à rationaliser l’architecture de la DGF pour répondre aux besoins actuels et renforcer l’équité entre collectivités.

La hausse des cotisations retraites des fonctionnaires ne sera pas compensée pour les collectivités territoriales

Le gouvernement Barnier a confirmé que les collectivités territoriales ne bénéficieront d’aucune compensation pour l’augmentation de 4 points de leurs cotisations à la caisse de retraite des fonctionnaires (CNRACL) en 2025. Cette mesure, incluse dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, vise à combler le déficit de la CNRACL, qui atteint actuellement 2,5 Md€ et pourrait dépasser les 10 Md€ d’ici 2030. Ce déficit s’explique par le vieillissement de la population des agents territoriaux, l’évolution défavorable du ratio cotisants/retraités, et la ponction de cette caisse pour soutenir d’autres régimes de retraite déficitaires. Malgré les protestations des élus locaux, qui voient leurs charges augmenter sans aide de l’État, le gouvernement a écarté toute perspective de compensation, estimant la hausse nécessaire pour rétablir l’équilibre du régime de retraite.

->Transitions

Un rapport de la Cour des Comptes sur le déploiement de l’IA à Bercy

La Cour des comptes a publié, le 22 octobre 2024, un rapport sur le déploiement de l’IA au sein du ministère des Finances (« L’Intelligence Artificielle dans les Politiques Publiques : L’exemple du Ministère de l’Économie et des Finances », Cour des Comptes, 22 oct. 2024). Le rapport révèle que, depuis 2015, le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN) s’appuie sur l’IA pour améliorer ses opérations, notamment à travers le programme « Signaux Faibles » pour détecter les difficultés des entreprises, et « Foncier Innovant » pour identifier des biens non déclarés (v. Repères, février 2024 et novembre 2023). Ces initiatives, combinées à cinq autres projets de maîtrise des dépenses, ont généré 20 M€ d’économies annuelles en 2022, bien que cette somme soit inférieure aux 46,6 M€ initialement escomptés. La Cour des comptes pointe également du doigt le déploiement inégale de l’IA entre les directions du MEFSIN. En effet, bien que huit directions aient accès à l’IA, les ressources sont principalement concentrées au sein de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) et de l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE), limitant ainsi le potentiel de déploiement dans des secteurs comme le Trésor et le Budget. Ces disparités soulignent l’absence de pilotage ministériel centralisé pour assurer une intégration uniforme de l’IA, d’autant que les dispositifs de soutien interministériels restent sous-exploités. Les magistrats alertent également sur les risques éthiques et environnementaux liés au déploiement de l’IA. On retrouve des défis tels que les implications éthiques, les impacts sur les ressources humaines, et l’empreinte écologique qui sont finalement peu pris en compte. Ils appellent à la mise en place d’une « IA de confiance », impliquant une transparence accrue, l’explicabilité des décisions, et une réduction de l’empreinte écologique. Ils recommandent également l’adoption d’une « IA frugale », limitant les coûts de stockage et de calcul, et intégrant des pratiques de sobriété numérique. Ce concept, encore peu développé au niveau ministériel, favoriserait une « IA soutenable », alliant efficience et respect des engagements écologiques. Les recommandations de la Cour des comptes portent également sur l’amélioration du pilotage de l’IA au sein du MEFSIN et sur la création d’un incubateur au sein du ministère.

Les résultats décevants du « Budget Vert » de l’État pour 2024

Le 24 octobre 2024, le Gouvernement a publié le résultat du « Budget Vert » pour l’exercice 2023 (« Rapport sur l’impact environnemental du budget de l’État », oct. 2024). Les dépenses de fonctionnement analysées, incluant les carburants, les déplacements et le chauffage, révèlent un impact environnemental mitigé. En 2023, 812 M€ seulement ont été classés comme favorables, en baisse par rapport à 2022, tandis que les « dépenses brunes », dont les carburants, ont atteint 1,891 Md€, soit une augmentation de 171 M€. Parmi les ministères, seul celui de la transition écologique a progressé en augmentant ses dépenses vertes et réduisant ses dépenses brunes. En revanche, plusieurs autres ministères ont vu leurs dépenses brunes augmenter ou leurs dépenses vertes diminuer, illustrant les défis de la mise en œuvre d’une commande publique véritablement « verte ». Concernant l’exercice à venir, le projet de loi de finances pour 2025 affiche un « budget vert » en hausse avec 42,6 Md€ de dépenses favorables à l’environnement, principalement en lien avec les énergies renouvelables. Malgré cette avancée, 91 % des crédits budgétaires demeurent non cotés en raison d’une méthodologie inchangée qui limite la prise en compte des dépenses fonctionnelles.

Des inquiétudes autour de la formation à la transition écologique des fonctionnaires

Lancé en 2022, le plan de formation à la Transition Écologique initié par Stanislas Guérini, visait à former 25.000 cadres d’ici fin 2024 puis l’ensemble des 2,5 M d’agents publics d’ici 2027. Malgré des avancées (près de 12 000 cadres ont entamé la formation), le déploiement complet semble compromis par des doutes budgétaires et l’absence de soutien explicite du nouveau ministre de la Fonction publique et les difficultés de financement. Les objectifs initiaux prévoyaient une sensibilisation suivie de conférences, visites de terrain et actions concrètes, mais aucune session complète n’a encore été finalisée. La deuxième phase, visant 2,5 M d’agents, devait reposer principalement sur des Moocs en ligne, avec quelques ateliers en présentiel pour les volontaires. Cependant, ce volet est actuellement au point mort. Face aux doutes, le collectif scientifique chargé du déploiement du programme plaide pour une vision de long terme, voyant la formation écologique comme un investissement essentiel pour préparer l’administration publique aux défis environnementaux. Dans ce contexte, quatre collectifs de hauts fonctionnaires (Sens du Service Public, Le Lierre, Pour un Réveil Écologique et Une fonction publique pour la transition écologique) ont publié une tribune dans le journal « Acteurs Publics » pour exprimer leur inquiétude quant à l’avenir de la formation à la transition écologique pour les cadres de l’État (« L’alerte de quatre collectifs de hauts fonctionnaires sur la formation à la transition écologique », Acteurs Publics, 30 oct. 2024). Les hauts fonctionnaires estiment que cette formation est cruciale pour intégrer la transition écologique dans les politiques publiques. La phase actuelle, principalement en présentiel pour les cadres supérieurs, devrait s’étendre et s’adapter à chaque métier afin de favoriser des compétences concrètes et professionnelles. Pour déployer la formation à l’ensemble des agents, les collectifs recommandent de garantir des temps en présentiel, de diversifier les contenus et de mobiliser un vivier d’animateurs internes. Ils appellent à une stratégie financée et soutenue par une volonté politique, incluant la valorisation des animateurs et la constitution d’une communauté pérenne pour garantir l’impact de cette formation.

FISCALITÉ EUROPÉENNE ET INTERNATIONAL
->Fiscalité européenne

Le Conseil met à jour la liste européenne des paradis fiscaux

Le 8 octobre 2024, le Conseil a adopté la liste de l’UE des États et territoires non coopératifs à des fins fiscales. Antigua-et-Barbuda ayant été retirée, elle compte 11 pays : les Samoa américaines, Anguilla, les Fidji, Guam, les Palaos, le Panama, la Russie, le Samoa, Trinité-et-Tobago, les Îles Vierges américaines et le Vanuatu.

La Commission autorise l’exonération fiscale suédoise en faveur du biogaz

Le 23 octobre 2024, la Commission européenne a conclu que deux régimes suédois d’exonération fiscale en faveur du biogaz et du biopropane non alimentaires utilisés comme combustibles de chauffage ou comme carburants moteurs étaient conformes aux règles de l’UE en matière d’aides d’État. En juin 2020, la Commission avait autorisé les régimes en vertu des règles de l’UE en matière d’aides d’État, mais les décisions de la Commission avaient été annulées par le Tribunal le 21 décembre 2022.

Adoption de la surtaxe sur les voitures électriques étrangères

Le 29 octobre 2024, la Commission européenne a adopté le règlement d’exécution, publié le 30 octobre au JOUE, instituant des droits de douane supplémentaires sur les voitures électriques importées de Chine (v. Repères, juillet 2024). Cette mesure, qui pourra être supprimée par la suite sous conditions, pourra atteindre 35 %. En réponse, le 30 octobre 2024, la Chine a annoncé saisir l’OMC.

->Fiscalité internationale

Rapports de l’OCDE sur la fiscalité

Le 1er octobre 2024, l’OCDE a publié un rapport sur les réformes fiscales. Celui-ci note le ralentissement et l’inversion de la tendance à la baisse des prélèvements sur les entreprises et les particuliers qui avait été observée pendant la pandémie et la période d’inflation qui avait suivi. Il souligne une réorientation la gestion de crise vers des priorités budgétaires à long terme, que la France n’a pas encore suivie. Après celui revenant sur 15 ans de travaux sur la fiscalité et le développement publié le 16 octobre, le 24 octobre, le Secrétaire général de l’OCDE a publié son rapport sur la fiscalité à l’intention des ministres des Finances et des gouverneurs de banque centrale du G20 pour leur réunion programmé ce jour-là. Ce rapport traite notamment de la solution reposant sur deux piliers pour résoudre les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie. Il couvre également les avancées réalisées concernant la mise en œuvre des standards minimums du BEPS et de transparence fiscale, ainsi que des mises à jour sur la politique fiscale, la fiscalité et inégalités et l’administration fiscale. Enfin, le 28 octobre, il a été conclu par l’OCDE que la fiscalité devait être augmentée pour lutter contre le tabac en Amérique latine et dans les Caraïbes.

->Monnaies

Suite de la baisse des taux d’intérêt

Après une première baisse de ses taux d’intérêts en juin (v. Repères, juin 2024), la Banque centrale européenne (BCE) a procédé le 17 octobre à une nouvelle baisse de ses trois taux d’intérêt directeurs de 25 points de base. En conséquence, les taux d’intérêt de la facilité de dépôt, des opérations principales de refinancement et de la facilité de prêt marginal sont ramenés à respectivement 3,25 %, 3,40 % et 3,65 % à compter du 23 octobre 2024. Le processus de désinflation est en effet considéré comme en bonne voie. En Suisse, l’inflation est restée inférieure à 2% pendant 15 mois et le président Schegel a déclaré le 1er octobre 2024 qu’elle allait encore baissé, ce qui explique que la Banque centrale a baissé son taux à 1 % le 27 septembre et qu’il a envisagé début octobre le retour de taux négatif en 2025. Quant à la Banque centrale du Japon, elle a maintenu le 31 octobre son principal taux d’intérêt à 0,25 %, en raison d’incertitudes politiques, mais cela reste le niveau le plus élevé depuis longtemps en raison de sa croissance atone.

____

Aurélien BAUDU (Fiscalité et procédure fiscale – Coordination)

Fabrice BIN (Fiscalité européenne et International)

Florent GAULLIER-CAMUS (Budget de l’État et opérateurs – Comptabilité publique)

Léonard GOURBIER (Management public)

Matthieu HOUSER (Finances locales)

Aymeric POTTEAU (Finances publiques européennes)

Yves TERRASSE (Finances sociales)